Luka Rocco Magnotta, suspecté d’avoir tué et démembré un étudiant chinois à Montréal au mois de mai, a été désigné personnalité médiatique de l’année 2012 au Canada par des journalistes. Un choix qui provoque colère et indignation dans le pays.
Le dépeceur de Montréal, Luka Rocco Magnotta, a été élu personnalité médiatique 2012 au Canada. Quelque 22 % des médias qui ont pris part au sondage annuel de l’agence La Presse canadienne l’ont désigné comme la personne ayant le plus marqué l’actualité de cette année.
Un choix pour le moins polémique : l’homme, acteur porno d’une trentaine d’années, est accusé d’avoir assassiné, à la fin du mois de mai, un étudiant chinois à l’aide d’un pic à glace avant de le dépecer. Il a été arrêté une semaine plus tard à Berlin, à l’issue d’une fuite qui l’avait notamment mené en France.
Au Canada, ce vote a provoqué une avalanche de critiques indignées. "Véritablement dégoûtant", a jugé sur Twitter Bob Rae, numéro un par intérim du Parti libéral canadien. "La presse canadienne atteint son niveau le plus bas", a-t-il estimé. "De nombreuses personnes avaient eu plus d’impact et généré plus de couverture médiatique", a-t-il ajouté.
Le député conservateur Jay Aspin a pour sa part demandé à La Presse canadienne de faire preuve de "décence" en rendant un "meilleur jugement".
Une déclaration qui fait écho à celle de l’humoriste Stéphane Laporte sur Twitter : "C'est assez la fascination avec les tueurs dérangés. La PC [La Presse canadienne, ndlr] doit se rétracter et changer son choix par respect pour les Canadiens". Une pétition en ligne exigeant l’organisation d’un nouveau votre a d’ailleurs été lancée. Mercredi, elle avait recueilli près de 550 signatures.
"Ce n’est pas un concours de personnalité"
La controverse est telle que Scott White, le rédacteur en chef de La Presse canadienne, s’est vu obligé de préciser que le titre de personnalité médiatique de l’année - "Newsmaker of the Year" - n'était "pas un concours de popularité". "Ce sont les journalistes du Canada, ceux qui choisissent ce qui se retrouve à la une et qui élaborent les bulletins de nouvelles, qui déterminent quel Canadien a eu le plus d'impact dans l'actualité pendant l'année", a-t-il expliqué. Aucun média québécois n’a voté pour Magnotta, bien que le crime se soit déroulé à Montréal, a-t-il précisé.
D’après ses proches, le criminel présumé a toujours voulu connaître la célébrité. Il avait, dans ce but, concouru à une émission de téléréalité, tenté sa chance dans le mannequinat, posté nombre de vidéos sur YouTube où, notamment, il se montrait en train de tuer des chatons et faisait l’apologie du cannibalisme... En vain. Jusqu’au meurtre particulièrement sordide de l’étudiant chinois – il avait envoyé des parties du corps de sa victime aux partis conservateur et libéral et abandonné le tronc dans une valise – qui lui avait valu la une de nombreux journaux à travers le monde.
Selon ses proches, son titre de "personnalité médiatique 2012" serait pour lui une consécration. "De toute évidence, c'était ce qu'il recherchait, n'est-ce pas ?", a témoigné l’un de ses amis, qui s'est entretenu avec La Presse canadienne sous le sceau de l’anonymat. Aujourd’hui, Luka Rocco Magnotta est emprisonné à Montréal. Il a plaidé non-coupable des cinq chefs d’inculpation qui pèsent contre lui. Il devrait être jugé en mars 2013.