Le conseil d'administration de Dexia Banque Belgique a approuvé lundi la nationalisation des activités de la filiale, première étape du plan de démantèlement de la banque franco-belge. Pour ce faire, La Belgique devra débourser 4 milliards d'euros.
REUTERS - La Belgique, la France et le Luxembourg, au terme d'une nuit de négociations, ont donné lundi matin le coup d'envoi du démantèlement de la banque franco-belge Dexia , premier groupe bancaire européen de grande taille à succomber à la crise de la dette souveraine en zone euro.
A l'issue d'un conseil d'administration de près de douze heures, la banque a approuvé la nationalisation des activités belges, ainsi que le principe d'une vente de la filiale luxembourgeoise et de l'adossement des activités de financement des collectivités locales françaises à la Caisse des dépôts (CDC).
Ce plan comprend aussi 90 milliards d'euros de garanties publiques pour assurer les besoins de financement de l'entité cotée qui restera de l'ancien numéro un mondial du financement des collectivités locales et de son portefeuille obligataire.
Suspendue depuis jeudi, l'action Dexia s'est effondrée à sa reprise de cotation à 14h30, perdant jusqu'à 36% avant de se reprendre une heure plus tard pour gagner 8,88% à 0,92 euro. A ses plus hauts à la fin mai 2007, l'action valait 22,56 euros.
"C'est du fait de la crise au sein de la zone euro que nous avons été obligés de nous adresser de nouveau aux Etats pour éviter la crise systémique d'une banque en Belgique", a expliqué le président du conseil d'administration Jean-Luc Dehaene, lors d'une conférence de presse à Bruxelles.
"S'il n'y avait pas eu ce nouveau facteur externe sur lequel nous n'avons pas d'emprise, je pense que nous aurions réussi", a-t-il ajouté, notant que le premier plan de sauvetage de la banque, en 2008, relevait presque de la "mission impossible".
Pour l'administateur délégué Pierre Mariani, ce sont les les besoins de financement à court terme de Dexia, hérités de l'ancienne direction, qui ont conduit le groupe dans le mur quand la crise de la dette souveraine s'est accélérée.
LA SOLVABILITÉ N'A JAMAIS ÉTÉ UN PROBLÈME
"Ce sont bien les tensions sur la liquidité interbancaire en Europe (...) qui ont précipité les choses dans les derniers jours", a-t-il commenté, notant que des "rumeurs" avaient aussi accru les pressions sur le financement à court terme du groupe.
"La solvabilité du groupe n'a jamais été un problème", a-t-il ajouté, expliquant que l'entité cotée qui restera au terme du processus de démantèlement avait assez de capital pour faire face à une récession.
Pierre Mariani a ajouté qu'il avait peut-être fait preuve de "naïveté" en suivant les recommandations gouvernementales demandant aux établissements bancaires de conserver leur exposition aux emprunts d'Etat des pays de la zone euro.
Interrogés sur une éventuelle démission, Pierre Mariani et Jean-Luc Dehaene ont répondu qu'ils n'envisageaient pas de jeter l'éponge.
"J'ai dit que je n'étais pas du genre à fuir mes responsabilités dans des périodes difficiles, je les assume", a déclaré Pierre Mariani.
"Je ne suis pas de ceux qui pensent que prendre ses responsabilités, c'est démissionner", a renchéri Jean-Luc Dehaene.
UNE PAGE SE TOURNE
"Une page se tourne pour Dexia. La banque va continuer à vivre mais sous d'autres formes et avec des actionnaires différents", commente Benoît de Broissia, analyste chez KBL Richelieu.
Il estime que le démantèlement de Dexia ne préjuge pas nécessairement d'autres plans de sauvetage pour le secteur bancaire.
"Il faut relativiser le cas très spécifique de Dexia de part la nature de son financement et de son exposition aux dettes souveraines, les pertes latentes de la banque sur son portefeuille obligataire étant considérables", note l'analyste.
La France et l'Allemagne se sont engagés dimanche à apporter une réponse "durable et globale" à la crise en zone euro pour le sommet du G20 prévu début novembre à Cannes, une réponse qui passera notamment par une recapitalisation des banques européennes.
Les gouvernements européens étudient les modalités d'une possible injection de capital dans le secteur bancaire mais veulent éviter une aggravation de la situation de leurs finances publiques.
L'agence de notation Moody's avait d'ailleurs accru la pression sur le camp belge vendredi soir en plaçant la note souveraine Aa1 du royaume sous surveillance, expliquant entre autres vouloir évaluer les coûts et les passifs que l'Etat belge pourrait assumer en soutenant Dexia.
Standard & Poor's a de son côté confirmé lundi la note "AAA" de la France, à laquelle est attachée une perspective stable, ainsi que la note "AA+" de la Belgique, avec une perspective négative.
"Nous sommes l'une des meilleures signatures mondiales et nous le resterons", a déclaré le ministre français de l'Economie et des Finances François Baroin, sur iTélé.