
Alors que les rebelles du Séléka sont aux portes de Bangui, les États-Unis ont pris des mesures pour protéger leurs ressortissants et l'ONU annonce le départ de ses employés. Paris a fait sécuriser son ambassade, prise pour cible mercredi.
Quinze jours après le début de leurs opérations armées, les rebelles du Séléka ("Alliance" en sango, la langue nationale) sont désormais aux portes de la capitale centrafricaine. "Leur progression militaire semble indiquer qu'ils ont l'intention de s'emparer de Bangui", a déclaré dans un communiqué le porte-parole de l'ONU, Martin Nesirky.
Washington et les Nations unies ont annoncé, mercredi, le départ de tous leurs employés jugés non indispensables et de leurs familles. Le retrait "temporaire" des 200 personnes travaillant pour les Nations unies en Centrafrique "est une mesure de précaution pour réduire notre présence au cas où la situation devait se détériorer à Bangui", a expliqué Martin Nesirky.
Faisant état de sa "profonde préoccupation face à la détérioration de la sécurité en Centrafrique", le département d'Etat américain a affirmé, pour sa part, travailler "avec la communauté américaine à Bangui pour faciliter le départ" de ses ressortissants. Appelant les rebelles à "cesser les hostilités et à stopper leur avancée vers la capitale", il a par ailleurs salué "l'initiative de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC)" qui va tenter d'obtenir un cessez-le-feu.
Une manifestation "particulièrement violente" contre la France
Le gouvernement centrafricain, qui avait réclamé mercredi l’aide de Paris, a déclaré "remercier la France d'avoir condamné les attaques rebelles, d'avoir pris position pour le dialogue inter centrafricain, et d'avoir proposé son appui à la concrétisation de ce dialogue."
Jeudi, François Hollande a tenu à préciser que la France n'était pas là pour "protéger un régime" mais ses ressortissants.
À Paris, le président François Hollande a expressément demandé au ministre de la Défense "de prendre toutes les dispositions pour assurer la sécurité" des quelque 1 200 Français vivant en Centrafrique.
Plus tôt dans la journée, l’ambassade française avait été prise pour cible par des manifestants en colère contre la passivité de Paris depuis le début de l’offensive armée des rebelles.
"Les heurts ont commencé vers 9 heures, témoigne l'un des Observateurs de FRANCE 24, présent dans l'ambassade. Ça a commencé par des cris et des chants, des pancartes étaient brandies. Progressivement, de plus en plus de gens ont commencé à affluer, vers 10 heures - 10h30. Ils ont commencé à lancer des pierres sur l’ambassade. Plusieurs fenêtres ont été brisées. La situation était chaotique. Des militaires centrafricains patrouillaient mais aucun n'est intervenu. Certains manifestants sont passés par-dessus la grille et ont pris le drapeau français." Des informations confirmées par l'ambassadeur de France à Bangui, Serge Mucetti, qui a qualifié la manifestation de "particulièrement violente".
Plusieurs jeunes ont également jeté des projectiles sur les locaux de la compagnie aérienne Air France qui a fait faire demi-tour à son vol hebdomadaire Paris-Bangui.
En réponse à la demande du président, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian a assuré, mercredi en fin de journée, que l’ambassade française avait été "sécurisée" par une trentaine de soldats français et que le calme aux abords des locaux était revenu.
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Au moins 2 000 déplacés
Mais après plus de quinze jours d'opérations et de conquête de villes, le conflit ne semble pas près de finir. Affirmant sa volonté de "faire entrer ses troupes" à Bangui, le Séléka a demandé "à tous les fils et filles de Centrafrique, à tous les éléments de forces de défense et de sécurité encore fidèles au régime de François Bozizé [...] de déposer les armes immédiatement".
Les renforts tchadiens qui campent aux portes de Bangui à l'appel du président centrafricain semblent être le dernier rempart contre l’avancée des insurgés. Sous-équipée, démotivée et mal organisée, l'armée régulière centrafricaine n'a, quant à elle, opposé que peu de résistance.
Au moins 2 000 Centrafricains ont fui dans le nord de la RD Congo voisine l'avancée des rebelles. En Centrafrique, les ONG s'inquiètent du sort des déplacés.
Le Centrafrique - qui compte cinq millions d'habitants - était engagé depuis plus de cinq ans dans un processus de paix après des années d'instabilité, de rébellions multiples, de mutineries militaires et de putschs. Mais les rebelles ont pris les armes le 10 décembre pour réclamer "le respect" des accords conclus depuis 2007.