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Le président français est attendu ce vendredi à Tbilissi, au deuxième jour d'une visite d'État dans le Caucase du Sud. En Arménie jeudi, Nicolas Sarkozy a appelé la Turquie à revoir sa lecture historique du génocide arménien de 1915.

AFP - Le président français Nicolas Sarkozy a appelé jeudi la Turquie à "revisiter son histoire" en reconnaissant le "génocide arménien" de 1915 au cours de sa visite d'Etat en Arménie, première étape d'une tournée qui le conduira vendredi en Azerbaïdjan et en Géorgie.

"La Turquie, qui est un grand pays, s'honorerait à revisiter son histoire comme d'autres grands pays dans le monde l'ont fait, l'Allemagne, la France. On est toujours plus fort quand on regarde son histoire et le négationnisme n'est pas acceptable", a lancé Nicolas Sarkozy.

Comme le veut la tradition, M. Sarkozy a débuté son séjour en rendant hommage, avec son homologue arménien Serge Sarkissian, aux centaines de milliers de victimes du massacre ottoman perpétré en 1915 et 1916 en Turquie, en plantant un arbre dans le jardin du mémorial qui domine Erevan.

C'est à l'issue de cette cérémonie, puis dans le cadre plus solennel du dîner offert par son hôte, que le chef de l'Etat a demandé, devant son hôte et la presse, à la Turquie de faire un pas en avant sur ce dossier passionnel, qui continue d'empoisonner les relations entre l'Arménie et son voisin turc.

Outre la France, par une loi votée en 2001, le Canada et le Parlement européen ont eux aussi qualifié les massacres de 1915 de "génocide".

D'abord adressé à la Turquie, ce message présidentiel avait aussi un objectif plus franco-français. Avant son élection en 2007, le candidat Sarkozy avait promis aux représentants de la forte communauté arménienne de France, estimée à un demi-million de personnes, de soutenir le vote d'un texte de loi spécifique réprimant la négation du "génocide" de 1915.

Mais ce texte a été enterré en mai faute d'une majorité au Sénat (chambre haute) et surtout du soutien du gouvernement de Nicolas Sarkozy, suscitant l'amertume des Arméniens de France et de leurs partisans.

Jeudi à Erevan, le président a justifié sa position en estimant que, "si la Turquie revisitait son histoire (...) sa reconnaissance du génocide serait suffisante". Mais "si la Turquie ne le faisait pas, alors sans doute faudrait-il aller plus loin", a-t-il ajouté sans préciser l'échéance à laquelle il pourrait relancer le vote de cette loi mémorielle.

A six mois de la présidentielle, l'ancien ministre d'origine arménienne Patrick Devedjian, présent à Erevan, n'a pas manqué de relever le message très "politique" adressé par le président aux Arméniens de France.

"Je ne suis pas naïf", a-t-il dit, "mais si les élections peuvent servir à faire avancer les droits de l'homme, il faut en être heureux".

Outre ce dossier sensible, Nicolas Sarkozy a également appelé l'Arménie à faire la "paix" et la "réconciliation" avec l'Azerbaïdjan voisin sur le Nagorny Karabakh, territoire séparatiste azerbaïdjanais peuplé en majorité d'Arméniens.

"L'Arménie a besoin de la paix avec l'Azerbaïdjan", a-t-il souligné.

Jeudi, deux soldats azerbaïdjanais ont été tués par les forces arméniennes autour du Nagorny Karabakh, selon le ministère de la Défense à Bakou.

Le président français a promis de répéter ce message de "réconciliation" à son homologue azerbaïdjanais Ilham Aliev, vendredi matin à Bakou. Paris espère aussi de cette rencontre un "coup de pouce" à la conclusion de gros contrats pour des entreprises françaises dans ce pays, important producteur de gaz et de pétrole.

Et c'est avec la même casquette de "faiseur de paix" que Nicolas Sarkozy doit conclure son périple vendredi après-midi à Tbilissi, trois ans après avoir négocié un cessez-le-feu controversé entre la Russie et la Géorgie.

Cet accord suscite aujourd'hui le mécontentement des Géorgiens, qui jugent que les Russes ne l'ont pas appliqué. Trois semaines après avoir été accueilli en sauveur en Libye, M. Sarkozy espère toutefois peaufiner à Tbilissi sa stature d'homme d'Etat à quelques mois de la présidentielle française qui s'annonce pour lui très difficile.