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Revue de presse africaine : "Le sauveur du Mali s’appelle François Hollande"

Elle fait la une des journaux au Mali et plus largement en Afrique. L'intervention des troupes françaises, l'opération Serval, largement saluée par les Maliens, fait également l’objet de quelques critiques. Tour d’horizon de la presse africaine.

"Hollande le Malien", titre l’éditorial du "Républicain" ce lundi 14 janvier, au quatrième jour de l’intervention des forces françaises au Mali. À l’instar de plusieurs autres journaux maliens, le quotidien salue l’initiative de Paris, venu prêter main forte aux Maliens pour repousser la rébellion islamiste venue du Nord, qualifiant l’opération Serval, de "geste historique".

"Depuis jeudi donc, dans nos chaumières comme dans nos palais, le sauveur du Mali s’appelle François Hollande", affirme "Le Républicain". "Son engagement devient plus méritoire avec les risques plus accrus qu’encourent désormais ses compatriotes détenus dans l’intrigant entrepôt d’otages que nous avons laissé le Mali devenir", ne manque pas de rappeler l’auteur de l’éditorial Adam Thiam, en référence aux otages français détenus au Sahel. En effet, le sort de ces derniers est devenu d’autant plus incertain depuis la décision de Paris d’intervenir contre les rebelles qui tiennent le nord du Mali.

Critiques et scepticisme domine la presse arabe

Malgré l’information chargée en provenance de Syrie et les commémorations des deux ans de la révolution tunisienne, la presse arabe n’a pas manqué de commenter l’intervention de la France au Mali. Dans son ensemble, elle se montre plutôt critique.

Le quotidien saoudien al Sharq al Awsat évoque des réserves quant à l’intervention française au Mali et l’évoque comme "la guerre dont on ne peut prévoir la fin" et évoque les risques d’enlisement.
De même le journal libanais Al Akhbar affiche son scepticisme. "L’intervention française ne changera pas la donne", titre le quotidien.
Dans un éditorial daté de dimanche, le grand quotidien arabophone dresse également un parallèle avec la Syrie, où les violences font rage depuis 22 mois. Pourquoi la France intervient-elle au Mali où les islamistes avancent vers le sud depuis une dizaine de mois quand la Syrie est à feu et à sang depuis près de deux ans s’interroge le quotidien.

Abdel Bari Atouan publie un éditorial des plus sévères dans Al Qouds al Arabi, journal panarabe basé à Londres. Pour lui, l’intervention française s’inscrit dans la lignée des guerres menées par les Etats-Unis contre le terrorisme en Afghanistan et en Irak.

"Jusqu’à quand les terres arabes et musulmanes seront-elle le lieu d’intervention occidentales motivées par de faux prétextes ?", s’indigne l’éditorialiste. "Aujourd’hui la France intervient au Mali sous prétexte d’en déloger les rebelles islamistes, et bientôt interviendra-t-elle en Syrie pour la débarrasser de Front al Nousra ?"

De même, le quotidien "22 septembre" se montre très laudateur envers François Hollande, soulignant sa "ténacité et sa persévérance". "Le chef de l’État français a agi en véritable pompier" estime le journal "pour éteindre l’incendie allumé par son prédécesseur à l’Élysée, Nicolas Sarkozy, via sa calamiteuse gestion du dossier libyen et sa volonté manifeste de déstabiliser le Mali à travers l’instrumentalisation du MNLA [Mouvement National pour la liberation de l'Azawad, ndlr]", poursuit l’éditorial.

"Mieux vaut tard que jamais"

"Mieux vaut tard que jamais", titre "Le Soleil", en rappelant les "tergiversations" de la communauté internationale, depuis 10 mois que le nord du Mali est aux mains des rebelles islamistes. Dans un article du 12 janvier, le quotidien sénégalais souligne surtout que cette main forte prêtée par la France n’est en quelque sorte qu’un juste retour des choses, "la suite logique de l’intervention en Libye".

Au Burkina Faso, qui a tenté de jouer les médiateurs dans la crise malienne, on aurait aussi attendu de la France qu’elle agisse plus tôt. "Il a fallu que les rebelles franchissent le rubicon, pour que la France se décide enfin à violer le sacro-saint principe de la non ingérence dans cette crise malienne, qui était considérée jusque-là comme une affaire des seules autorités de ce pays", relève le 13 janvier un article du magasine "Fasozine".

"Un couteau à double tranchant pour François Hollande"

Dans un autre article également daté du 13 janvier, le magasine dresse un parallèle entre l’action française en Libye puis au Mali. "François Hollande a sa guerre au Mali, comme Nicolas Sarkozy a eu la sienne en Libye", résume ainsi l’auteur de l’analyse. Il estime par ailleurs que si Nicolas Sarkozy est sorti grandi en se posant en "sauveur de la Libye", l’opération au Mali pourrait se révéler "un couteau à double tranchant pour la côte de popularité de François Hollande".

Réticence de l’Algérie

Si, sur le plan officiel, l’Algérie coopère avec la France dans le cadre de l’opération Serval, l’opinion publique, comme les médias, reste critique et pour le moins sceptique quant à l’issue de l’initiative de François Hollande.

Dans un éditorial mordant du 13 janvier, le quotidien "Liberté" commence par rappeler ce qu’est le Serval, nom donné à la mission des troupes françaises, "un petit félin africain qui a la particularité d’uriner 30 fois par heure pour marquer son territoire".

Le quotidien d’Oran est sur la même ligne et s’interroge sur l’unanimité de la classe politique française derrière François Hollande. Le journal oranais ne manque pas toutefois de relever la voix dissonante de l'ancien ministre Dominique de Villepin, qui craint des difficultés notamment au vu des "réticences de l’Algérie".

L’article énumère ensuite les inquiétudes algériennes. Selon l’auteur, l’intervention française risque de provoquer en premier lieu "un drame humanitaire dans le Sahel avec un déplacement de populations sans commune mesure. Ensuite, l’action de la France va fédérer les groupes terroristes puisque les djihadistes du monde entier vont affluer vers le Mali pour donner un coup de main à leurs frères d’arme".