
Un an après les émeutes à Lhassa, la Chine a conseillé aux pays occidentaux de ne pas se mêler des affaires relatives au Tibet. La province et les quartiers tibétains ont été placés sous haute surveillance.
Contrôles de police renforcés, policiers en armes autour du quartier tibétain… Chengdu vit une situation d’état de siège pour le premier anniversaire des émeutes de Lhassa.
Tous les étrangers doivent montrer patte blanche. Quant aux contrôles de passeport, ils s’étendent aux aéroports, aux hôtels, aux bars ainsi qu’aux restaurants. La capitale, traditionnellement calme, du Sichuan retient son souffle pour qu’aucune manifestation ne vienne perturber ce jour du 14 mars.
L’an dernier, une marche de moines tibétains avait dégénéré en affrontements au Tibet, mais aussi dans les provinces limitrophes où vit une importante communauté issue de la minorité tibétaine. Officiellement, 19 personnes avaient été tuées dans les violences. Des groupes d'exilés tibétains avancent, pour leur part, qu’au moins 200 personnes ont trouvé la mort à la suite de la répression chinoise.
Cette année, pour éviter de revivre une page aussi sombre, des milliers de soldats et de militaires ont été déployés dans la province.
“Je n’ai jamais connu une telle situation, explique un expatrié suisse habitant en Chine depuis huit ans. La police m’a demandé de ne pas sortir le soir, et ce jusqu’à dimanche. Ils m’ont dit que c’est dangereux.” De sources diplomatiques, nous avons également appris que toutes ces mesures exceptionnelles pourraient durer jusqu’au mois de juin - c’est-à-dire après le vingtième anniversaire du massacre de Tiananmen, le 4 juin 1989.
Il s’agit donc d’une année à hauts risques pour la Chine, qui a annoncé cette semaine une augmentation de 32 % du budget alloué à la sécurité publique.
Officiellement pourtant, Pékin continue de marteler que la situation est calme au Tibet et que les étrangers sont libres de se rendre dans toutes les provinces chinoises – à l’exception notable, cependant, du… Tibet.
Mais la réalité est tout autre. En effet, on nous notifie à plusieurs reprises l’interdiction de circuler en zone tibétaine. Même le quartier tibétain de Chengdu, où sont installés beaucoup de restaurants et de commerces, nous est interdit.
Climat de paranoïa
Les rideaux de fer sont tirés, dès la nuit tombée. Les gens ont peur de nous parler. Beaucoup ont subi des pressions pour ne pas nous rencontrer. Un journaliste local, qui avait accepté de nous guider dans la région, a été convoqué par la police et explicitement menacé. C’est un véritable climat de peur et de paranoïa qui s’instaure.
“Ici les règles sont différentes, nous raconte un étranger installé à Chengdu. La police a tous les droits, elle peut vous suivre, mettre votre téléphone sur écoute ou lire vos emails.”
A l’hôtel où nous résidons, le directeur nous confirme que trois policiers en civil se trouvent en permanence dans l’établissement et que les cameras de sécurité sont contrôlées par la police locale. “C’est très mauvais pour le tourisme”, témoigne-t-il. L’année dernière, il y a eu ce terrible tremblement de terre et, aujourd’hui, les tensions autour du Tibet font fuir les touristes. Sans compter les restrictions de circulation.” La ville de Chengdu ne fait pas exception. Toute la province du Sichuan et celles du Gansu et du Qinghai sont concernées par ces mesures.
Au total, un quart du territoire chinois a été placé en état d’alerte.