Martine Aubry est convoquée en tant qu'ex-directrice des relations du travail au ministère du Travail de 1984 à 1987 par un juge d'instruction s'intéressant à l'action des pouvoirs publics face à l'amiante dans les années 1970-1980.
L'ex-Première secrétaire du Parti socialiste sera prochainement convoquée par un juge d'instruction parisien pour une possible mise en examen dans le cadre d'une enquête sur les dégâts provoqués par l'amiante, a-t-on appris lundi de source proche de l'enquête, confirmant une information de M6.
La juge d'instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy s'intéresse à l'action des pouvoirs publics face à l'amiante dans les années 70-80. À cette époque, plus précisément entre 1984 et 1987, Martine Aubry était directrice des relations du travail au ministère du Travail.
Selon l'entourage de l'ex-Première secrétaire du PS, Martine Aubry apportera "tout son concours à l'enquête judiciaire" précisant qu'elle souhaite "éviter qu'une telle tragédie [les dégâts provoqués par l'amiante, ndlr] ne se reproduise à l'avenir." Et d'ajouter : "Elle expliquera comment l'administration des relations du travail qu'elle dirigeait alors, n'a eu de cesse de renforcer la protection des travailleurs de l'amiante".
Des dizaines de hauts fonctionnaires, dont Martine Aubry, ont déjà été entendus comme témoins depuis 2009 à ce sujet.
L'État et sa "gestion défaillante de l'amiante"
Le caractère cancérogène de l'amiante est connu depuis les années 50, mais le premier décret réglementant son usage ne date que de 1977 et son interdiction de 1997. En 2005, un rapport sénatorial avait accablé l'État pour sa "gestion défaillante" de l'amiante.
Utilisée massivement en particulier dans le secteur de la construction, l'amiante est jugée responsable de 10 à 20 % des cancers du poumon et pourrait provoquer 100 000 décès d'ici à 2025, selon les autorités sanitaires.
"Comme tous ceux qui travaillaient avec moi, j'avais la conviction que le décret de 1977 puis celui de 1987 nous permettaient de protéger efficacement la santé des salariés", avait dit Mme Aubry lors de son audition en 2009.
L'étude Peto
"Aucune alerte n'est venue de la CNAM, du ministère de la Santé, d'autres acteurs ou des chercheurs pour nous dire que ce n'était pas le cas", dit-elle encore. "La nécessité d'interdire l'amiante est intervenue avec l'étude Peto", du nom du scientifique britannique ayant mis en évidence en 1994 un risque de pathologies après des expositions de petite durée à l'amiante, a-t-elle ajouté.
Parallèlement, plusieurs membres du comité permanent amiante (CPA) - considéré par les victimes comme une structure de lobbying des industriels du secteur et qui a fonctionné de 1982 à 1995 - ont été récemment mis en examen pour homicides et blessures involontaires. Dans son enquête, la juge cherche à savoir si le CPA a eu une influence déterminante sur le retard pris dans l'interdiction de l'amiante. "Avec le CPA, on est au cœur de la responsabilité de la catastrophe de l'amiante", estimait récemment François Desriaux, vice-président de l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva).
Martine Aubry, dit, elle, n'avoir rien à se reprocher. "Je ne connaissais pas l'existence du CPA ni à mon arrivée en 1984 ni à mon départ en 1987", a-t-elle affirmé aux enquêteurs.
(FRANCE 24 avec dépêches)