logo

Mélenchon contre l’Otan : "Du bon vieux communisme à l’ancienne"

Lors de son meeting du 5 avril à Toulouse, Jean-Luc Mélenchon s’en est pris à l’Otan. Une attaque classique pour un candidat représentant la gauche radicale, mais un positionnement qui pourrait gêner son probable futur allié socialiste...

Jean-Luc Mélenchon se targue régulièrement d’être l’un des seuls candidats à la présidentielle à parler de politique étrangère. Celui qui fait depuis quelques semaines une percée remarquée dans les sondages a profité de son discours du 5 avril à Toulouse pour attaquer l’Organisation du traité de l'Atlantique-Nord (Otan), accusée de priver la France de sa souveraineté, et par la même de sa liberté. Il s’est ainsi engagé à soumettre à référendum, s'il est élu, l'appartenance du pays à l'Alliance atlantique.

"Où est notre liberté quand on est enchaîné à l’Otan ?", a-t-il lancé à ses sympathisants rassemblés place du Capitole, avant de leur soumettre l’idée d’"une nouvelle alliance altermondialiste". Des positions qui s’inscrivent dans la droite ligne des partis qu’il représente (le Parti communiste français et le Parti de gauche), selon Eddy Fougier, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de la gauche radicale.

"C’est de l’extrême gauche et du bon vieux communisme anti-impérialiste à l’ancienne, analyse-t-il. En matière de politique étrangère, il y a d’un côté les réalistes, et de l’autre les idéalistes. Mélenchon se place clairement du côté des idéalistes quand il définit sa vision, humaniste et assez floue, héritière de la Révolution française."

Le candidat du Front de gauche n’en est pas à ses premières critiques en direction de l’Otan, lui qui expliquait récemment à la Revue de défense nationale sa position en faveur d’une "défense souveraine et altermondialiste". "Un concept un peu confus mais qui a le mérite de rassembler la branche communiste classique et le mouvement altermondialiste, en y ajoutant sa patte à lui", explique Eddy Fougier.

"On croirait entendre Georges Marchais"

À travers cette opposition farouche à l’Otan, c’est Washington que vise Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, sa "nouvelle alliance altermondialiste" doit être "indépendante des États-Unis", afin d’éviter à la France de devenir la "roue de secours du char impérial". "C’est une jolie formule, très ‘mélenchonienne’. On croirait entendre Georges Marchais ou un leader communiste des années 1950", s’amuse le chercheur.

L’opposition aux États-Unis est au cœur de la politique étrangère du candidat Mélenchon. "Les États-Unis sont le principal fauteur de troubles potentiels de la décennie à venir, comme ils l’ont été de celle écoulée, au cours de laquelle ils ont envahi deux pays et multiplié les provocations face à la Chine et à la Russie", confie le leader du Front de gauche dans le numéro d'avril du magazine Défense et sécurité nationale.

"Un point de désaccord complet" avec le PS

Si les diatribes anti-Otan de Mélenchon lui ont valu les applaudissements de la place du Capitole, il devrait en être autrement au QG de François Hollande. Aujourd’hui en tête des sondages, le candidat socialiste devrait, selon toutes vraisemblances, faire alliance avec Jean-Luc Mélenchon avant le second tour. Or, le programme du candidat socialiste prévoit de ne pas "remettre en question" la réintégration à l’Otan, mais simplement de demander une "véritable évaluation" de son rapport coût/bénéfice afin de "prendre les décisions conformes aux intérêts de la France".

Jean-Luc Mélenchon lui-même reconnaît voir dans ce dossier un "point de désaccord complet" avec ses probables futurs alliés. Eddy Fougier estime que même un score flatteur au soir du premier tour ne devrait pas permettre à Mélenchon de parvenir à convaincre François Hollande de quitter l’Otan, "car il y a aujourd’hui un quasi-consensus UMP-PS sur cette question". Si l’un des deux favoris, Sarkozy ou Hollande, l’emporte au second tour, la France devrait ainsi être présente les 20 et 21 mai prochains à Chicago pour le 25e sommet de l’Otan.