![La Cour des comptes ouvre la voie à des poursuites contre Sciences Po La Cour des comptes ouvre la voie à des poursuites contre Sciences Po](/data/posts/2022/07/17/1658077526_La-Cour-des-comptes-ouvre-la-voie-a-des-poursuites-contre-Sciences-Po.jpg)
La Cour de discipline budgétaire et financière a été saisie par la Cour des comptes en raison des irrégularités constatées dans la gestion de Sciences Po sous la présidence du défunt Richard Descoings.
La Cour des comptes, relevant "des irrégularités récurrentes dans la gestion" de Sciences Po entre 2005 et 2010, sous la direction de Richard Descoings, a décidé jeudi de "saisir la Cour de discipline budgétaire et financière" (CDBF), qui peut prononcer des amendes.
Dans son rapport rendu public jeudi, la Cour ne met en cause aucun dirigeant de l'école nommément. Mais elle pointe des irrégularités dans la gestion des enseignants, sous la responsabilité de quatre directions, dont celle des études et de la scolarité, dirigée depuis 2008 par Hervé Crès.
Or Hervé Crès a été désigné par les conseils de Sciences Po pour succéder à Richard Descoings qui a dirigé la prestigieuse école de 1996 à son décès en 2012. Sa nomination est suspendue au feu vert de François Hollande et de la ministre de l'Enseignement supérieur, Geneviève Fioraso, qui attendaient la publication du rapport avant d'avaliser ou non sa désignation.
Dans ses réponses à la Cour, Sciences Po objecte que la gestion des enseignants-chercheurs relève de "la direction de l'information scientifique".
La CDBF est une juridiction administrative spécialisée associée à la Cour des comptes. Elle peut prononcer des amendes et ses décisions sont puliées au Journal officiel.
Avec cette saisine, Hervé Crès se trouve fragilisé, l'exécutif pouvant refuser d'avaliser sa nomination comme directeur de Sciences Po au vu des risques de poursuites contre lui et d'autres dirigeants, ce qui relancerait le processus de succession, près de huit mois après le décès brutal de Richard Descoings à New York.
"Le contrôle de la Cour" a mis en lumière des "défaillances nombreuses dans la gestion financière et matérielle de l'établissement", souligne le rapport, qui avait largement fuité.
La Cour épingle des "irrégularités multiples et récurrentes dans la gestion du service des enseignants-chercheurs", payés entièrement sans assurer nécessairement toutes leurs heures, des emprunts toxiques dans le cadre de la stratégie immobilière, ou la "faiblesse des contrôles internes et externes", citant "l'utilisation abusive de cartes bancaires".
Salaire de 537 347 euros
Elle pointe un système de rémunération du directeur de Sciences Po extrêmement coûteux et sans transparence - le salaire de Richard Descoings avait culminé à 537.247 euros en 2010 - et une rémunération opaque des cadres dirigeants qui doit être réformée.
Elle cite aussi le financement par Sciences Po de la mission Lycée, confiée en 2009 par l'Elysée à Richard Descoings, sans qu'elle ait été approuvée par le Conseil d'administration de la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP).
Certaines "défaillances" sont conjoncturelles, d'autres "sont structurelles" et ont été "permises par l'ambiguïté juridique qui caractérise le statut actuel de Sciences Po", estime le rapport.
Dans ses réponses, Sciences Po insiste sur la légitimité de son double statut, privé (FNSP) et public (IEP).
"Sciences Po a reconnu certaines des irrégularités constatées et s'est engagée à y mettre fin", indique la Cour. "Cette mise en conformité et la remise en ordre de la gestion doivent toutefois s'accompagner d'une clarification des règles applicables à la FNSP", ajoute le rapport.
A 11H00, les présidents des deux instances de Sciences Po, Jean-Claude Casanova et Michel Pébereau, seront auditionnés à l'Assemblée nationale sur le rapport et sur le processus de désignation du directeur.
Vingt-quatre candidats s'étaient déclarés pour succéder à Richard Descoings, dont quatre ont été auditionnés: outre Hervé Crès, le politologue Dominique Reynié, le diplomate Gilles Andreani et l'ancien recteur Jean-Michel Blanquer, dont le remplacement à la tête de la Direction générale de l'enseignement scolaire (Dgesco) au ministère de l'Education a été annoncé mercredi, relançant les spéculations.