À cinq jours du second tour de la présidentielle, Nicolas Sarkozy a réuni ses troupes pour un meeting du 1er-Mai centré autour de la "valeur travail". Un rassemblement en forme de rappel à l’ordre envers les syndicats, qui défilaient au même moment.
Célébrer la "vraie Fête du travail" pour ne pas laisser les syndicats occuper le terrain à cinq jours du second tour de l'élection présidentielle, tel était l’objectif de Nicolas Sarkozy, qui a communié mardi 1er mai au milieu de ses partisans. Sous un soleil printanier, le président sortant a pu constater avec satisfaction que "la marée de drapeaux tricolores", qu’il avait appelée de ses vœux, recouvrait l’ensemble de la place du Trocadéro et une partie des avenues du quartier.
Ces dizaines de milliers de drapeaux français, de même taille, avaient été distribués en masse aux abords de la place. La scénographie est parfaite pour les télévisions et les militants venus équipés de leur appareil photo : les drapeaux flottent dans le ciel de Paris, devant le pupitre du président-candidat, qui trône sur le haut de l'esplanade, avec, en toile de fond, la tour Eiffel.
"Vous êtes 200 000", s’est félicité Nicolas Sarkozy dès le début de sa prise de parole. Un chiffrage difficile à vérifier, même si un policier, habitué des grands rassemblements, a indiqué à FRANCE 24 avoir dénombré entre 80 000 et 100 000 personnes.
"Je le dis aux syndicats : posez le drapeau rouge et servez la France !", a lancé depuis la tribune Nicolas Sarkozy, qui a indiqué n’avoir "aucune leçon de moral à recevoir de la part de ceux qui brandissent le drapeau rouge, étendard de tant de tyrannies". "Laissez de côté les partis parce que votre rôle n'est pas de faire de la politique. Votre rôle n'est pas de défendre une idéologie, votre rôle est de défendre les salariés", a-t-il lancé, se posant en véritable défenseur du "dialogue social, absolument indispensable, à [ses] yeux".
Le président sortant s’est félicité de l’ampleur du rassemblement, lui qui est distancé par son rival socialiste François Hollande dans les derniers sondages. Cette célébration du 1er-Mai par le candidat de l’UMP a constitué un véritable défi pour les syndicats, qui défilaient au même moment à quelques kilomètres de là.
"Si nous n’avions rien fait, nous aurions eu au 20 heures la litanie de ceux qui veulent notre échec", avait expliqué Brice Hortefeux, député européen et proche du président candidat, la veille au journal "Le Monde". Le climat s’est en effet durcit ces dernières jours avec les organisations syndicales, et notamment la CGT, dont le secrétaire général, Bernard Thibault, avait appelé quelques heures plus tôt à voter pour François Hollande.
"Le travail, ce qu’il y a de plus important"
Tout au long de son discours d’une demi-heure, le chef de l’État n’a eu de cesse d’opposer l’assistanat, défendu, selon lui, par la gauche, à la "valeur travail", valeur partagée par la droite et le centre - des personnalités centristes s’étaient d’ailleurs exprimées avant lui, dont Jean-Christophe Lagarde, président du Nouveau Centre (NC). Nicolas Sarkozy a une nouvelle fois fustigé les 35 heures qui ont "appauvri les travailleurs en prétendant les protéger" : "C'est le travail qui crée le travail et le partage du travail qui crée le chômage".
Un discours qui fait mouche auprès de Jean, un chef d’entreprise venu avec sa femme du XVIe arrondissement pour écouter son candidat. "Si la gauche des 35 heures passe à nouveau, on va se retrouver ruinés comme l’Espagne de Zapatero. Hollande veut augmenter les impôts, mais comment je vais faire avec ma PME ?", s’inquiète-t-il. S’il avoue que c’est la première fois qu’il descend dans la rue un 1er-Mai, il se dit prêt à manifester de nouveau l’année prochaine pour célébrer "la valeur travail". "Le 1er-Mai, ce n’est ni de droite, ni de gauche. Cette Fête du travail, elle me concerne moi aussi qui suis chef d’entreprise", glisse-t-il entre deux "Nicolas président".
Même réaction auprès de Françoise, une fonctionnaire à la retraite venue de Wasquehal, près de Lille (Nord), pour qui c’est également la première Fête du travail. "On veut dire aux générations futures : le travail, c’est ce qu’il y a de plus important, c’est le travail qui permet d’avoir une vie équilibrée et de vivre plus longtemps. J’ai tenu à travailler jusqu’au bout, en prenant ma retraite à 65 ans, je ne vois pas comment on peut aujourd’hui prétendre qu’il faut s’arrêter à 60 ans", fait-elle mine de s’interroger.
itLa plupart des militants réunis ce 1er-Mai place du Trocadéro ont beau avoir en commun l’amour du travail, tous n’adhèrent pas à l’ensemble des propositions du candidat Sarkozy. C’est le cas de Jisa Kalimine, patron d’une petite société à Grenoble, dans le sud-est de la France, qui a pris un TGV à 5 heures du matin pour pouvoir assister au rassemblement. Il affirme être notamment opposé à la réduction de l’immigration légale, "car on a aussi besoin de main d’œuvre étrangère pour travailler". Mais il veut aujourd’hui oublier ces petites différences, "qui se régleront d’elles-mêmes une fois que Nicolas Sarkozy sera élu". "L’heure est à la fête et au rassemblement, on va faire mentir les sondages, rien n’est perdu pour Nicolas Sarkozy."