Le Premier ministre propose d'engager la responsabilité du gouvernement sur la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'Otan. S'il est mis en minorité à l'Assemblée, ce qui reste peu propable, le gouvernement chuterait.
AFP - François Fillon a décidé jeudi d'engager la responsabilité de son gouvernement sur la politique étrangère, et donc sur l'épineux dossier du retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan, à un moment où les gaullistes donnent de la voix contre cette décision.
S'il était mis en minorité lors du vote le 17 mars, le gouvernement chuterait. Une hypothèse très improbable au regard de la large majorité dont dispose l'UMP à l'Assemblée nationale.
C'est la seconde fois depuis son arrivée à Matignon que François Fillon engage sa responsabilité devant l'Assemblée: il l'avait fait une première fois le 3 juillet 2007 sur sa politique générale, peu après sa nomination à Matignon par Nicolas Sarkozy.
Voulu par le chef de l'Etat, le retour de la France dans l'Otan "s’inscrit dans le cadre d’une politique globale destinée à renforcer notre sécurité et à développer l’influence et le rayonnement de la France en Europe et dans le monde", écrit le Premier ministre dans une lettre, rendue publique par Matignon, aux chefs de file PS à l'Assemblée et au Sénat, Jean-Marc Ayrault et Jean-Pierre Bel.
"La place de la France dans l’Otan ne constituant qu’un des éléments contribuant à la cohérence de notre politique étrangère, c’est donc sur cette politique que le gouvernement entend saisir le Parlement", ajoute-t-il.
Conformément à ce qu'exige l'article 49.1 de la Constitution, M. Fillon devra demander lors du prochain Conseil des ministres, le 11 mars, l'autorisation d'engager la responsabilité du gouvernement. Le 17 mars, il présentera sa politique, à la suite de quoi les députés débattront puis voteront.
En demandant à l'Assemblée de se prononcer, François Fillon répond favorablement à une demande des parlementaires socialistes pour qui la représentation nationale devait pouvoir pleinement s'exprimer sur ce "retournement stratégique".
Le Premier ministre, qui avait déjà fait savoir que cette procédure avait ses faveurs lors d'une réunion avec les députés UMP le 17 février, se donne aussi l'occasion de ressouder sa majorité avec un dossier décrié par une partie d'entre elle.
Comme avant eux de nombreux députés, deux ex-Premiers ministres, Alain Juppé et Dominique de Villepin ont ouvertement critiqué Nicolas Sarkozy à propos de cette question du retour total de la France dans l'Otan.
M. de Villepin a dégainé le premier, jugeant que ce serait "une faute".
Alain Juppé s'est "interrogé sur l'utilité qu'il y a" pour la France à "sauter le pas": "le seul intérêt est symbolique".
Mais les proches de M. Villepin, qui avait prévu de donner de la voix le 1er avril sur ce sujet, se voient désormais couper l'herbe sous le pied.
"Je ne crois pas qu'il manquera des voix. Il s'agit là d'un engagement de responsabilité du gouvernement. Notre majorité est profondément soudée autour du président et du gouvernement ce qui n'empêche pas les débats", a déclaré à l'AFP le chef des députés UMP, Jean-François Copé.
Ce n'est "pas un vote pour l'Otan mais un vote de cohésion majoritaire", a estimé aussi Hervé Mariton, député villepiniste atlantiste.
Prenant "acte" de la décision de François Fillon, Jean-Marc Ayrault a "souhaité que ce débat dispose de tout le temps nécessaire pour permettre à toutes les opinions de s'exprimer, notamment celles qui à gauche et dans la majorité ne partagent pas la dérive atlantiste du Président de la République".
Les députés PCF ont demandé "que le peuple puisse s'exprimer par voie de référendum sur cette question d'importance".