À une semaine du scrutin présidentiel, le candidat vénézuelien Henrique Capriles, à la tête d’une coalition de partis d’opposition, talonne Hugo Chavez dans les sondages. Une remontée significative qui inquiète le président sortant.
"Chavez, mon ami, il ne te reste plus qu’une semaine". Les partisans de Henrique Capriles Radonski, le candidat de l’opposition qui défie Hugo Chavez à la magistrature suprême, veulent y croire. Dimanche, "sous un soleil de plomb et dans une ambiance de kermesse", ils étaient des milliers "confiants comme jamais" à investir le centre de Caracas, pour un ultime meeting géant, décrit Pierre-Philippe Berson, le correspondant de RFI à Caracas. "Ce fut une démonstration de force qui a gonflé l’optimisme des anti-Chavez" à une semaine du scrutin, ajoute-t-il.
Ragaillardi par certains sondages qui le donnent au coude à coude avec le président sortant, Capriles, le candidat de la Table de l'unité démocratique (MUD - Mesa de la unidad democratica), une coalition qui regroupe une trentaine de partis d'opposition – de droite comme de gauche -, a adopté une posture quasi victorieuse à la tribune. "Je crois que c’est sans aucun doute la plus grande concentration de personnes dans l'histoire de Caracas", a déclaré, légèrement vantard, celui affectueusement surnommé "el Majunche" ("le médiocre") par son adversaire. "Nous devons vaincre Goliath et chacun de vous est un David […]", a-t-il également lancé à la foule, avant de dresser un bilan au vitriol des treize années de pouvoir de Chavez.
"Le cheval fougueux" n’est plus ce qu’il était
Âgé de 40 ans, Capriles, cet avocat de formation issu d'une famille bourgeoise de Caracas et ancien gouverneur du riche État de Miranda, encore inconnu il y a quelques mois, est devenu un adversaire coriace pour Chavez. Ce dernier – qui n’a jamais caché ses positions pro-palestiniennes - ne se prive d’ailleurs pas de lancer de lourdes attaques contre son adversaire, petit-fils de déportés juifs polonais, en le traitant par exemple de "porc" ou de "moins que rien". Sur le front politique, Hugo Chavez n'hésite pas non plus à présenter son rival comme un néolibéral, dont le programme comprend des privatisations massives et une forte diminution des programmes sociaux. Des accusations dont se défend Capriles, qui préfère se présenter comme le partisan d’un modèle de centre-gauche à la brésilienne, où l’État et le privé travailleraient main dans la main.
Au-delà du discours politique, Capriles a su mettre au point une campagne de médiatisation - et de séduction - bien huilée pour conquérir un électorat déçu par le "chavisme". Reprenant la stratégie de campagne de 1999 du président sortant, le candidat de l’opposition a usé et abusé du "porte à porte" et multiplié les déplacements dans les bidonvilles pour convaincre les plus démunis, une base électorale souvent acquise au Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV, au pouvoir). À l’instar du président sortant, il a axé ses discours sur l’emploi, la santé et l’éducation. Et, comme Chavez, Capriles s’est posé tout au long de sa campagne en "héros national", seul homme politique capable de diriger le pays.
"C’est un communicant qui n’a rien à envier à Hugo Chavez. Il sait très bien utiliser les médias pour montrer une certaine proximité avec le peuple", analysait en juin dernier François-Xavier Freland, auteur de "Qui veut la peau d'Hugo Chavez ?"
Une différence de taille sépare toutefois les deux candidats : leur condition physique. Capriles n’a cessé de cultiver son air de jeune cadre dynamique à l’allure sportive à l’opposé d’un Chavez fragilisé par un cancer. Il est vrai que le président sortant, habituellement omniprésent, s’est fait plus discret durant cette campagne. Après deux opérations en un an pour vaincre sa maladie, il a avoué lui-même ne plus être "le cheval fougueux" qui était capable de parler des heures durant et se faisait fort de répondre en personne à toutes les sollicitations.
L’écart des intentions de vote se resserre
Résultat de l’activisme du challenger, certains sondages, qui donnaient il y a quelques semaines encore Chavez grand favori, s’emballent aujourd’hui en faveur de Capriles. Si l’institut Datanalisis accordait, mardi 25 septembre, 49 % des intentions de vote à Hugo Chavez et 39 % à son opposant - qui a gagné dix points par rapport au mois de mai -, d’autres instituts ne parviennent pas à départager les deux candidats. La proportion des indécis, déterminante pour l’issue du scrutin, aurait aussi considérablement diminué depuis le mois de mai en faveur de Capriles. Ils étaient 21,5 % à cette époque et n’étaient plus que 11,6 % au mois de septembre, a estimé le président de l’Institut d'études politiques Datanalisis, Luis Vicente Leon.
"Toutes les grandes enquêtes montrent une réduction de l’écart et une augmentation significative des intentions de vote pour le candidat de l'opposition […] Désormais tous les scénarios sont ouverts", soulignait ce dernier le 30 septembre. Hugo Chavez, qui n'a perdu aucun scrutin national depuis 1999 - à l'exception d'un référendum en 2008, finalement remporté l'année suivante - sera-t-il détrôné ? Réponse le 7 octobre.