Le Conseil constitutionnel sénégalais a confirmé dimanche la liste des candidats autorisés à se présenter à la présidentielle du 26 février. Le président sortant Abdoulaye Wade pourra briguer un 3e mandat, malgré les protestations de l'opposition.
AFP - Le Conseil constitutionnel du Sénégal a confirmé dans la nuit de dimanche à lundi la liste des candidats à la présidentielle de février qu'il avait publiée vendredi, sur laquelle figure le chef de l'Etat Abdoulaye Wade, ce qui avait provoqué des violences.
Le Mouvement du 23 juin (M23, opposition politique et société civile), a appelé "à un rassemblement pacifique" mardi à Dakar contre la candidature du président Abdoulaye Wade à la présidentielle du 26 février.
Dans son arrêt, le Conseil stipule que les requêtes présentées par des opposants pour l'annulation de la candidature de M. Wade et celle de ce dernier contre trois de ces opposants sont "recevables", mais "non fondées".
Le Conseil constitutionnel devait se prononcer sur les recours en annulation de la candidature Wade déposés par sept candidats d'opposition qui la jugeaient non conforme à la Constitution, affirmant qu'élu en 2000, réélu en 2007, M. Wade, 85 ans, a épuisé ses deux mandats légaux.
Le camp du chef de l'Etat récuse cet argument, arguant de réformes de la Constitution en 2001 et 2008 qui lui permettraient de se représenter.
Le président sortant avait également saisi le Conseil pour obtenir l'invalidation de la candidature de trois de ses opposants, d'anciens proches.
Il s'agit de deux de ses ex-Premier ministres, Macky Sall et Idrissa Seck, et de son ancien ministre des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, auxquels il était demandé de produire un document prouvant qu’ils sont en règle avec l’administration fiscale.
Autre recours, celui du chanteur Youssou Ndour qui récusait l'invalidation de sa propre candidature par le Conseil, au motif qu'il n'avait pas présenté un nombre suffisant de signatures valides pour le soutenir. Sa requête a également été jugée non fondée.
"Le Sénégal a honte. Le Sénégal est meurtri. Le processus de coup d'Etat constitutionnel est consommé. 52 ans de construction démocratique viennent d'être balayés", a déclaré lundi matin Youssou Ndour interrogé par la radio française RFI.
"J'appelle, donc, toutes les forces vives de ce pays, nos frères africains, la communauté internationale a exprimé son désaccord face à ce coup d'Etat institutionnel et constitutionnel. Le combat continue, parce que dieu est avec les justes", a lancé le chanteur sur les ondes de Radio France Internationale.
De graves violences (un policier tué, plusieurs personnes blessés, des émeutes) s'étaient produites dans la nuit de vendredi à samedi à Dakar et en province à la suite de l'annonce de la validation de la candidature de M. Wade.
Passons aux actes
"La décision du Conseil ira toujours dans le sens voulu par le pouvoir", avait affirmé dimanche Abdoul Aziz Diop, un des responsables du Mouvement du 23 juin (M23, opposition politique et société civile).
Ce mouvement, qui regroupe les principaux candidats d'opposition à la présidentielle, a appelé à "la résistance active" contre la candidature du président sortant, qualifiée de "coup d'Etat constitutionnel".
Dimanche, lors d'une conférence de presse de ses leaders, Thiat, rappeur du mouvement de jeunes "Y'en a marre", a affirmé que les "paroles suffisent, nous passons aux actes". Des manifestations de rue sont prévues dans la semaine.
Dans une déclaration commune, le M23 affirme que ses dirigeants et militants "sont prêts à tous les sacrifices".
Militant reconnu et respecté pour la défense des droits de l'homme en Afrique, Alioune Tine, coordinateur du M23, arrêté samedi comme des dizaines d'autres militants du mouvement, était toujours entendu dans la nuit de dimanche à lundi par la police à Dakar sur son rôle présumé dans ces violences.
Une cinquantaine de personnes, dont des leaders M23, tels qu'Idrissa Seck et Cheikh Tidiane Gadio, se sont regroupés dimanche soir devant le commissariat central de Dakar pour exiger sa libération et présenter leurs condoléances pour la mort du policier tué vendredi soir.
Par ailleurs, plusieurs sites d'information en ligne du Sénégal étaient devenus inaccessibles dimanche, selon l'association qui les représente qui note la coïncidence avec un "contexte très tendu", en se gardant toutefois "d'accuser qui que ce soit" pour l'instant.