Selon une société américaine de veille des réseaux, une seule société gère aujourd'hui la quasi totalité du trafic internet qui entre et sort de Syrie : l'hongkongaise PCCW. Les occidentaux ont, eux, déserté le terrain...
Si les Syriens - loyalistes ou non - continuent à pouvoir se connecter à Internet malgré le violent conflit armée qui agite le pays, c’est grâce à la Chine, pourtant peu connue pour ses prises de position en faveur d’un accès libre aux autoroutes de l’information.
Certes, ce dernier cyberlien avec le monde extérieur est maintenu par PCCW, une société basée à Hong Kong, une région historiquement et administrativement plus ouverte au monde que le reste du pays. Il n’en demeure pas moins que tous les autres États occidentaux, plus attachés à un accès libre au réseau, ont déserté la place.
Ce constat a été établi mardi 20 août par la société américaine de veille du trafic internet Renesys. “PCCW assure actuellement l’écrasante majorité du trafic internet qui sort de Syrie”, souligne Doug Madory, un ingénieur réseau sur le blog de Renesys.
En fait, la société hongkongaise est responsable de 75 % de ce trafic, selon des recherches supplémentaires menées par le site américain Ars Technica. Le reste revient au géant allemand Deutsche Telekom et à l’indien Tata.
Censure et surveillance
Cette sino-dépendance du Web syrien est, en fait, récente. Jusqu’à la mi-août, plusieurs acteurs, essentiellement turc et italien, se partageaient le marché. “Ces dernières semaines, il y a eu plusieurs pannes importantes de l’Internet en Syrie et, depuis le 13 août, Turk Telekom, l’un des principaux partenaires de la Syria Telecommunications Establishment [STE, le seul fournisseur d’accès à Internet en Syrie, NDLR], a cessé ses opérations dans le pays”, relève Renesys. Telecom Italia, pour sa part, continue - quoique de manière très anecdotique - à travailler avec STE. “Mais tout porte à croire que les Italiens devraient bientôt disparaître du tableau également”, écrit Doug Madory.
Ces partenaires sont pourtant essentiels pour assurer la connexion de la Syrie au monde car ils gèrent les câbles qui permettent aux données de sortir du pays et d’y entrer. Ils ont donc, pour la plupart, coupé le robinet à flux internet. Impossible, en revanche, d’en déterminer la cause. Il peut s’agir d’une conséquence des dommages infligés aux infrastructures lors des combats, ou bien d’une mesure de rétorsion contre la STE, une entreprise publique largement soumise au régime de Bachar al-Assad.
Dans cette hypothèse, ces entreprises occidentales s’aligneraient en fait sur la position adoptée au printemps dernier par les États-Unis. Le président américain Barack Obama a en effet signé, le 23 avril, un décret qui interdit aux sociétés américaines d’entretenir des rapports commerciaux avec des entreprises syriennes du secteur des télécommunications. Une manière de frapper au portefeuille un secteur accusé de censurer et d’espionner la population syrienne sur demande de Damas.
Du coup, Pékin a les mains libres pour aller à la pêche aux nouveaux marchés qui pourraient se révéler juteux le jour où le conflit en Syrie prendra fin. Ce retrait des acteurs occidentaux permet en outre aux Chinois de “bénéficier d’une nouvelle opportunité pour vendre au régime de Damas ses propres solutions de contrôle et de surveillance des communications”, souligne encore Ars Technica.