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Sauver la filière automobile passe-t-il par un redressement productif ?

La filière automobile française attend les détails du plan de soutien que le ministre français du Redressement productif, Arnaud Montebourg, doit dévoiler mercredi 25 juillet. Mais la solution ne peut-elle être que franco-française ?

Les déclarations d’Arnaud Montebourg sont très attendues ce mercredi. Le Ministre du redressement productif doit préciser, en Conseil des ministres, les contours de son plan de soutien à la filière automobile française. "Le ministre a dit 'on vous lâchera pas", s’était réjoui le délégué CFTC de PSA Peugeot Citroën Franck Don après une réunion à Bercy le 21 juillet. Depuis l’annonce, le 12 juillet, de la suppression de 8 000 postes et de la fermeture du site d’Aulnay-sous-Bois, les salariés du constructeur français placent tous leurs espoirs dans le gouvernement.

PSA dans le rouge

PSA Peugeot Citroën a annoncé mercredi un nouveau plan d'économies de 1,5 milliard d'euros à l'horizon 2015.

Intitulé "Rebond 2015", il vient s'ajouter au précédent plan de réduction de coûts et au programme de cessions d'actifs de 1,5 milliard d'euros en vigueur en 2012. Il prévoit notamment 600 millions d'euros de baisse des coûts de structure obtenue grâce à la restructuration annoncée début juillet.

Le premier constructeur automobile français,a accusé sur les six premiers mois de l'année une perte nette de 819 millions d'euros, alors qu'il avait dégagé un an plus tôt un bénéfice du même ordre (806 millions).

Peut-être le secteur espère-t-il un "remake" à la française du soutien massif apporté, en  2009, par l’administration américaine à la filière automobile nationale alors au bord de l’effondrement. Barack Obama avait alors dégagé une enveloppe de près de 30 milliards de dollars pour sauver General Motors, Ford et Chrysler. Mais les commentaires d’Arnaud Montebourg à ce sujet ces derniers jours suggèrent un plan français beaucoup moins ambitieux financièrement.

C’est un “soutien massif vers les véhicules innovants et propres, hybrides, électriques” que le ministre du Redressement productif avait défendu sur l'antenne de France Inter le jeudi 19 juillet. Ainsi serait réévalué le bonus-malus écologique mis en place en 2008 à l’issue du Grenelle de l’environnement. Une incitation complétée par un dispositif d’aide à l’achat de véhicules "propres" pour les foyers les plus modestes. Le ministre devrait également annoncer la mise à contribution du grand emprunt lancé en 2010 par Nicolas Sarkozy pour financer la recherche pour des véhicules plus propres. Le tout serait, d’après le quotidien "Les Échos", accompagné d’une grande campagne sur le thème du "achetez français".

Plan Marshall européen

"Ce qui frappe dans ce que le gouvernement prépare, c’est qu’il s’agit essentiellement de réorienter ou de continuer des dispositifs qui avaient déjà été décidés par le précédent gouvernement", analyse Marc Ivaldi, économiste à l’École d’économie de Toulouse contacté par FRANCE 24. Mais le gouvernement n’a pas non plus la même marge de manœuvre que Barack Obama en 2009, rappelle ce spécialiste du secteur des transports. "Toute aide financière directe à la filière automobile risque d’être invalidée par l’Union européenne car elle serait assimilée à des subventions qui faussent la concurrence en Europe", souligne Ivaldi. Et ce dernier rappelle que si Paris a pu aider financièrement ses banques, c’est uniquement grâce à la décision d’une démarche européenne commune.

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"Il n'y aura pas de licenciements secs"

Ainsi, au niveau national, tout plan de redressement devra être annoncé avec soin sous peine de provoquer l’ire des autres constructeurs européens. “Il ne faut pas oublier que c’est toute la filière en Europe qui connait des problèmes actuellement et que l’aide dans un pays peut avoir des conséquences négatives dans d’autres pays”, prévient Ivan Hodac, secrétaire général de l’ACEA (principal lobby européen des constructeurs automobiles à Bruxelles), contacté par FRANCE 24.

"La meilleure solution serait un plan Marshall au niveau européen", estime Marc Ivaldi. Encore faut-il que tous les États européens soient d’accord pour débloquer des fonds afin d’aider la filière automobile. A priori, un consensus devrait être possible : les ventes de voitures ont, en effet, chuté de 6 % en Europe depuis le début de l’année 2012, selon les chiffres de l’ACEA. Sauf en Allemagne où les ventes ont augmenté de près de 3 % en juin ; Berlin risque donc de freiner toute décision qui l’obligerait à débourser plus d’argent.

Cependant, l’accès aux fonds européens ne serait qu’une solution partielle. "Prêter de l’argent permet de parer à l’urgence mais ne résout pas les problèmes de fond", assure Ivan Hodac. Pour lui, l’industrie automobile souffre d’un déficit de compétitivité qui passe par la définition d’un nouveau cadre législatif européen. Il reste à le définir, ce qui pourra prendre du temps. Menacés de perdre leur emploi, les salariés de PSA n’ont pas eu le loisir d’attendre.