avec dépêches – La crainte de voir la Grèce sortir de la zone euro hante de nouveau les esprits, après que le Premier ministre grec a annoncé, lundi, la tenue d’un référendum sur le plan de sauvetage élaboré fin octobre à Bruxelles.
Si le Premier ministre grec semble optimiste quant à l’issue du référendum sur le plan de sortie de crise, arraché de haute lutte à Bruxelles le 27 octobre dernier, il n’est pas loin d’être le seul sur la scène européenne.
L'annonce de lundi, qui a fait l'effet d'une petite bombe, relance le débat sur une sortie de la Grèce de la zone euro. L’éventualité d’un "non" grec ravive le spectre d’une faillite du pays et fait craindre un effet boule de neige sur l’ensemble des dix-sept membres de l'eurozone. Les marchés, que le plan de sortie de crise voté à Bruxelles était parvenu à rassurer, ont immédiatement dévissé mardi. Ils peinaient à rebondir mercredi.
Stupeur et tremblement dans la zone euro
Paris et Berlin, éberlués, n’ont pas non plus tardé à réagir. Après un entretien téléphonique mardi, la chancelière allemande, Angela Merkel, et le président français, Nicolas Sarkozy, ont convoqué le Premier ministre grec, Georges Papandréou, à une réunion d’urgence mercredi soir, préliminaire au sommet des chefs d’État et de gouvernement du G20, du 3 et 4 novembre, à Cannes.
Ils devraient faire pression sur Papandréou afin qu'il soumette le plan de sauvetage au vote du Parlement grec avant le référendum controversé, selon une source gouvernementale européenne citée par l'agence de presse AFP.
"Si le vote de confiance de vendredi passe" au Parlement, "on peut imaginer que les parlementaires grecs adoptent formellement le plan de sauvetage avant l'organisation du référendum", a ajouté cette source.
"Si les Grecs acceptent le fardeau et les efforts exigés par les programmes d’aide, s’ils veulent demeurer dans la zone euro, ils soutiendront le plan", a affirmé le ministre allemand des Finances, Wolfang Schaüble dans les colonnes du Financial Times, publié mercredi 2 novembre. Une menace à peine voilée : pour le ministre allemand, si le peuple rejetait le plan de sauvetage, la Grèce se retrouverait en faillite et les pays de la zone euro pourraient, afin d’éviter un effondrement de toute la zone, envisager une sortie du pays de la monnaie commune.
Le plan ne plaît pas aux Grecs
Or, selon plusieurs sondages d’opinion, les électeurs grecs risquent fort de voter contre le plan concocté par Bruxelles. Il impose en effet à la Grèce de réaliser de nouvelles économies, impliquant l’adoption de nouvelles mesures d’austérité qui pèseront lourdement sur les épaules des citoyens. À la mi-octobre, cette perspective avait provoqué une gigantesque mobilisation dans les rues des principales villes du pays, mettant encore un peu plus de pression sur le gouvernement de Georges Papandréou.
Mais le plan de sauvetage de la Grèce inclut également des aides importantes de l’Union européenne et des banques. Il prévoit notamment une réduction de la moitié de sa dette supportée par des banques privées et un nouveau programme de prêts internationaux. "Ce plan d’aide est d’une nature différente des trois précédents", analyse Guillaume Duval, rédacteur en chef du magazine Alternatives Économiques, sur le plateau de FRANCE 24. "C’est le premier qui prend en compte les difficultés des plans précédents avec une restructuration très significative de la dette. Donc ce serait dommage que ce soit celui-ci qui échoue", poursuit-il.
"L’idée que la Grèce sorte de l’euro est une idée très dangereuse : Que se passera-t-il si les Grecs reviennent à la drachme, très dévaluée par rapport à l’euro ? Annuleront-ils leur dette, ce qui les mettrait purement et simplement au ban des nations pendant des décennies ?", s’interroge également Guillaume Duval. "C’est aussi très dangereux pour les Européens, parce qu’elle implique un grand risque de contagion concernant l’Italie, l’Espagne, etc… Si l’idée que les pays qui sont en crise vont sortir de l’euro se répand, on basculera probablement dans quelque chose de catastrophique".
"Les plans d’austérité précédents étaient mal faits"
Ilios Yannakakis, historien et politologue grec, interrogé par FRANCE 24 se refuse au catastrophisme. "Nous avons quatre mois jusqu’au référendum [il pourrait se tenir entre décembre et janvier prochain]. Le travail qui sera fait à partir de maintenant par l’Europe vis-à-vis de la Grèce sera déterminant. Je ne pense pas que le gouvernement soit à ce point frivole pour, avant l’annonce d’un référendum, ne pas avoir pris en considération ce qui va se passer durant ce laps de temps. Et je ne pense pas que les Grecs veulent sortir de la zone euro et se mettre à dos l’Europe", estime-t-il.
Pour Olivier Lecomte, professeur à l’École Centrale de Paris, la décision d’organiser un référendum sur le plan de sauvetage de la Grèce tombe mal, "à un moment où il faut montrer de la cohésion". Mais il estime que les plans d’austérité décidés précédemment, et actuellement en place, "sont stupides, mal faits et ont plongé la Grèce dans un état de récession". "Si on veut que la Grèce reste dans la zone euro, il faudra envisager des transferts d’argent très substantiels pour aider le pays à gagner en compétitivité, assure-t-il. Ce qui compte, c’est de rassurer les marchés et les investisseurs."