
Les dernières mesures d’austérité adoptées par la Grèce visent essentiellement les bas salaires. Un plan qui donne l'impression que les riches passent entre les mailles du filet de la rigueur.
“Les riches aussi doivent payer”. Les Grecs qui ont défilé à Athènes dans la nuit de dimanche à lundi, pendant que le Parlement adoptait les dernières mesures d’austérité proposées par le gouvernement, n’avaient pas que le Fonds monétaire international (FMI) et les voisins de l’Union européenne (UE) dans leur collimateur. Ils exprimaient également un sentiment d’injustice à l’égard des classes favorisées grecques qui ne paieraient pas, selon eux, le même tribut à l’austérité que les plus démunis.
Un ressenti a priori justifié. La mesure phare du nouveau plan d’austérité adopté par le pays est la réduction drastique de 22 % du salaire minimum. D'où l'incrédulité de certains Grecs qui se demandent pourquoi certaines catégories, considérées comme privilégiées, sont passées à travers toutes les mesures de rigueur mises en place depuis le premier plan de sauvetage international décidé au printemps 2010.
La puissante Église orthodoxe est ainsi régulièrement pointée du doigt. Avec des revenus estimés - et jamais confirmés par l’Église - de 700 milions d’euros et un impôt officiellement payé de 2,5 millions d’euros en 2010, elle n’aurait donc acquitté qu’un impôt de 0,35 % . Certaines professions, telles que les fameux armateurs grecs, mais encore les avocats, les médecins et les pharmaciens, profitent d'un régime fiscal très favorable qui n'a toujours pas été remis en cause.
Mais ces cas particuliers ne doivent pas occulter le fait que les mesures d’austérité en Grèce ont, à en croire une étude de la Commission européenne paru en novembre 2011, permis de réduire les inégalités. Un état de fait confirmé par les travaux de l’économiste grec Matsaganis Manos qui a calculé, en décembre 2011, que les Grecs les plus riches ont contribué à hauteur de 35 % aux efforts d’austérité contre environ 6 % pour les plus pauvres. “Par rapport à 2009, ceux qui paient les plus d’impôts ont perdu 4344 euros (-18 %) par an, tandis que les plus démunis gagnent 313 euros (-2 %) en moins par an”, écrivait-il en décembre dans une note d’analyse adressée à la Commission européenne.
Pour cet économiste, ce tribut payé par les Grecs aisés s’expliquent surtout par le choix du gouvernement d’augmenter prioritairement les impôts sur les revenus qui est “l’imposition la plus progressive” et frappe donc davantage les plus riches. Il note aussi que toutes les mesures qui ont ciblé la fonction publique (réforme des retraites, baisse des salaires, etc.) “affecte une catégorie de la population, les fonctionnaires, qui appartient à la classe moyenne supérieure et aisée en Grèce”.
De principaux pays de l’UE qui ont pris des mesures d’austérité pour tenter de réduire leur déficit, seul le Portugal a connu une progression des inégalités due à la rigueur, selon la Commission européenne. Ironiquement, dans ces recommandations à la Grèce pour son nouveau plan d’austérité, le FMI a préconisé, la semaine dernière, qu’Athènes prenne exemple sur Lisbonne pour améliorer la compétitivité de ses entreprises...