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envoyés spéciaux en Floride – Pour les deux candidats à la Maison Blanche, remporter la Virginie peut s'avérer décisif. Les envoyés spéciaux de FRANCE 24, Julien Peyron et Jon Frosch, sont allés à la rencontre des électeurs de cet État clé.

Anna Tush
"Personne ne devrait décider à la place de la fille d'à côté si elle peut se faire avorter"

Anna et son mari Andrew ont tout du couple américain modèle. Une petite maison cossue, un joli petit garçon et une bonne situation. Sans faire partie des classes aisées, ils peuvent se permettre de vivre dans une banlieue huppée de Washington, à Arlington, en Virginie.

"Nous écoutons la radio NPR, nous regardons PBS (des médias publics aux audiences confidentielles, NDLR), on est complètement des bobos de gauche", s'amuse Anna.

Elle a soutenu Obama en 2008 et s'apprête à revoter pour le démocrate le 6 novembre. "Je suis psychologue dans une école publique et, quand les républicains sont au pouvoir, ils nous coupent aussitôt les fonds".

Les questions sociales représentent une priorité pour elle qui est enceinte d'un deuxième enfant. Elle voudrait que les "hommes âgés républicains" arrêtent de prendre des décisions pour les femmes. "Laissons les gens choisir leur vie. Personne ne devrait décider à la place de la fille d'à côté si elle peut se faire avorter."

Elle trouve également que la réforme de santé d'Obama est une bonne chose, même si elle regrette qu'il n'ait pas été plus préparé aux attaques de républicains, qui ont longtemps tenté de bloquer la loi au Congrès.

"Obama a fait du bon boulot. Aurait-il pu faire mieux ? Probablement. Mais il aura encore mon vote cette fois-ci."

Cherise Drummond
"Grâce à Obama, j'ai une assurance santé et des allocations pour mon fils"

Cherise Drummond est serveuse dans un "diner" typique américain, le long d'une autoroute dans la banlieue de Charlottesville, en Virginie. À 23 ans, elle y travaille à temps plein, car elle doit élever seule son enfant de 3 ans.

Comme en 2008, elle va voter pour Barack Obama, principalement parce qu'elle a peur que Mitt Romney prive les plus pauvres de toute aide gouvernementale. "Je suis payée au salaire minimum et j'ai besoin de ces programmes", explique-t-elle. "Grâce à Obama, j'ai une assurance santé (Medicaid) et des allocations pour mon fils, sous forme de bons alimentaires (food stamps)".

Son enfant, c'est ce qu'elle a de plus précieux. Elle a d'ailleurs fait tatouer son surnom - "Petit Meme" (Lil' Meme) - sur son bras droit. Elle voudrait que tous les deux puissent refaire leur vie, avoir une plus belle maison, un meilleur travail, "le plus loin possible de la Virginie".

Pour cela, Cherise s'est inscrite à des cours sur Internet. Elle espère qu'elle va pouvoir faire du droit pour devenir avocate.

Le 6 novembre, toute sa famille et ses amis vont voter pour le président sortant, mais elle sait qu'ils ne sont pas représentatifs de l'État tout entier. "Cela va être très serré ici, on voit des publicités partout dans les rues, à la télévision…"

Chris Stefanucci
"Le problème avec Obama, c'est qu'il veut réduire la taille de notre armée"

Chris Stefanucci mène une vie paisible avec sa femme et sa fille à Williamsburg, une petite ville du sud-est de la Virginie. Mais ce jeune homme de 29 ans a autrefois connu une existence autrement plus agitée : il a passé plusieurs années au sein de l'armée américaine en Irak et en Afghanistan.

Il est désormais ingénieur dans le civil, tout en gardant une sensibilité particulière pour les questions militaires. "Obama a bien fait de décider le retrait d'Afghanistan", juge-t-il. "On aurait pu rester là bas encore des années sans arriver à pacifier un pays que ni Alexandre le Grand ni les Russes ne sont parvenus à envahir".

Il votera toutefois pour Mitt Romney à la présidentielle car il est convaincu que les républicains soutiennent davantage l'armée que les démocrates. "Le problème avec Obama, c'est qu'il veut réduire la taille de notre armée, explique-t-il. On a beau avoir toute l'avance technologique du monde, pour faire la guerre, il faut toujours un mec sur le terrain avec un fusil."

Le retour à la vie civile a pourtant été difficile pour lui : il a souffert de dépression pendant un an. "Et encore, j'ai de la chance car j'étais pilote d'hélicoptère et donc souvent dans les airs. Ceux qui étaient sur le terrain ne s'en remettent jamais vraiment."

Clevester Logan
"Romney n'est qu'un pantin"

Clevester Logan est un enfant de Charlottesville, une jolie ville étudiante qui abrite la grande université de Virginie, UVA. "Je suis né et j'ai passé presque toute ma vie ici", lance-t-il fièrement. "Autrefois le coin était clairement républicain mais, depuis 2008, on voit beaucoup de panneaux et d'autocollants pour Obama."

Un engouement pour le Parti démocrate dont se félicite cet animateur radio, lui qui continue de soutenir le président sortant et sa politique. "Cela n'a pas été facile ces quatre dernières années, mais il a fait des choses bien alors que les républicains ont tout fait pour faire obstruction à ses réformes."

Pour lui et sa famille nombreuse, il souhaite qu'Obama soit reconduit pour quatre ans afin que celui-ci relance pour de bon l'économie, tout en réduisant la dette "immense" du pays.

Surtout, il ne veut pas voir Mitt Romney s'installer à la Maison Blanche."Cet homme n'est qu'un pantin, on ne sait toujours pas ce qu'il pense, il a changé tellement de fois d'avis sur tout un tas de sujets."

À la rigueur, il préfère l'ancien président George W. Bush à l'actuel candidat républicain. "Lui aussi a dit beaucoup de choses idiotes, mais au moins il les pensait. Ce n'était pas qu'un poseur."

Michael Haltingan
"J'ai encore deux jours pour convaincre ma femme de voter Romney"

Chez les Haltingan, on est partagé. Si le mari, Michael, est sûr de voter pour Romney le 6 novembre, sa femme Robyn est toujours indécise. "Le président sortant n'a pas fait que de mauvaises choses, même si je n'aime pas sa réforme du système de santé. On ne peut pas obliger les gens à contracter une assurance maladie", explique cette infirmière de 49 ans.

Ainsi, elle qui avait voté pour Obama en 2008 n'exclut pas, aujourd'hui, de voter républicain. Il faut dire que son mari la pousse dans ce sens. "Moi aussi j'avais voté pour le candidat du 'changement' il y a quatre ans, mais il n'est jamais arrivé", argumente-t-il.

C'est à un autre changement qu'il aspire aujourd'hui. "Regardez le déficit, regardez le niveau de la dette. Je ne veux pas laisser cette situation à ma fille, explique-t-il. Les gens nous demandent aujourd'hui d'être patients, d'accorder quatre ans de plus à Obama, mais moi si je le pouvais, je le renverrais dès demain."

Sa femme trouve cependant que les positions conservatrices de Romney sur l'avortement et les droits des femmes sont rétrogrades. "Je vais peut-être quand même voter Obama", glisse-t-elle alors. Ce à quoi son mari répond : "Il me reste encore quelques heures pour te convaincre".