Toulouse a été le théâtre d’un face-à-face tendu samedi soir entre catholiques intégristes et partisans de la liberté d’expression autour de "Golgota Panic", un spectacle réputé pour sa lecture provocante des Évangiles.
AFP - Catholiques intégristes et défenseurs de la liberté d'expression, séparés par un imposant dispositif policier, se sont mesurés à distance samedi soir à Tolouse, les uns pour désigner le spectacle "Golgota Picnic" à la vindicte publique, les autres pour faire barrage à ce qu'ils considèrent comme de l'obscurantisme religieux.
Un cordon d'environ 200 CRS, gendarmes mobiles et policiers, s'était déployé autour du rassemblement des intégristes, soumis à des tentatives de provocation de petits groupes de jeunes, et les forces de l'ordre intervenaient ponctuellement pour éviter que ces tentatives ne dégénèrent.
Car le glacis mis en place par les autorités entre les ultra-catholiques et les défenseurs de la liberté d'expression n'a pas empêché ces groupes de jeunes de venir scander auprès des catholiques en prière des slogans provocateurs comme "Néron revient, y'a encore des chrétiens" ou "deux planches, trois clous, voilà la solution".
Environ 750 personnes, d'après la police, 2.000 selon les organisateurs, chantaient des chants chrétiens et priaient à genoux au pied de l'église de la Daurade, à bonne distance du Théâtre Garonne, où se joue la pièce loufoque et désespérée de l'Argentin Rodrigo Garcia jusqu'à dimanche, avant d'être jouée au Théâtre du Rond-Point à Paris en décembre.
Une grande banderole brandie parmi les lumignons annonçait la couleur: "La France est chétienne et doit le rester".
"Golgota Picnic" et la lecture provocante qu'il donne des Evangiles concentrent, depuis leur arrivée en France mercredi et même avant, l'indignation exprimée depuis plusieurs semaines par les intégristes catholiques devant des spectacles qu'ils jugent blasphématoires.
"Les catholiques de France sont de plus en plus nombreux à être exaspérés par cette christianophobie ambiante", a dit à l'AFP Alain Escada, secrétaire général de l'Institut civitas, porte-étendard de la révolte à l'origine de la manifestation.
"Que l'on traite le Christ de putain de diable, qu'on le rende responsable du terrorisme, que l'on se moque de la crucifixion d'une façon aussi sordide, quasiment pornographique, c'est le comble de l'ignominie", a ajouté le secrétaire général de cette organisation qui se défend de toute proximité avec l'extrême droite.
Comme elles l'avaient fait mercredi, des formations de gauche et d'extrême gauche ainsi que des organisations culturelles avaient appelé à former auprès du théâtre une chaîne de solidarité et de protection contre une censure moyenâgeuse que voudraient imposer, selon eux, des catholiques proches de l'extrême droite.
Entre 400 et 500 défenseurs de la liberté d'expression étaient ainsi réunis devant le théâtre, selon la police.
"Des groupes se sentent de plus en plus autorisés à essayer d'imposer leur loi, nous sommes là pour leur dire qu'en France, il n'y a qu'une loi, c'est la loi de la République", a expliqué Pascal Nakache, président de la Ligue des droits de l'homme de Toulouse.
Avant "Golgota Picnic", c'est une autre pièce, "Sur le concept du visage du fils de Dieu" de l'Italien Romeo Castellucci qui s'est attiré les protestations des catholiques intégristes.
"Golgota Picnic", sa scène de crucifixion trash, sa peinture du Christ qualifié de "putain de diable", son long épilogue musical interprété par un pianiste nu sur scène, sont une insulte à la foi des chrétiens, disent-ils.
Plusieurs dizaines d'entre eux ont chaque soir mis en scène des chemins de croix, chanté des cantiques et récité des prières à genoux auprès du Théâtre Garonne.
Le spectacle, qui affiche complet tous les soirs, n'a pas été perturbé jusqu'alors.
Après Toulouse, Civitas prévoit des rassemblements quotidiens devant le Théâtre du Rond-Point, avec le dimanche 11 décembre la "manifestation la plus importante" de cette mobilisation.