Réunis en sommet extraordinaire en Arabie saoudite, les pays-membres de l'Organisation de la coopération islamique s'apprêteraient à suspendre Damas, accentuant davantage encore l'isolement de la Syrie sur la scène internationale.
AFP - Les dirigeants du monde musulman, réunis dans la nuit de mardi à mercredi en sommet extraordinaire à La Mecque, s'orientaient vers une suspension de la Syrie de leur forum, l'Organisation de la conférence islamique (OCI), accentuant l'isolement du régime de Damas qui a éconduit la veille une responsable humanitaire de l'ONU en lui faisant savoir que le dossier des déplacés était du ressort du gouvernement syrien.
Des pays occidentaux empêchent un règlement politique du conflit en Syrie et sont responsables des désaccords au Conseil de sécurité des Nations unies, a affirmé mercredi le Quotidien du Peuple, journal du Parti communiste chinois au pouvoir.
"Des pays occidentaux n'ont jamais renoncé à leur objectif de renverser le régime en Syrie et ont, de façon constante, renforcé leur soutien aux forces antigouvernementales", a dénoncé le journal dans un commentaire.
Ces pressions occidentales, parmi lesquelles figurent les tentatives d'imposer une zone d'exclusion aérienne en Syrie, ont "sapé l'unité au sein du Conseil de sécurité de l'ONU et ont empêché la communauté internationale de trouver un consensus", a-t-il ajouté.
Le Quotidien du Peuple a reproché à ces mêmes pays occidentaux d'être responsables de l'échec de la mission de Kofi Annan en tant que médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe.
Le projet de communiqué final, dont l'AFP a obtenu une copie, justifie la suspension par l'échec de l'ex-émissaire international en Syrie Kofi Annan à appliquer son plan de paix en six points et par "l'obstination des autorités syriennes à suivre l'option militaire" pour un règlement de la crise.
L'Iran, membre de l'OCI et fidèle allié de Damas, avait fait savoir qu'il s'opposait à cette mesure.
Face à la détérioration de la situation humanitaire, la secrétaire générale adjointe des Nations unies aux affaires humanitaires, Valérie Amos, s'est rendue mardi à Damas où elle s'est entretenue avec plusieurs membres du gouvernement, dont le nouveau Premier ministre Waël al-Halqi.
Elle a été rudement éconduite par le secrétaire d'Etat chargé de la Réconciliation nationale, Ali Haïdar. Ce dernier a jugé que le retour de plus d'un million de déplacés dans leurs foyers n'était pas une "mission de l'ONU ni des institutions internationales" mais relevait du gouvernement syrien.
L'ancien chef du gouvernement syrien, Riyad Hijab, qui a rompu avec Damas après plusieurs diplomates, hauts gradés de l'armée et parlementaires, a pour sa part estimé que le régime s'était "effondré militairement, économiquement et moralement" et ne contrôlait "plus que 30%" de la Syrie, lors d'une conférence de presse à Amman où il a trouvé refuge.
Les Etats-unis ont levé les sanctions le visant et affirmé qu'ils encourageaient d'autres responsables civils et militaires "à rejeter le régime".
Washington a accusé les Gardiens de la révolution iraniens de mettre sur pied une milice chiite en Syrie pour soutenir le régime Assad et combattre les insurgés.
A Genève, Ahmad Fawzi, porte-parole de l'ancien médiateur pour la Syrie Kofi Annan, a indiqué que les autorités syriennes avaient approuvé la candidature de l'Algérien Lakhdar Brahimi pour lui succéder au poste d'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe dans ce pays secoué par 17 mois de violences.
Ce diplomate de 78 ans veut toutefois obtenir le soutien formel du Conseil de sécurité de l'ONU avant d'accepter la mission, ont confié des diplomates mardi.
La secrétaire d'Etat Hillary Clinton a discuté par téléphone avec plusieurs ministres des Affaires étrangères occidentaux des moyens de coordonner leur action pour accélérer le départ du président syrien.
Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius est attendu quand à lui de mercredi à vendredi en Jordanie, au Liban et en Turquie.
Perquisitions à Damas
Sur le terrain, les combats se poursuivaient entre rebelles et forces gouvernementales qui concentrent leurs opérations sur les deux principales villes du pays, Damas et Alep.
Selon un journaliste de l'AFP à Alep, un sentiment anti-occidental se renforce dans les rangs des combattants, qui reprochent à l'Occident de les laisser mourir.
"Des accrochages ont lieu à Seif al-Dawla et Salaheddine et des explosions sont entendues dans ces deux quartiers" d'Alep, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), faisant état de bombardements dans les quartiers de Sakhour, Hanano et Chaar (est).
Le journaliste de l'AFP a entendu des bombardements provenant de Seif al-Dawla et de Salaheddine, un temps tenus par les rebelles, et il a vu à Bab al-Nasser (centre) un MiG tirant à trois reprises.
L'armée a lancé le 28 juillet un assaut majeur sur la métropole du nord, mitraillée notamment par des hélicoptères.
L'agence officielle syrienne Sana a indiqué que l'un de ses photographes avait été blessé lundi à Salaheddine alors qu'un journaliste de la télévision iranienne en arabe Al-Alam a été enlevé par les rebelles à Homs (centre), selon cette chaîne.
Reporters sans frontières (RSF) a exhorté l'opposition à condamner les exactions visant les journalistes alors que les médias pro-régime sont devenus la cible des rebelles.
A Damas, où des affrontements très violents ont débuté mi-juillet, l'armée a poursuivi les perquisitions et les arrestations entamée lundi dans le centre-ville, toujours selon l'OSDH qui s'appuie sur un réseau de militants et témoins.
Les militaires avançaient vers le coeur de la vieille ville "à la recherche d'armes et de jeunes militants", a expliqué un commerçant du centre-ville.
Selon un bilan provisoire de l'OSDH, 89 personnes sont mortes mardi, dont 53 civils. Les violences ont fait plus de 23.OOO morts en 17 mois selon l'OSDH.