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Le vin français est-il vraiment dans le rouge ?

Les derniers rapports alarmistes sur l’état de santé de la filière viticole française, publiés après une année 2008 contrastée, font craindre le pire pour le secteur. Pourtant, malgré la crise, la situation est loin d'être catastrophique.

"En France, c’est Dieu qui fait le vin ; ailleurs, ce sont les hommes." Ce célèbre adage de Patrick Ricard, le président du groupe Pernod-Ricard, en dit long sur la fierté du monde viticole de l’Hexagone. Le prestige et la notoriété internationale des grands vins français demeurent inégalés. Pourtant, depuis plusieurs mois, les rapports et les échos sur l’état de santé de la filière viticole française sont alarmistes, après une année 2008 contrastée et marquée par une production historiquement faible.

Après avoir cédé sa place de premier exportateur de vin en 2005, puis de premier consommateur en 2007, la France a abandonné ses lauriers de premier producteur mondial (en volume), en 2008. Ces trois médailles d’or ont toutes été récupérées par l’Italie. Faut-il s’alarmer de ce bilan ? Le secteur, un des fleurons de la culture française, qui emploie directement  250 000 personnes, est-il vraiment en crise ?

"Il faut relativiser les chiffres de l’année 2008 par rapport à ceux de 2007, qui fut une année exceptionnellement riche en records. Effectivement, les résultats sont en recul, mais nous restons au niveau de l'execice 2006", tempère Fréderic Dupray, responsable d’études économique au Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVP).

"L’exercice 2008 a été une bonne année pour les sociétés de négoce, même si cela ne s’est pas vérifié du côté des viticulteurs", précise Robert Beynat, directeur et cofondateur du salon professionnel des vins et spiritueux Vinexpo.

La crise frappe les deux principaux marchés que sont les Etats-Unis et le Royaume-Uni


Les observateurs attendent cependant avec appréhension les chiffres du premier semestre de 2009. Selon la Fédération des exportateurs de vins et spiriteux (FEVS), le ralentissement observé au dernier trimestre 2008, "ne fait que préfigurer la situation attendue pour 2009".

Les exportations de vins français qui représentaient, avec les spiritueux, 2% du total des exportations de l'Hexagone en 2007, ont pâti cette année des effets de la crise financière , enregistrant une baisse de 0,3% . Les États-Unis et la Royaume-Uni, qui sont parmi les principaux clients de la filière, subissent de plein fouet les conséquences de la crise. "La situation est inquiétante car le marché britannique, qui est un des plus grands importateurs de vin et le premier marché pour la plupart des vignobles français, est le plus touché", affirme Fréderic Dupray, du BIVB.

Les vignerons français misent sur la qualité pour s'en sortir

Quid de la situation globale ? Elle est inquiétante, oui - car près de 40% de la production hexagonale est destinée à être vendue à l'étranger -, mais pas dramatique.  Selon Hervé Henrotte, chef de projet vins et spiritueux chez Ubifrance, l’Agence française pour le développement international des entreprises, "le ralentissement des exportations provoqué par la crise mondiale aurait pu être plus grave en 2008. Faute de visibilité, rien n’indique pour l’instant que 2009 sera du même cru."

Dans un climat de concurrence exacerbée, la France reste leader de l'exportation en valeur, avec 6,76 milliards d'euros, contre 4,4 milliards pour l'Italie. En effet, les vignerons français misent sur la qualité plutôt que sur le volume, contrairement aux Transalpins qui exportent en majorité du vin de table. « La récolte 2008 a été faible, il y aura par conséquent un petit volume à commercialiser et pas de problème de gestion des stocks, c’est une chance vu la conjoncture », estime Hervé Henrotte. Un alliage entre qualité et rareté qui pourrait offrir de belles perspectives au millésime 2008.