En Cisjordanie mais surtout à Gaza où 200 000 personnes se sont rassemblées, une foule en liesse a accueilli les premiers prisonniers palestiniens échangés mardi matin par Israël contre le soldat Gilad Shalit.
AFP - Les Etats-Unis ont fait part à Israël de leur "inquiétude" au sujet de certains des prisonniers palestiniens libérés en échange du soldat israélien Gilad Shalit, a admis le département d'Etat mardi.
Interrogé sur le point de savoir si l'administration américaine avait alerté Israël sur la dangerosité de certains détenus, ou si elle avait fait valoir son désaccord sur leur libération, le porte-parole du département d'Etat, Mark Toner, a répondu: "Les deux".
"Je ne veux pas trop entrer dans le détail de nos préoccupations. J'ai dit que nous avions des inquiétudes dans les deux domaines", a-t-il ajouté en réponse à la nouvelle question d'un journaliste.
Un premier contingent de près de 500 prisonniers palestiniens a été libéré mardi en échange du soldat franco-israélien, et Washington a "communiqué [sa] position au gouvernement israélien après avoir consulté la liste, a indiqué M. Toner.
Mark Toner a précisé qu'à sa connaissance, les réserves américaines n'ont pas eu d'incidence sur la libération des prisonniers.
La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait auparavant salué depuis Tripoli "la fin de la longue épreuve" subie par Gilad Shalit.
AFP - Acclamés, photographiés sous tous les angles par les téléphones portables, portés en triomphe par leurs admirateurs, les prisonniers palestiniens libérés ont reçu mardi à Gaza un accueil digne d'icônes populaires.
Quelque 200.000 Palestiniens ont déserté les rues du centre de Gaza pour se masser sur la place de la Katiba et attendre leurs héros, dans une marée ondulante de drapeaux verts, jaunes, blancs et rouges, aux couleurs des mouvements palestiniens, Hamas islamiste et Fatah nationaliste en tête.
A l'arrivée du convoi de 296 détenus, plus de cinq heures après leur entrée dans le territoire palestinien, adolescents et jeunes hommes se détournent aussitôt des groupes omniprésents de combattants du Hamas, les Brigades Ezzedine al-Qassam, qui paradent, cagoulés de noir et armés de lance-roquettes RPG et de Kalachnikov, à l'arrière de pick-up.
La foule fête ses héros, les entoure, avant qu'ils ne montent sur l'immense estrade installée pour l'occasion, en compagnie du chef du gouvernement du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh.
A la tribune est accroché un portrait géant du chef spirituel du Hamas, cheikh Ahmad Yassine, assassiné en 2004 par l'armée israélienne, entre deux fresques évoquant l'enlèvement de Gilad Shalit, échangé contre les prisonniers palestiniens, avec l'inscription "par la résistance nous triomphons".
"Le monde entier se préoccupe du sort d'un soldat israélien mais pas de 5.000 prisonniers palestiniens", s'indigne Oum Mohammad, une institutrice, voilée venue avec ses trois enfants, sans pour autant déplorer la disproportion des termes de l'échange: 1.027 détenus palestinien contre un soldat israélien.
"Il aurait fallu l'échanger contre les 5.000 prisonniers", estime-t-elle.
"C'est un très beau jour pour nous de voir les prisonniers libres parce que nous pensions qu'ils mourraient dans les prisons israéliennes", explique Haj Saleh Hammouda, 63 ans.
Le convoi de huit bus était entré en fin de matinée par le terminal de Rafah, à la frontière avec l'Egypte. Trois véhicules des Brigades Ezzedine al-Qassam, suivis d'un de la Croix-Rouge, ouvraient la marche.
Au même moment, en Cisjordanie, un convoi d'autobus a acheminé 117 détenus à Ramallah, pour un accueil officiel par le président Mahmoud Abbas, qui a rendu hommage aux "sacrifices et aux efforts" des prisonniers.
"Par la grâce de Dieu, nous verrons tous les prisonniers, hommes et femmes, rentrer dans leur patrie", a assuré M. Abbas dans un discours.
A Rafah, où les attendaient quelques centaines de leurs proches et de dignitaires, dont Ismaïl Haniyeh, les prisonniers ont salué la foule avant de descendre des bus, certains se prosternant sur le sol.
Ils ont embrassé les personnes venues les accueillir, au milieu d'une haie d'honneur, sous des jets de pétales de fleurs, après avoir reçu une décoration aux couleurs du drapeau palestinien.
"C'est une joie indescriptible de voir mes enfants", s'est exclamé Raëd Abou Lebdeh, condamné à quatre peines à perpétuité, dont il a purgé 13 ans, étreignant sa fille Mariam, 13 ans, qu'il n'avait jamais vue.
"Je suis triste que les autres prisonniers ne soient pas encore sortis mais nous les libérerons bientôt", a-t-il affirmé.
"J'ai l'impression de naître aujourd'hui, c'est la première fois que je vois mon père et que je l'embrasse", a sangloté sa fille.
A Gaza, à la devanture des boutiques de drapeaux, fidèle baromètre de l'opinion publique, les étendards palestiniens neufs claquaient au vent, reléguant au second plan les drapeaux plus exotiques, de la Turquie au Venezuela, en signe de reconnaissance à leur soutien à la cause palestinienne.
Preuve que cette fois, la "victoire" palestinienne ne doit rien à personne.