logo

Dimanche, les Tunisiens se rendront aux urnes pour élire l’Assemblée constituante. Un scrutin historique dont le parti islamiste Ennahdha est le grand favori. Son chef, Rached Ghannouchi, répond aux questions de FRANCE 24.

"J’espère que nous allons gagner, comme semblent l’indiquer tous les sondages." Lors d'un entretien accordé à FRANCE 24, Rached Ghannouchi, le leader du parti islamiste Ennahdah (renaissance en arabe), s’est montré très confiant sur l’issue du scrutin historique qui se tiendra dimanche en Tunisie.

Intentions de vote à l'élection du 23 octobre

Ennahda : 25%

PDP : 16%

FDTL : 14%

CPR (Congrès pour la République, parti de centre gauche allié à Ennahda): 8%

Afek Tounes : 3%

PDM : 2%

Autres partis (106 autres formations participent à l'élection) : 32%

Sondage réalisé en septembre par l'Observatoire tunisien de la transition démocratique.

Pour consulter le détail du sondage, cliquez ici.

Le pays, locomotive du "printemps arabe", doit en effet élire la future Assemblée constituante, première étape vers un État démocratique, neuf mois après la chute du dictateur Zine El-Abidine Ben Ali, chassé en janvier par un soulèvement populaire. Et si Rached Ghannouchi est si confiant, ce n’est pas seulement parce que les sondages lui prédisent des intentions de vote entre 20% et 30%, mais aussi parce que son mouvement a tout fait pour tenter de l’emporter. Une campagne tout-terrain, des candidats dans chaque région et une notoriété certaine, Ennahdah veut sortir de l’ombre, après avoir été pourchassé et longtemps interdit par le régime Ben Ali.

À l’heure de Facebook

Mais les critiques pleuvent sur ce parti au passé sulfureux qui promeut désormais une image modérée en adéquation avec les idées démocratiques. Ses adversaires l’accusent de tenir un double discours pour dissimuler un agenda radical qu’il n’a jamais renoncé à appliquer. "Nos contradicteurs utilisent la même stratégie que Ben Ali, en brandissant la menace terroriste afin de faire peur à la société. Mais ce discours est dépassé, car la révolution a justement mis un terme à la peur", se défend Rached Ghannouchi, rentré en Tunisie fin janvier après vingt ans d'exil à Londres

Auteur de prêches extrémistes dans les années 1980, le fondateur d’Ennahdah souhaite que son parti soit jugé sur son programme et ses actes et que cessent les procès d’intention. "Nous sommes à l’heure de Facebook, où tout se sait et où tout est public. Ceux qui font des promesses et qui les renieront seront démasqués et plus personne ne leur fera confiance", déclare-t-il. Et d’ajouter : "Or nous comptons gouverner longtemps, pas seulement une année."

Les salafistes sont des citoyens tunisiens

Désavantagé par le mode de scrutin retenu, la proportionnelle au plus fort reste, qui favorise les petits partis, Ennahdah ne pourra pas obtenir la majorité absolue et prône par conséquent un gouvernement de large union. "Il faudra accepter les résultats et nous nous allierons avec tous ceux qui accepteront de s’allier avec nous, pourvu que nous puissions nous entendre sur le programme", explique à France 24 Rached Ghannouchi.
Interrogé sur la fin de campagne électorale qui a été dominée par plusieurs incidents, impliquant des salafistes, comme le saccage du domicile du PDG de Nessma TV - une chaîne de télévision privée -, Rached Ghannouchi a condamné la violence. Mais il estime que la chaîne a provoqué les musulmans en diffusant le 7 octobre le film franco-iranien "Persepolis", jugé blasphématoire car représentant Dieu - ce que l'islam proscrit. "Les salafistes sont des citoyens tunisiens, tant qu’ils respectent la loi, nous sommes avec eux, si au contraire ils s’éloignent de la loi, nous sommes contre eux", conclut-il.