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Le débat télévisé se joue aussi sur les réseaux sociaux

Plus de 355 000 tweets de citations et de commentaires ont accompagné le débat télévisé de mercredi soir entre les candidats au second tour de l'élection présidentielle. Pour certains, le débat devant sa télévision est presque devenu secondaire...

Graphique : @kindofTV

L’ordinateur portable sur les genoux, le smartphone dans une main et la télévision au fond du salon : voilà à quoi ressemble désormais le téléspectateur qui suit le débat télévisé de l'entre-deux tours de l'élection présidentielle. Sans oublier l’essentiel : le verre de vin et la pizza.

— Pizza au four. Salade, OK. Vin, OK. Bonbecs, OK. Je suis presque prêt. #ledébat

— George Kaplan (@monsieurkaplan) Mai 2, 2012

Les habitudes du téléspectateur ont changé depuis le débat de l’élection présidentielle de 2007, quand Twitter n’avait qu’un an et émergeait à peine. Désormais, le site compte 500 millions d’utilisateurs dans le monde et le hashtag #ledebat, en référence au débat télévisé, a été utilisé par 77 546 utilisateurs de Twitter, mercredi soir. C’est un chiffre qui peut certes sembler faible par rapport aux 17 millions de téléspectateurs qui ont regardé le débat sur sept différentes chaînes de télévision, mais avec 35 tweets par seconde, cela génère tout de même plus de 355 000 tweets.

"Suivre aujourd’hui le débat devant sa télévision, c’est presque secondaire. On pourrait même ne pas suivre le débat à la télévision (…)," note l’observateur des médias, Daniel Schneidermann, dans le quotidien Libération. "Comme si on assistait à un nouveau partage de tâches. La télé se cantonnant à la pure image, les sites d’information s’occupant des débats de fond". Cette nouvelle façon d’être acteur du débat politique, et non simple téléspectateur, a inspiré à Erwann Gaucher, consultant sur les questions de web, l’idée d’organiser un "autre débat" sur Twitter, mercredi soir, parallèle à celui des candidats aux second tour : huit personnes représentant diverses tendances politiques ont débattu sur les thèmes lancés par Nicolas Sarkozy et François Hollande. Pour Erwann Gaucher, "le débat sur les réseaux sociaux n’est qu’une modernisation de l’ancienne forme de convivialité : inviter des amis chez soi pour regarder la télé, et discuter du débat. Mais à présent, on discute aussi avec des personnes qui ont un avis politique différent."

Le web n’est plus seulement le terrain du rire et de la parodie. Certes, @humourdedroite a un succès indéniable avec ses formules ("Et Sarkozy invente le flic à couper le beur #LeDebat") et les piques concernant les deux journalistes qui ont animé le débat, David Pujadas et Laurence Ferrari, vont bon train. Mais des discussions plus sérieuses se sont engagées au cours de la soirée, se basant notamment sur tout le travail de vérification des faits effectué par des rédactions, qui vise à traquer les approximations et les contre-vérités (lire, sur notre site, "Débat télévisé : les petits arrangements chiffrés des candidats avec la réalité").

"moi moi moi moi moi moi moi etc"

Twitter est devenu un champ de bataille politique, chaque équipe de campagne veut éviter que la twittosphère ne tombe aux mains de l’adversaire. L’enjeu a été saisi, aussi bien dans l’équipe de Nicolas Sarkozy que par celle de François Hollande, qui ont chacun investi environ deux millions d’euros, soit un dixième de leur budget de campagne, pour être présents sur Internet.

De même, les caciques des partis s’emploient à orienter les débats. Ainsi, l’ancien ministre du Budget, Eric Woerth, qui tacle l’adversaire socialiste : "#FH moi moi moi moi moi moi moi etc #NS2012".

#FH moi moi moi moi moi moi moi etc #NS2012

— Eric Woerth (@WoerthEric) Mai 2, 2012

De son côté, la compagne de François Hollande, Valérie Trierweiler, alias @valtier, assume le remix : "François Hollande-Moi président de la République (Remix Soprano -Moi j'ai pas) par ShadowKillah".

Des révélations tombent en parallèle. Mathieu Pigasse, directeur général délégué de la banque Lazard, actionnaire du Monde, réplique en direct à Nicolas Sarkozy sur sa fortune et ses supposés avantages fiscaux : "Mensonge et calomnie : je n'ai jamais bénéficié du bouclier fiscal."

Mensonge et calomnie : je n'ai jamais bénéficié du bouclier fiscal.

— Matthieu Pigasse (@MPigasse) Mai 2, 2012

Un scrutin électoral ne se joue certes pas sur le numérique. La télévision continue à donner le tempo de la campagne et à être le média privilégié des candidats, pour sa large audience. Mais de nouveaux usages émergent. "Venant des partis politiques, j’observe des choses intéressantes arriver sur les réseaux sociaux, notamment de la part des députés. Il y a de vraies discussions qui s’engagent, et pas seulement un concours de citations ou de petites phrases assassines. Ca sera intéressant de voir le rôle joué par les réseaux sociaux aux législatives", relève Erwann Gaucher.