Libéré mercredi après 33 jours de captivité aux mains des Farc, en Colombie, le journaliste de FRANCE 24 Roméo Langlois est rentré en France vendredi, accueilli à l’aéroport Charles-de-Gaulle par la ministre de la Culture Aurélie Filippetti.
Le correspondant de FRANCE 24 à Bogota, Roméo Langlois, relâché mercredi après plus d’un mois de captivité en Colombie, est arrivé en France en fin de matinée. Le journaliste, qui est rentré à Paris par l’unique vol affrété quotidiennement par Air France sur cette destination, a été accueilli à l’aéroport Charles-de-Gaulle par la ministre de la Culture Aurélie Filippetti.
La nouvelle ministre l’a remercié d’avoir "payé par cette détention le combat […] pour la liberté d’informer". Elle a également assuré avoir "une pensée pour deux journalistes français, Gilles Jacquier et Rémi Ochlik […] qui ont été tués en janvier et en février 2012 à Homs en Syrie."
Puis Roméo Langlois a pris la parole. Devant le parterre de journalistes présents, il a multiplié les remerciements à l’égard des "nombreuses personnes qui ont œuvré à [sa] libération", notamment sa consoeur Pascale Mariani, pour l’avoir "tracé pendant des jours".
"Il aura fallu que je me fasse enlever pour me rendre compte qu’il y avait un grand nombre de gens qui m’aimaient. Toutes ces personnes ont souffert plus que moi", a-t-il confié.
Il est également revenu sur ses conditions de détention : "Tout de suite c’était très clair : les Farc m’ont dit que j’allais être relâché. […] Je n’étais pas plus inquiet que ça", a-t-il avoué, reconnaissant qu’il "n’avait pas misé sur 33 jours" de détention, mais "sur une quinzaine de jours au maximum."
Une "farce de mauvais goût" pour celui qui évoque même avec le sourire son statut d’"otage VIP", en comparaison de "plein d’autres journalistes qui ont été otages dans des conditions beaucoup plus difficiles."
"Je vais continuer à travailler en Colombie et ailleurs"
itEnfin, Roméo Langlois a évoqué la lettre à l’adresse du président français François Hollande que les Farc lui ont remis : "J’ai une carte des Farc pour François Hollande. Je l’ai lue, car une partie de cette lettre me concerne, mais je n’entrerai pas trop dans les détails. En gros, les Farc demandent à la France de continuer à jouer son rôle d’ami de la Colombie pour aboutir à une solution négociée […] entre la guérilla et le gouvernement colombien."
Interrogé sur la suite de sa carrière journalistique, le correspondant de FRANCE 24 n’a également laissé planer aucun doute sur son avenir. "Je vais continuer à travailler en Colombie et ailleurs", a-t-il assuré, sans la moindre hésitation.
La veille, jeudi, lors d’une conférence de presse tenue à l’ambassade de France à Bogota, Roméo Langlois était déjà apparu souriant et détendu. Devant ses confrères, le journaliste de FRANCE 24 s’était longuement étendu sur les circonstances de sa capture, qu’il avait justifiée par une "prise de risque professionnelle" entièrement assumée, et non une "erreur de manœuvre de l’armée"
Un "show médiatique"
Il avait également livré quelques détails sur le déroulement de l’opération militaire, qui
its'opérait à proximité de ce que l’armée soupçonnait être un laboratoire clandestin de drogue. "Tout à coup, on a entendu ‘papapapapapa’, et on s’est tous jetés à terre, raconte le reporter. Ça tirait de partout, de tous les côtés […]. On s’est cachés dans les buissons et c’est là que ça a mal tourné. On était aplatis à terre, on essayait d’esquiver les balles, un groupe de guérilleros nous tirait dessus."
Roméo Langlois, qui a rendu hommage aux militaires tués lors des affrontements, a en revanche regretté avoir été l’objet d’un gros coup médiatique de la part de la guérilla marxiste : "Les Farc ont subi de nombreux revers ces dernières années et elles se sont dit qu’avec un journaliste français, il y avait un bon coup à faire. La libération d’Ingrid Betancourt a blessé leur orgueil. Alors mon enlèvement est un coup de pub pour montrer qu’ils sont encore bien là."
Il a détaillé, non sans humour, l’état d’esprit de ses ravisseurs le jour de sa libération : "Ils étaient contents. Il y avait des paysans au village, des journalistes, on tuait des vaches. Ils avaient acheté des caméras pour l’occasion. Ça faisait longtemps qu’ils n’avaient pas connu ça !"
Un reportage à venir
Dès ses premiers jours de captivité, Roméo Langlois a négocié avec ses ravisseurs pour obtenir une caméra. Il l’obtiendra au bout de trois semaines. Il a ainsi pu filmer l’un des chefs guérilleros du Front 15, une des unités régionales de la rébellion, l’interrogeant sur les raisons de sa détention, sur le conflit colombien ou la culture de la coca.
Le journaliste, qui apparaissait d’ailleurs camescope à la main sur les images de sa libération, est plus que jamais déterminé à poursuivre le reportage et à couvrir la Colombie, pays où il est exerce depuis une dizaine d’années. Il envisage néanmoins de rentrer vivre en France dans les mois à venir.
"Il n’y a pas beaucoup de journalistes qui couvrent le conflit colombien, dans la jungle, dans les zones compliquées où il y a des affrontements. Les médias colombiens n’ont pas beaucoup de latitude pour parler, il y a beaucoup d’autocensure. Donc les médias internationaux et indépendants ont leur rôle à jouer."
Quant aux accusations de l’ancien président colombien Uribe, qui lui a demandé sur Twitter des précisions sur sa relation exactes avec les Farc, le journaliste les juge de "très mauvais goût" : "Mes relations avec les Farc ont été professionnelles pendant dix ans. Puis celle d’un otage envers ses geôliers ce dernier mois."