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Le Parti pirate débarque au Parlement du Land de Berlin

Il milite pour un Internet citoyen et plus de transparence en politique : grâce à son score de 8,9 % aux élections régionales de Berlin dimanche, le petit Parti pirate rentre pour la première fois de son histoire dans un Parlement en Allemagne.

Il a volé la vedette au SPD, le Parti social démocrate allemand, qui a pourtant remporté les élections régionales du Land de Berlin, dimanche, avec 28,3% des suffrages. Fort de quelque 12 000 militants, le Parti pirate (PP), qui a construit sa réputation en défendant l’idée d'un Internet citoyen au détriment d’un Internet purement commercial, a obtenu 8,9 % des voix pour sa première participation à ce scrutin dans la capitale allemande. Un score qui va lui permettre d’envoyer 14 à 15 membres au Parlement régional.

“On savait qu’on allait faire un bon résultat puisque les derniers sondages nous créditaient de 4 % à 6 % des suffrages, mais on ne s’attendait pas à un tel score”, reconnaît Ben de Biel, l’un des membres du PP, contacté par FRANCE 24.

Selon l’institut de sondage allemand Dimap, le PP a construit son succès sur sa capacité à mobiliser des Berlinois qui, traditionnellement, ne votent pas, mais aussi sur une désaffection de l’électorat pour les formations politiques traditionnelles.

Le taux de participation a, en effet, progressé par rapport au scrutin de 2006, repassant au dessus de la barre des 60 %. “Le Parti pirate a attiré 21 000 individus qui, sinon, n’auraient pas été voter”, indique ainsi Dimap. “Nous avons réussi à attirer des jeunes sensibles à notre implication dans les débats sur l’évolution de l’Internet qui n’avaient pas l’habitude de se rendre aux urnes", confirme Ben de Biel.

Sur l'échiquier politique berlinois, les Verts font figure de principales victimes du succès du PP. Selon Dimap toujours, les "pirates" auraient privé la formation écologiste de quelque 16 000 voix. Mais la CDU, le parti conservateur de la chancelière Angela Merkel, et ses alliés libéraux du FDP auraient eux aussi fait les frais de la présence du PP dans le scrutin, puisque ce dernier leur aurait chipé 10 000 voix...

Pur produit de Berlin

D'autres facteurs ont également permis au PP de réaliser un tel score. “Berlin est une ville très jeune qui attire beaucoup d’Allemands conscients de l’impact des nouvelles technologies de l’information qui veulent que les choses bougent”, avance par exemple Ben de Biel. Une analyse partagée par le politologue Gero Neugebauer, qui affirmait ce lundi dans le quotidien "Die Welt" que “cette formation est un pur produit berlinois”.

Dans la capitale allemande en effet, le PP ne fait pas des thèmes historiques du mouvement ses seuls chevaux de bataille, contrairement à la plupart de ses 26 autres chapelles dissiminées à travers le monde. Le parti défend certes l'idée d'une refonte du droit des brevets de propriété intellectuelle et l’instauration d’une licence globale versée aux artistes en échange du droit de télécharger librement des films et de la musique sur Internet, mais pas seulement. Ces revendications “ne sont que des outils au service d’un programme pragmatique destiné à améliorer le quotidien des Berlinois”, affirme Ben de Biel.

Sur son site internet, la formation a ainsi mis en ligne un programme beaucoup plus vaste, dans lequel elle se prononce sur à peu près tous les sujets, de la politique d’immigration à la religion en passant par l’économie. “C’est vrai que le nom du parti laisse penser qu'il s'agit d'un mouvement rebelle en lutte contre le système, mais nous sommes en train de changer ça”, reprend Ben de Biel qui, à 48 ans, dirige une boîte de nuit berlinoise.

Transparence

Toutefois, à l'heure de participer pour la première fois à la vie politique de la capitale, le PP a une idée très précise des positions qu'il souhaite prioritairement y défendre. “Nous voulons un exercice du pouvoir plus transparent et une démocratie plus participative”, explique Ben de Biel. Le PP s’engage ainsi à rendre public toutes les décisions du Parlement, mais compte demander aussi à tous les citoyens de proposer activement des idées à débattre dans l'institution, au travers de groupes sur Facebook ou sur Twitter.

“Ils sont un peu les seuls à défendre aussi fermement la transparence politique”, commentait dimanche le politologue Oskar Niedermayer dans le quotidien du soir "Abendblatt". “Si d’autres Parti pirate dans le monde veulent réussir à percer électoralement, leur meilleur chance est de demander plus de transparence”, renchérit pour sa part Ben de Biel.

Crédit photo : humanoid23/Flickr