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Hollande et Netanyahou rendent hommage aux victimes de Mohamed Merah

, envoyée spéciale à Toulouse – À Toulouse, le président français et le Premier ministre israélien ont rendu hommage, ce jeudi, aux victimes de la tuerie de l'école juive Ozar Hatorah. Reportage dans la Ville rose, sept mois après le drame.

À Toulouse, le quartier résidentiel de Bonnefoy a vécu, ce jeudi 1er novembre, au rythme de la visite de François Hollande et de Benjamin Netanyahou.

Il est un peu moins de 14 heures lorsque le président français et le Premier ministre israélien font leur apparition à l’école Ozar Hatorah, rebaptisée depuis septembre Ohr Torah. Les conditions de sécurité sont drastiques, les forces de l’ordre israéliennes présentes sur place, aux côtés de leurs homologues françaises, sont intransigeantes. Le programme de la journée est minuté et l’organisation millimétrée. Fouille, inspection des effets personnels… Il faut patienter de longues minutes avant d’accéder à l’enceinte de l’établissement. "Les autorités israéliennes ne tolèreront aucun écart. Vous devez absolument respecter les sièges qui vous ont été attribués", annonce d’emblée à l’auditoire un responsable de la sécurité. Après 1h30 d’attente dans le gymnase, élèves de l’école et membres de la communauté juive accueillent chaleureusement le président français et le Premier ministre israélien, acclamé par des "Bibi ! Bibi !".

Symbole de la "souffrance inconsolable" et de l’"espérance inaltérable"

Le premier à prendre la parole est Yaacov Monsonégo, le directeur de l’école, dont la fille, Myriam, huit ans, a été l’une des victimes de Mohamed Merah, le 19 mars 2012. "Ce lundi noir, j’ai lâché la main de ma petite Myriam et, deux minutes plus tard, elle était abattue de sang froid", se souvient-il, la voix teintée de sanglots. Toutes aussi poignantes, les interventions suivantes des différents membres des familles des victimes ont profondément marqué l’auditoire.

Puis, François Hollande s’est exprimé à son tour pendant quelques minutes. "Les juifs de France doivent savoir que la République met tout en œuvre pour les protéger", a-t-il déclaré, rappelant qu’un projet de loi visant à étendre les moyens d’action contre le terrorisme venait d’être déposé. "En ce 1er novembre (…), l’école Ohr Torah représente un symbole : celui de la souffrance inconsolable, mais aussi celui de l’espérance inaltérable. La France s’en montrera digne", a-t-il également affirmé avant de laisser la parole à Benjamin Netanyahou.

Exprimant toute sa compassion et sa solidarité envers les familles des victimes, c’est avec quelques mots de français que le Premier ministre israélien a commencé son discours. À plusieurs reprises durant son allocution, il a salué l’attitude de François Hollande. "Dans les jours sombres du nazisme et des pogroms qui l'ont précédé, la plupart des gouvernements européens n’ont pas levé le petit doigt pour lutter contre l’antisémitisme meurtrier. Certains ont même coopéré. Mais, aujourd’hui, je suis rejoint par un président français qui dénonce avec fermeté l’antisémitisme." Par la suite, son discours s’est quelque peu politisé. "Aujourd’hui, le peuple juif a son État, le peuple juif a son armée et le peuple juif a les moyens de se défendre contre ceux qui veulent nous rayer de la carte", a-t-il ainsi déclaré sur un ton combatif.

La cérémonie s’est achevée sur une note solennelle, lorsque Benjamin Netanyahou, sur scène aux côtés des représentants du culte juif, a entonné "Am Yisrael Hai" ("Israël est vivant", NDLR). Puis, les hymnes israéliens et français ont retenti, nourris d’intenses applaudissements.

"Je suis fière de la France, fière d’Israël"

À la sortie du gymnase, l’émotion est palpable. Drapeaux français et israéliens à la main, familles et amis restent entre eux et se relatent les moments forts des discours prononcés tout en se dirigeant vers la sortie. Certains scrutent le cortège des véhicules en partance, espérant apercevoir une dernière fois Benjamin Netanyahou dans son véhicule aux vitres teintées. "Je n’arrive pas à croire que c’était bien lui, face à nous", dit un jeune homme à ses amis, "impressionné par le charisme" du Premier ministre israélien. "C’était une cérémonie magnifique. Je suis fière de la France, fière d’Israël, fière des deux présidents", déclare la mère d’une élève de l’école. "C’était une cérémonie très juste. Les mots me manquent", renchérit un ancien élève avant de s’interrompre, encore sous le coup de l’émotion. "Aujourd’hui, c’est comme si je venais de revivre ce 19 mars. C’était dur. Mais je suis heureuse de voir des sourires dans cette école", raconte un autre parent d’élève.

Nicole Yardeni, présidente de la branche Midi-Pyrénées du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), estime que "cette journée est allée bien au-delà des espérances" et parle même d’un "événement historique". Et d’ajouter : "Outre la présence symbolique des plus hautes instances des deux États, ce que j’ai surtout retenu, ce sont les témoignages des familles au début de la cérémonie. C’était absolument impressionnant".

Au-delà d’un discours purement politique, il était important, selon elle, que le président transmette des valeurs. "Il a rappelé avec force que le malheur de la banlieue n’est pas causé par les juifs et le malheur du monde n’est pas causé par Israël." Plus de sept mois après le drame, elle dit constater un certain changement d’état d’esprit vis-à-vis de la communauté juive. "Depuis ce 19 mars, on ressent, enfin, une compréhension progressive des choses telles que nous les voyons depuis des décennies", affirme-t-elle, convaincue que l’image du président français et du Premier ministre israélien côte à côte restera gravée dans les mémoires.