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L'Unesco prête à reconnaître l'État palestinien

Une recommandation a été adoptée à l'Unesco pour faire de la Palestine un membre à part entière de l'Organisation. Une première victoire pour les Palestiniens, dont la demande d'adhésion de leur État à l'ONU est toujours à l'examen.

Les Palestiniens peuvent célébrer une première victoire dans leur combat pour la reconnaissance internationale d’un État. Mercredi, le conseil exécutif de l’Unesco a accepté une recommandation pour faire de la Palestine un État membre de l’Organisation.

Initiée par le groupe des pays arabes, la recommandation a été majoritairement approuvée - par 40 voix sur 58. Elle sera soumise à la Conférence générale de l'Unesco, qui doit se tenir du 25 octobre au 10 novembre et qui doit, à son tour, l’approuver aux deux tiers de ses 193 membres.

Concrètement, l’Autorité palestinienne, qui avait jusqu'à présent le statut d’observateur permanent, deviendrait un État membre à part entière et pourrait notamment demander l’inscription de sites au Patrimoine mondial de l’Humanité - notamment en ce qui concerne plusieurs sites des territoires occupés par Israël.

Malgré toutes les pressions menées en amont, Washington n’a pas réussi à s'opposer au vote de la recommandation et menace aujourd’hui de retirer sa contribution financière, qui s’élève à 22% du budget de l’Organisation. Le conseil exécutif de l’Unesco diffère en effet du Conseil de sécurité de l’ONU par l’absence de veto. "Si les Etats-Unis avaient pu opposer leur veto, il n’y aurait jamais eu de recommandation", reconnaît Mounir Anastas, observateur permanent adjoint de la Palestine auprès de l’Organisation, contacté par France24.com.

Comme les États-Unis, la France avait jugé prématuré pour la Palestine de demander une adhésion pleine et entière à l'Unesco, soulignant que la priorité pour l'heure devait être "la reprise des négociations" avec Israël.

"La position de l’Unesco n’aura pas d’influence sur le Conseil de sécurité"

Or, "ce n’est pas la première fois que la demande d’adhésion d’un État de Palestine à l’Unesco est faite", rappelle Mounir Anastas. "Depuis 1989, l’adhésion de la Palestine comme État membre à part entière figure à l’ordre du jour de chaque Conférence générale, mais était toujours ajournée", explique-t-il.

Le vent semble avoir tourné cette année, à la faveur d’un "contexte global différent", selon les termes de Mounir Anastas.

Ce geste de l’Unesco revêt une dimension symbolique, vu qu’il survient au moment même où la demande d’adhésion de la Palestine à l’ONU est en discussion au Conseil de sécurité : une demande à laquelle les États-Unis ont d’ailleurs déjà menacé d’opposer leur veto.

Pour Frédéric Encel*, spécialiste du Proche-Orient et maître de conférence à Sciences Po, l’Autorité palestinienne a en effet bénéficié d’un "effet d’entraînement" provoqué par la demande officielle d’adhésion à l’ONU. "Auparavant, sans demande officielle à l’ONU, même si elle n’est pas acceptée, l’Unesco pouvait difficilement accepter l’adhésion d’un État de Palestine", explique-t-il à France 24.com

Au lendemain de cette avancée historique, Mounir Anastas estime que "la prise de position de l’Unesco peut tout à fait avoir une influence sur celle de l’ONU... L’Unesco reste une agence onusienne, les États membres sont quasiment les mêmes et le fonctionnement est similaire".

Pour Frédéric Encel, la prise de position de l’Unesco "témoigne d’une lutte d’influence".  "L’Autorité palestinienne cherche à faire feu de tout bois et va probablement solliciter d’autres organes de l’ONU." Mais cette victoire diplomatique "n’aura pas de conséquence sur la décision du Conseil de sécurité", affirme catégoriquement Frédéric Encel. 

La prise de position de l’Unesco ne peut, selon lui, avoir de conséquences politiques réelles et reste avant tout "symbolique", l’Unesco revêtant un "certain prestige". Ainsi, quand bien même l’Assemblée générale de l’ONU voterait l’adhésion de la Palestine, sans résolution du Conseil de sécurité, ce qui est inédit, "cela n’aurait toujours qu’une portée symbolique et, surtout, cela ne changerait rien sur le terrain", estime-t-il.

* Frédéric Encel est l’auteur de "Comprendre la géopolitique", Seuil, 2011.