Le Parlement européen a décerné son prix Sakharov "pour la liberté de l'esprit" au cinéaste iranien Jafar Panahi et à sa compatriote l'avocate Nasrin Sotoudeh, tous deux activistes condamnés à de lourdes peines dans leur pays.
Le prix Andreï Sakharov "pour la liberté de l'esprit" du Parlement européen a été décerné vendredi 26 octobre à Strasbourg aux Iraniens Nasrin Sotoudeh, avocate spécialisée dans les droits de l'Homme, et au réalisateur Jafar Panahi, tous deux condamnés à de lourdes peines dans leur pays.
"Nous voulons par là exprimer notre admiration pour une femme et un homme qui résistent à l'intimidation dont sont victimes les Iraniens", a expliqué le président du Parlement, Martin Schulz. Selon lui, l'attribution de ce prix doit être interprétée comme un "non très clair au régime iranien" qui "ne respecte aucune des libertés fondamentales".
La répercussion de ce prix en Iran, qui compte des centaines de prisonniers politiques mais également des dizaines d’avocats et d’artistes dans les geôles du régime, peut néanmoins être à double tranchant. "Dans la société iranienne, les gens auront l’impression que le monde extérieur est avec eux, explique sur l'antenne de FRANCE 24 Farhad Khosrokhavar, chercheur à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris. Mais il se pourrait que le régime monte en épingle ce qu’il considère comme un complot international et qu’il se serve de ces cas pour réprimer encore plus l’opposition."
Jafar Panahi, réalisateur insoumis
Figure de proue de la Nouvelle vague iranienne, l’auteur du "Cercle" et de "Sang et Or" Jafar Panahi, 52 ans, est connu pour ses satires sociales grinçantes. Accusé de propagande contre le régime, il a été condamné en décembre 2010 à six ans d’assignation à résidence ainsi qu’à vingt années d’interdiction de voyager et d’exercer son métier. Invité à faire partie du jury officiel à Cannes la même année, il avait été retenu par les autorités iraniennes. Une chaise vide à son nom avait alors été installée symboliquement à côté du jury tout au long du festival.
Nasrin Sotoudeh, 49 ans, est, elle, une avocate qui a défendu de nombreux opposants au régime iranien. À la suite du mouvement de contestation des élections de juin 2009, elle a défendu des activistes et des hommes politiques de l'opposition, ainsi que des prisonniers condamnés à la peine de mort pour des crimes commis lorsqu'ils étaient mineurs.