Quelques jours après le massacre de Houla, l'envoyé spécial conjoint de l'ONU et de la Ligue arabe, Kofi Annan, a réclamé au cours de son entretien à Damas avec Bachar al-Assad des mesures significatives pour mettre fin aux violences.
AFP - Le médiateur international Kofi Annan, qui a rencontré mardi le président syrien Bachar al-Assad, lui a demandé des mesures "courageuses" pour mettre fin aux violences, quelques jours après le massacre de Houla condamné par la communauté internationale.
M. Annan "a indiqué de façon franche à M. Assad sa conviction que le plan (de sortie de crise) en six points ne peut réussir si des mesures courageuses ne sont pas prises pour mettre fin aux violences et libérer les prisonniers", a rapporté le porte-parole de l'émissaire, Ahmad Fawzi.
Mais M. Assad a de nouveau rejeté sur l'opposition la responsabilité des violences, estimant selon la télévision syrienne que "le succès du plan dépend de la fin du terrorisme (...) et de l'arrêt de la contrebande d'armes".
Depuis le début de la révolte en mars 2011, le régime syrien, qui ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation, assimile les opposants à des terroristes.
Signe d'un durcissement de la position des Occidentaux à l'égard de Damas, les grands pays européens, les Etats-Unis, le Canada et l'Australie ont annoncé l'expulsion des représentants diplomatiques syriens dans leur capitale en représailles au massacre de Houla.
Le Conseil de sécurité des Nations unies avait condamné samedi Damas pour les
it"bombardements par les chars et l'artillerie gouvernementale" contre un quartier résidentiel de Houla, sans toutefois préciser si ce pilonnage avait causé le carnage.
Un porte-parole du Haut commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, Rupert Colville, a déclaré mardi que "moins de 20 des 108 assassinats peuvent être attribués à des tirs d'artillerie et de chars".
"La plupart des autres victimes (...) ont été sommairement exécutées lors de deux incidents différents" qui ont été perpétrés selon des habitants par des "chabbiha", les miliciens pro-régime. Damas a de son côté nié l'implication de ses troupes.
Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a salué le mouvement d'expulsions d'ambassadeurs syriens, lancé par le nouveau président français, François Hollande, qui a annoncé en outre une réunion à Paris début juillet du groupe des pays "amis du peuple syrien".
Le CNS a appelé la communauté internationale à aller plus loin en adoptant au Conseil de sécurité "une résolution permettant le recours à la force nécessaire en vue d'empêcher les génocides et les meurtres commis par les milices du régime".
A son arrivée lundi en Syrie, M. Annan s'était dit "horrifié" par ce massacre qui a mis encore un peu plus en péril son plan de paix.
La trêve instaurée théoriquement le 12 avril en vertu de ce plan semble de plus en plus caduque avec 19 nouveaux morts mardi dans la répression et de violents combats entre rebelles et soldats.
"Des familles entières tuées dans leurs maisons"
La visite de M. Annan, la deuxième en trois mois de mandat, intervient après un week-end particulièrement sanglant durant lequel plus de 280 personnes ont péri, selon des chiffres de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) compilés par l'AFP.
Le médiateur s'est également entretenu avec des représentants de l'opposition, et il doit encore rencontrer le général Robert Mood, chef des observateurs de l'ONU, et tenir une conférence de presse dans l'après-midi.
"Ceux qui sont responsables de ces crimes brutaux devront en répondre", a estimé M. Annan avant de rencontrer M. Assad.
Selon M. Colville, "au moins un partie substantielle" du massacre "absolument abominable" de Houla "était des exécutions sommaires de civils, y compris de femmes et d'enfants".
"Il semble que des familles entières ont été tuées dans leurs maisons", a-t-il dit.
Une commission conjointe armée-justice, chargée par Damas d'enquêter, doit publier ses conclusions mercredi.
La Russie, alliée de Damas, avait estimé que régime et rebelles étaient impliqués dans le massacre, arguant de la présence de blessures à bout portant en plus des tirs d'artillerie.
Moscou, sous une pression croissante pour lâcher Damas, a pris ses distances, tout en accusant certains pays d'alimenter les violences en visant avant tout un changement de régime à Damas.
L'armée syrienne "épuisée"
Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a réaffirmé au quotidien Le Monde que M. Assad "doit quitter le pouvoir", excluant toutefois dans l'immédiat toute livraison d'armes à l'opposition.
Le CNS avait réclamé lundi des "moyens efficaces d'autodéfense" pour faire face à la répression.
Sur le terrain, répression et combats reprenaient de plus belle, notamment dans les provinces de Homs (centre), Idleb (nord-ouest), Hama (centre), Alep (nord) et Raqa (nord-est), selon l'OSDH.
"L'armée syrienne est épuisée car elle a subi beaucoup de pertes ces derniers jours en raison de la recrudescence des combats, que ce soit à Rastane ou ailleurs", a estimé le président de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane, en référence à la ville rebelle qui oppose une farouche résistance à l'armée.
En 14 mois, les violences ont fait plus de 13.000 morts, dont plus de 1.800 depuis le début de la trêve, selon l'OSDH.