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Après un an d’existence, le Mouvement du 20-Février veut devenir un parti politique

Pour son premier anniversaire, le Mouvement du 20-Février a organisé des rassemblements au Maroc dimanche. L’occasion d’évoquer la création de son propre parti politique avec Zineb Belmkaddem, militante du projet, Parti pirate Maroc (photo).

Pour son premier anniversaire, l’heure est au bilan pour le Mouvement du 20-Février (M20). Menacée par le poids des désillusions et le manque de soutien, l’incarnation marocaine du printemps arabe doit se trouver un avenir. Les Marocains "n’ont pas assez de choix en terme de partis politiques", constate Zineb Belmkaddem, une militante active. Le M20 ambitionne donc désormais de devenir le Parti pirate du Maroc – en référence au Parti pirate suédois fondé en 2006 et qui est devenu en quelques années l'un des partis phares du pays. Une organisation politique qui place l'Éducation, la Culture, la transparence de l’action publique et la protection des données des individus au centre de son projet de société.

Depuis un an, le Mouvement s’est illustré par le biais de manifestations massives, revendiquant l’instauration d’une monarchie parlementaire à l’image de l’Espagne et l’éradication de la corruption. Ces mois de protestation ont abouti à un train de réformes amorcé par le roi Mohammed VI : une nouvelle Constitution a été adoptée en juillet et la tenue d’élections législatives en novembre a vu la victoire des islamistes modérés du parti Justice et Développement (PJD).

Mais ces changements sont jugés insuffisants, selon l’activiste, pour qui le gouvernement est à la solde du cabinet royal. Après sa victoire aux législatives, le chef du nouveau gouvernement, Abdelillah Benkirane, a appelé au "dialogue au plus tôt" avec le M20. Un appel resté pourtant lettre morte, les militants affirmant leur refus de négocier avec ceux qu’ils accusent d’entretenir le statu quo. En opposition avec le pouvoir actuel, Zineb Belmkaddem annonce vouloir "faire de la politique à la Wikipédia", comprendre de la politique participative ouverte au plus grand nombre.

FRANCE 24 : Un an après la naissance du M20, quel bilan tirez-vous de votre action ?
Zineb Belmkaddem :
Le M20 a chamboulé la scène politique au Maroc. Les choses sont en train de changer et c’est grâce à nous. Néanmoins, je ne suis pas satisfaite.

Dimanche 19 février, pour l’anniversaire du Mouvement, on s’attendait à davantage de manifestants dans les rues, notamment à Casablanca – au nombre de 150, selon le ministère de l'Intérieur. Il nous faut nous réinventer, on ne peut pas continuer de cette façon car cela ne fonctionne pas. Nous n’avons pas réussi à convaincre M. et Mme Toutlemonde.

F24 : Comment l’expliquez-vous ?
Z.B. : Le PJD a profité de nos protestations pour se mettre en avant, il a réutilisé nos slogans, comme par exemple, ceux concernant la bataille contre la corruption, ils les ont littéralement volés pour faire campagne. Aujourd’hui, il est temps que nos idées nous reviennent.

F24 : À quoi va ressembler l’avenir du Mouvement ?
Z.B. : Même si je le défends toujours, je fais partie de ceux qui sont entrés dans une phase de transition. Il est temps de réfléchir à une manière plus attrayante de s’adresser aux Marocains. De nouvelles initiatives doivent être lancées pour déstabiliser le système corrompu. C’est pour cela que nous voulons fonder le Parti pirate du Maroc, qui sera le seul parti en réelle rupture avec la politique actuelle. D’ici l’horizon 2016, pour les législatives, nous devrions avoir effectué une percée.

F24 : Concrètement, comment le Parti Pirate du Maroc va-t-il se démarquer de la politique actuelle ?
Z.B. : Le nouveau Premier ministre reçoit des directives du roi, il n’y a aucune différence

entre lui et ses prédécesseurs. Le PJD avait d’ailleurs prévenu qu’ils ne tiendraient pas tête au souverain. Où est le changement ? Des textes de loi anticonstitutionnels sont en train d’être adoptés, favorisant par exemple l’amplification du pouvoir exécutif de Mohammed VI. L’accès à l’élaboration de ces textes de lois par le biais d’un processus participatif n’est pas possible aujourd’hui. Nous, nous voulons faire de la politique "Wikipédia", c’est-à-dire intégrer le plus de personnes possibles aux prises de décisions. Ce sera bien évidemment basé sur le mérite, les sources et les compétences. Grâce à ce système, une gouvernance participative frôlant la démocratie directe pourra voir le jour au Maroc.

Tags: Mohammed VI, Maroc,