À la rentrée 2012, les Français de l’étranger devront mettre la main à la poche pour scolariser leur enfant dans un lycée français. Une décision de François Hollande qui provoque la colère des expatriés.
Chère à Nicolas Sarkozy, la mesure instaurant progressivement la gratuité dans les classes des établissements français à l’étranger avait provoqué des réactions négatives après son adoption en 2007. Un rapport parlementaire épinglait en juin 2010 l"'iniquité" de la disposition et dénonçait son "coût pour l‘Etat". Mais l’abrogation de la dite mesure annoncée le 20 juillet par François Hollande n’est pas plus populaire.
S'il varient dans les lycées français à l’étranger selon les établissements, les frais de scolarité n'en demeurent pas moins très élevés. À Hanoï, la capitale vietnamienne, l’inscription coûte entre 2 400 et 4 200 euros. À Singapour, les frais peuvent atteindre 14 500 euros pour une année et plafonnent même à 21 500 euros à New York. Malgré les écarts dûs au coût de la vie dans les différents pays, tous les établissements étaient concernés par la mesure de gratuité. Celle-ci avait d'abord été appliquée aux classes de terminale puis aux deux autres niveaux de lycée en 2008 et 2009. Mais l’application de la mesure avait alors été stoppée par la crise économique.
Entraînant une dépense de 31,9 millions d’euros rien pour que l’année 2011-2012, la prise en charge des frais de scolarité des élèves des lycées français par l’Etat était vue d’un mauvais œil dans un contexte de rigueur budgétaire, jusque dans les rangs de l’UMP. Le candidat Sarkozy avait pourtant annoncé, durant la campagne présidentielle, vouloir la maintenir.
"Le riche expatrié est un mythe"
Selon Corinne Narassiguin, député PS des Français établis en Amérique du Nord, la gratuité n’était soutenue par aucun établissement ni aucune association de parents d’élèves, ces derniers ayant en effet dénoncé un “mini bouclier fiscal” pour les plus riches et les exilés fiscaux. Pour l’élue, son abolition s’inscrit dans une volonté de "chasse au gaspillage".
Etat budgétaire désastreux oblige, le gouvernement a donc décidé de mettre fin à la gratuité dès la rentrée 2012. Pour Hélène Charveriat, déléguée de l’Union des Français de l’étranger, le délai est court : "La mesure avait déjà été remise en cause mais là, c’est brutal".
Pour certains, la suppression de la PEC, la prise en charge des frais de scolarité par le gouvernement, aura un impact néfaste sur le système français et pourrait dissuader certains Français de s’installer à l’étranger, alors que la France compte 1,5 million de citoyens établis hors du territoire national. "Le riche expatrié est un mythe. Un expatrié est avant tout un Français curieux qui prend des risques. Avec la fin de la gratuité, certains citoyens résidant à l’étranger n’auront d’autres choix que de revenir en France et donc perdre leur emploi," explique Gautier, qui a participé à l’appel à témoignage lancé sur France24.com.
"Sans les expatriés, la France serait un village gaulois"
"Nous sommes les représentants de la France à l'étranger et de ses intérêts," tempête pour sa part une internaute expatriée, avant d’exprimer le souhait de voir ses enfants éduquer dans une école française. "Etre parti vivre loin de nos frontières ne signifie pas que nous avons divorcé du pays et de sa culture !" Pour Lothaire, résidant en Pologne depuis trois ans, cette annonce est un choc : "Mon enfant va grandir d’une mère polonaise mais ne pourra pas bénéficier de ma culture, car je n’aurai pas les moyens de l’inscrire au lycée français, ni même dans un lycée polonais bilingue," déplore-t-il.
Dans la même veine, Gautier Andreotti s’insurge : "Sans les expatriés, la France serait un village gaulois, pas la cinquième économie mondiale". Tandis qu’Anne-Sophie argue du fait que certains expatriés devraient avoir accès à l’école française gratuitement étant donné qu’ils paient leurs impôts en France.
Les plus bas revenus pourront toutefois prétendre à des aides à la scolarité. "Cette mesure est intelligente car elle permet d'économiser l'argent qui était versé aux expatriés qui eux ont les moyens de payer le lycée pour leurs enfants. À l'opposé, les Français qui sont résidents permanents dans le pays ne peuvent souvent pas se permettre de payer ces frais de scolarité, surtout s’ ils ont des contrats locaux moins bien rémunérés," estime pour sa part une personne ayant souhaité conserver l’anonymat.