Pour espérer l'emporter au second tour de la présidentielle, Nicolas Sarkozy doit reconquérir les électeurs du Front national mais aussi courtiser ceux du centre. Un grand écart qui s'annonce difficile pour le président-candidat.
Donné perdant au second tour de l'élection présidentielle par les sondages d’opinion, Nicolas Sarkozy est contraint de courtiser les 3,2 millions de centristes qui ont voté en faveur de François Bayrou ainsi que les 6,4 millions d’électeurs de Marine Le Pen, arrivée troisième au premier tour de l'élection. Réussir ce grand écart entre deux électorats très différents est un enjeu majeur pour le candidat UMP qui n’a pas renoncé à battre François Hollande le 6 mai.
REUTERS - Nicolas Sarkozy a déclaré mercredi qu'il ne conclurait pas d'accord avec le Front national et ne nommerait pas de ministres FN s'il était réélu le 6 mai.
Le chef de l'Etat, qui brigue un second mandat, a aussi dit que tous les candidats de son parti, l'UMP, se maintiendraient au second tour des élections législatives de juin, même s'ils arrivaient derrière ceux du FN et du Parti socialiste.
Nicolas Sarkozy a donné le ton dès son premier discours de l'entre-deux-tours, lundi 23 avril lors d'un meeting à Saint-Cyr-sur-Loire (Indre-et-Loire), en s’adressant en priorité à l'électorat de l'extrême droite. "Le président-candidat a dévoilé ses intentions en n’hésitant pas à reprendre des éléments de discours de Jean-Marie Le Pen en 2002, en évoquant les petits et les sans-grades, ce qui constitue une reprise extrêmement préoccupante de la rhétorique frontiste", note Alexandre Dezé*, maître de conférence en science politique à l’université de Montpellier, interrogé par FRANCE 24.
Le Front national envisage sérieusement de changer de nom et pourrait s'appeler l'Alliance pour un rassemblement national.
Cette marque a été déposée auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI). Le demande apparaît sur le site de l'INPI, qui précise qu'elle a été déposée le 12 janvier par Louis Aliot, vice-président du FN et porte-parole de la campagne.
Cette démarche, rapportée en premier par le site d'actualité économique challenges.fr, confirme la volonté de "dédiabolisation" entreprise par Marine Le Pen, qui a déjà évoqué un changement du nom d'une formation créée par son père,
Jean-Marie Le Pen.
Le FN a déjà annoncé qu'il se présenterait aux législatives de juin sous la bannière du Rassemblement bleu marine, associant souverainistes et indépendants ralliés au parti d'extrême droite.
"Le président sortant a besoin de 80% des voix du FN pour tenter de l’emporter, mais pour l’instant les sondages démontrent qu’il ne peut pas compter sur ce chiffre. Nombre d'électeurs frontistes avaient été séduits par son discours lors de la campagne de 2007 mais sont frustrés par son mandat", décrypte pour FRANCE 24 le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de l'extrême droite et chercheur associé à l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris). Et d’ajouter : "Nicolas Sarkozy va être tenté d’attirer ces électeurs en musclant encore plus son discours sur l’immigration et l’identité nationale".
*Auteur de l’ouvrage "FN : La conquête du pouvoir ?" aux éditions Armand Colin.