Alors que l'Éducation nationale souffre des suppressions de postes (80 000 depuis 2007), les candidats semblent vouloir courtiser le corps enseignant, avec force propositions, cherchant à remédier à un manque de moyens devenu flagrant.
Qui peut penser que l'on va répondre aux attentes en créant 60 000 postes comme si tout pouvait se réduire à une question de quantité ? Si le nombre d'enseignants était le problème, nous devrions avoir la meilleure école du monde", a ironisé Nicolas Sarkozy mardi lors d’un meeting à Montpellier, faisant référence, sans le nommer, à la promesse de François Hollande que les ténors de la majorité avait taxée "d'irréaliste".
Quant à lui, il propose aux enseignants certifié (titulaires du Capes), de travailler plus pour gagner davantage sur la base du volontariat.
"Je propose que, désormais, tout enseignant qui voudra travailler plus puisse le faire avec 26 heures de présence dans l'établissement au lieu de 18 heures de cours (pour un professeur certifié, ndlr), avec en contrepartie une augmentation de son traitement de 25 %, soit près de 500 euros net par mois", a affirmé le candidat à la présidentielle.
Avec cette mesure, Nicolas Sarkozy espère notamment palier aux suppressions de postes. "Comment faire quand, pour réduire nos déficits, il faut diminuer les effectifs en continuant d'appliquer la règle du 1 sur 2 aux collèges et aux lycées ? Il n'y a qu'une seule solution : faire travailler les enseignants plus longtemps en les payant davantage", a-t-il ainsi justifié.
"Travailler plus pour gagner moins" ?
Les principaux syndicats d’enseignants, et notamment la FSU, l’Unsa et la CFDT, ont aussitôt dénoncé une "duperie" et une proposition "décalée" et "improvisée".
Contacté par France 24, Luc Bentz, secrétaire national de la fédération UNSA éducation, l’un des principaux syndicats d’enseignants, accueille avec la plus grande froideur cette proposition qui, pour lui, comporte de multiples risques.
"Pour 18 heures de cours, il faut compter environ 40 heures de travail hebdomadaire en moyenne", explique-t-il. Il évoque les longues heures de préparation et de correction de copie, mais aussi d’échange entre professeurs. "Alors, avec 26 heures par semaine, on risque d’avoir des enseignants en surcharge professionnelle et la qualité de l’enseignement peut s’en ressentir", a-t-il dénoncé, rappelant que c’est un cas de figure qui n’est pas inédit. "Dans certains établissements, où des postes ont été supprimés, les enseignants se sont organisés pour combler les trous en faisant des heures supplémentaires, et la charge de travail est telle qu’ils sont épuisés."
Il explique en outre que loin de travailler plus pour gagner plus, cette proposition "rimera réellement pour les enseignants à travailler plus pour gagner moins, parce que le système actuel de rémunération des heures supplémentaires et plus avantageux que les 25% d’augmentation proposés."
Avec ces nouvelles propositions, Luc Bentz se souvient surtout de celles que Nicolas Sarkozy avait émises lors de la campagne de 2007, et notamment de mettre fin aux suppressions de postes et d’augmenter les salaires,"et qui n'ont toujours pas été tenues".
Duel de propositions sur l’éducation
Que ce soit de gauche et de droite, l'éducation semble être devenue l'un des sujets centraux de la campagne. Avant Nicolas Sarkozy, François Hollande avait beaucoup fait parlé avec sa proposition de création de poste, contrastant avec les suppressions en vigeur.
Or, cette mesure de même que la volonté du candidat socialiste de centrer les efforts de son équipe sur l’école maternelle et primaire, semble susciter peu de critiques dans le milieu enseignant. "C’est sûr que c’est plus simple avec des postes en supplémentaires", reconnaît Luc Bentz, heureux de constater que l’éducation est au cœur de la campagne - contrairement à 2007.
Mais pour lui, "tout n’est pas qu’une question de moyen". "Il faut avant tout rendre l’école juste socialement", affirme-t-il. Pour lui trop d’inégalités subsistent, notamment au plan géographique.
Il estime en outre que la première des priorités est de "reconstruire la formation des enseignants, essentielle". "La suppression de l’année de stage, [pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, ndlr] n’a eu que des conséquences catastrophiques", dénonce-t-il. Et de conclure : "Bien maîtriser le savoir ne suffit pas, il ne suffit pas de vouloir le transmettre. Enseigner, c'est un métier."
A la rentrée 2012, 14 000 postes doivent encore être supprimés dans l’Education nationale. Au total, entre 2007 et 2012, le secteur aura été amputé de 80 000 postes.