
Le Sénat a approuvé dans la nuit de jeudi à vendredi la création d'une "retenue" pouvant aller jusqu'à 16 heures pour remplacer la garde à vue des sans-papiers.Une mesure souhaitée par le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls.
Les sans-papiers ne pourront plus être maintenus en garde-à-vue. Le Sénat a approuvé dans la nuit de jeudi à vendredi la création d’une "retenue" pouvant aller jusqu’à 16 heures pour remplacer la garde à vue des sans-papiers, devenue illégale. Une mesure voulue par le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, qui estime qu’il sera possible de gérer avec "efficacité" les expulsions.
Adoptée en procédure accélérée (une lecture par chambre), elle doit encore être votée par l'Assemblée nationale. "Une retenue d'une durée maximale de 16 heures, sous le contrôle continu de l'autorité judiciaire ", permettra " de mener les vérifications nécessaires ", a-t-il souligné. " Cette retenue est bien évidemment assortie de garanties pour la personne interpellée " , a-t-il ajouté.
Le texte supprime par ailleurs le "délit de solidarité" qui conduisait à poursuivre des personnes, physiques ou morales, ayant porté assistance à des étrangers en situation irrégulière.
Le PS doit sa majorité au vote du RDSE (Rassemblement démocratique et social européen) ainsi qu’au soutien de l'UMP et des centristes. "Nous voterons ce texte à la fois parce qu'il est nécessaire mais aussi parce qu'il correspond à ce qu'il faut faire pour que l'État de droit soit respecté par tous", a déclaré pour la droite Jean-Jacques Hyest (UMP).
Les écologistes, en revanche, se sont abstenus, trouvant insuffisantes les garanties apportées aux sans-papiers, et le groupe communiste républicain et citoyen a voté contre . "Nous attendions bien plus qu'un projet minimaliste (..) oubliant de garantir les droits essentiels des personnes en position irrégulière", a dit pour le groupe Laurence Cohen.
Garde à vue interdite depuis juillet
En supprimant la garde à vue, la France s’est mise en conformité avec la jurisprudence européenne. En 2008, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) estimait, en effet, que le séjour irrégulier d’un étranger ne justifiait pas une peine d’emprisonnement. En 2011, elle faisait passer l’arrêt El-Dridi - du nom d’un Algérien condamné à un an de prison en Italie pour avoir refusé de quitter le territoire. La France était pourtant restée dans un flou juridique, faisant malgré tout perdurer les gardes à vue d’étrangers. Le séjour irrégulier était même l'un des premiers motifs de garde à vue et 60 000 personnes ont été concernées en 2010.
Tirant ses conclusions de la jurisprudence européenne, la Cour de cassation avait interdit en juillet le recours à la garde à vue pour vérifier la régularité du séjour des étrangers. Depuis, les forces de l'ordre ne pouvaient plus retenir les sans-papiers plus de quatre heures, délai maximal prévu par la procédure de vérification d'identité.
Ce délai a amené le gouvernement à proposer la création d'un nouveau cadre juridique prévoyant "une retenue d'une durée maximale de 16 heures, sous le contrôle continu de l'autorité judiciaire, afin de mener les vérifications nécessaires", a souligné M. Valls. "Cette retenue est bien évidemment assortie de garanties pour la personne interpellée", a-t-il souligné.
Le ministre de l’Intérieur a aussi assuré qu'"il n'y aura pas de régularisation massive comme en 1981 ou 1997". Il a jugé nécessaire de mener une réflexion quant au droit au séjour "pour les étrangers malades, les plus vulnérables". Enfin, il a annoncé qu'il nommerait "très prochainement" un parlementaire en mission "en matière de droit des étrangers", qui engloberait également les questions pratiques" comme celles liées à l'accueil en préfecture et aux délais".