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Des milliers de coptes pleurent la mort du patriarche Chenouda III

Des milliers de fidèles se sont recueillis devant la dépouille de Chenouda III, le chef de l'Église copte orthodoxe, décédé samedi à l'âge de 88 ans. La disparition du patriarche, symbole de stabilité dans le pays, a ému toute l'Égypte.

AFP - Des milliers de fidèles et ecclésiastiques défilaient dimanche dans une atmosphère de grande émotion au Caire devant la dépouille de Chenouda III, chef de l'Eglise copte orthodoxe décédé après quatre décennies à la tête de la plus grande communauté chrétienne du Moyen-Orient.

Disparu samedi à l'âge de 88 ans, le patriarche laisse des fidèles inquiets face aux violences les visant et devant la montée de l'islamisme, plus d'un an après la chute du président Hosni Moubarak.

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Des milliers de coptes pleurent la mort du patriarche Chenouda III

Son corps, portant une tiare et revêtu d'habits sacerdotaux richement ornés, a été disposé assis sur un trône de bois sculpté dans la cathédrale Saint Marc du Caire, siège de l'église copte, où la messe de funérailles sera célébrée mardi.

Vêtus de noir, de nombreux fidèles étaient en larmes. Certains prenaient à l'aide leur téléphone portable une dernière photo de leur chef spirituel. Un évêque était à genoux la tête appuyée sur le trône.

Des milliers de personnes avaient commencé à se presser samedi soir à la cathédrale dans une atmosphère de tristesse et de recueillement.

"Le pape était un homme sage. Il était le père de tout le monde, homme, femme, veuve ou orphelin. Nous avons traversé bien des crises, et il a à chaque fois été source de sagesse. Il a prié pour nous contre l'oppression", déclarait Emil Essam, 28 ans.

"Il était comme mon père. Il avait l'esprit large. Il n'y aura personne comme lui à l'avenir", affirmait pour sa part Isaac Zakaria, un fidèle âgé de 18 ans venu à la cathédrale.

De nombreuses personnalités musulmanes ainsi que le pouvoir militaire lui ont rendu hommage, alors que la presse reflétait l'émotion suscitée par la disparition de ce religieux dont la silhouette fragile était familière aux chrétiens comme aux musulmans.

"L'Egypte a perdu un de ses plus grands hommes", a déploré Al-Azhar, plus haute institution de l'islam sunnite, regrettant dans un communiqué "la grande perte d'un ami cher".

Son décès est "une grave calamité qui afflige l'Egypte tout entière et son noble peuple, musulmans et chrétiens", a déploré le mufti Ali Gomaa. Le Parti de la liberté et la justice, issu des Frères musulmans, a salué son "grand rôle" en Egypte.

"L'Egypte pleure", titre le quotidien indépendant Al-Masry al-Youm, tandis que Al-Ahram (gouvernemental) écrivait: "Adieu, pape Chenouda".

Conformément à ses voeux, l'inhumation du patriarche aura lieu au monastère de Saint Bichoï, à Wadi Natroune, entre Le Caire et Alexandrie (nord).

L'évêque Pachomius (Pachôme) de la province de Beheira (delta du Nil), doit assurer sa charge pendant deux mois, en attendant la désignation d'un successeur.

Le processus, sans limite de temps, avait pris sept mois entre la mort de Cyrille VI et la nomination de Chenouda III en 1971.

Les évêques coptes d'Egypte et du reste du monde ont pris le chemin du Caire pour participer aux obsèques et aux préparatifs en vue du choix du nouveau chef de cette Eglise orthodoxe, selon la presse.

Les Coptes représentent 6 à 10% des quelque 82 millions d'Egyptiens, une communauté confrontée à la monté de l'islamisme dans ce pays en grande majorité musulman sunnite.

Diminué par l'âge et la maladie, Chenouda III souffrait de problèmes hépatiques et de tumeurs pulmonaires, avant d'être frappé samedi par une attaque cardiaque.

Très conservateur sur les questions de dogme -il était farouchement opposé à tout assouplissement de l'interdiction du divorce chez les Coptes-, le patriarche était aussi considéré comme un ardent défenseur des droits de sa communauté.

Partisan du président Moubarak, puis conciliant avec le pouvoir militaire qui a pris sa succession, il est apparu en décalage avec les Coptes ayant participé à la grande révolte contre le régime (janvier-février 2011).

Il était toutefois considéré par de nombreux Egyptiens comme un élément de stabilité dans un pays en plein bouleversement, à l'avenir politique toujours incertain.

Le raz-de-marée des partis islamistes aux récentes législatives a, malgré les assurances de nombreux responsables musulmans, avivé les craintes de la communauté copte, marginalisée et cible de violences parfois meurtrières.

Benoît XVI a rendu hommage à un "grand pasteur, et le président américain Barack Obama a salué la mémoire d'un "avocat de la tolérance et du dialogue religieux".

Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Ami Abdollahian, a salué son action "en faveur de la justice et de la paix".