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Le secteur bancaire européen est de nouveau en proie à une tourmente boursière ce lundi. En cause : son exposition à la dette grecque. Les banques sont, surtout, devenues le bouc émissaire à la mode pour les problèmes de la zone euro.

Les banques européennes continuaient de traverser, ce lundi, une zone de turbulences boursières. En France, les actions des principales banques (Société Générale, Crédit Agricole et Banque Populaire) ont chuté dès l’ouverture des bourses européennes d’environ 10 % et en Allemagne, la Deutsche Bank et la Commerzbank ont enregistré un repli de près de plus de 6 %.

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euro : le scénario du pire
Les banques européennes dans l'œil du cyclone boursier

Une tendance qui a suscité une avalanche de réactions rassurantes de la part de responsables économiques et politiques européens. "Quel que soit le scénario grec et donc quelles que soient les provisions à passer, les banques françaises ont les moyens d'y faire face", a ainsi assuré Christian Noyer, directeur de la Banque de France dans un communiqué lundi. De son côté, Éric Besson, ministre français de l’Industrie, a écarté sur les ondes de la radio RMC l’éventualité d’une nationalisation expliquant que le secteur bancaire avait très bien passé les stress-tests (tests de résistance) de cet été.

Ce décalage entre le pessimisme des bourses et l’optimisme affiché des pouvoirs publics donne une image chaotique du secteur bancaire européen. Décryptage :

Les bourses maltraitent-elles davantage les banques françaises ? À lire les titres de la presse, lundi, les marchés financiers semblent s’acharner sur les banques françaises. "Les banques françaises laminées", juge ainsi le Parisien tandis que L’Expansion évoque "un effondrement des banques françaises".

L’Hexagone n’est en fait pas plus touché que le reste de l’Europe. Depuis le début de l’année, des banques allemandes comme la Commerzbank ont perdu près de 50 % de leur valeur boursière et leurs homologues italiennes, tels UniCredit (-40 %), ont également chuté. "Toutes les banques européennes sont actuellement prises dans la tourmente boursière", confirme à FRANCE 24 Pascal de Lima, économiste en chef pour la société française de conseil en ingénierie Altran et spécialiste du secteur bancaire.

Les bourses ont-elles raison de s’en prendre aux banques ? La principale raison de la chute actuelle des valeurs bancaires est leur exposition à la dette grecque..

Pourtant, "il n’y a vraiment pas lieu de s’inquiéter de l’exposition des banques françaises à la dette grecque", renchérit Pascal de Lima. Cet économiste rappelle que leurs investissements dans la dette grecque se montent à 0,4 % de leurs actifs, tandis que leurs profits continuent d'augmenter.

"En fait, les banques européennes sont devenues le catalyseur 2011 des craintes des bourses sur la situation de la zone euro", juge Pascal de Lima. Elles sont donc le dernier bouc émissaire en date des difficultés de toute l’économie européenne.

Mais les marchés financiers voient peut-être déjà plus loin. "Il ne fait aucun doute que la plupart des banques européennes peuvent faire face à un défaut de paiement grec, mais la situation deviendrait beaucoup plus critique si la contagion faisait ensuite peser un risque accru sur des pays comme l’Italie ou l’Espagne", prévient Gunther Capelle-Blancard, directeur adjoint du Centre d'études prospectives et d'informations internationales.

Pourquoi maintenant ? En effet, l’exposition des banques européennes à la dette grecque est connue depuis l’année dernière. Pourtant, les bourses semblent s’affoler réellement depuis cet été seulement. "Il est toujours difficile de dire pourquoi une crise se déclenche tel jour et pas un autre, note Gunther Capelle-Blancard. Mais cela fait plus d’un an que les marchés financiers attendent que les États européens apportent une solution à la crise grecque et leur patience devait bien arriver un jour à terme."

Quelles conséquences la dégringolade en bourse a-t-elle sur les banques ? Les principales victimes de cette chute boursière risquent d’être les actionnaires des banques. "Si les banques veulent lever de l’argent sur les marchés, elles vont devoir émettre plus d’actions qu’auparavant car elles ont perdu de la valeur ce qui va diluer leur capital", explique Gunther Capelle-Blancard. Conséquence : de nouveaux actionnaires vont arriver, alors que le gâteau des dividendes de fin d’année n’aura, lui, pas augmenté.

Mais les entreprises risquent également de ressentir par ricochet cette dégringolade boursière. Si pour faire face à la défiance des marchés, les banques décident de se recapitaliser, elles vont chercher à faire des économies et fermer un peu plus le robinet des crédits. "Il y a un risque de rigueur financière qui s’ajouterait à la rigueur budgétaire", résume Pascal de Lima.

Comment les banques peuvent-elles réagir ? "À court terme, les dés sont jetés et les banques ne peuvent que regarder l’évolution du cours de leurs actions", assure Gunther Capelle-Blancard.

À plus long terme, les banques ont une série de leviers pour tenter de calmer les bourses. L’augmentation de leurs fonds propres grâce à une recapitalisation "sera forcément bien perçue par les marchés car il vaut mieux avoir toujours plus d’argent de côté", note Gunther Capelle-Blancard. "On peut aussi envisager des fusions-acquisitions qui permettraient à certaines banques de profiter de la faiblesse d'un concurrent, mais dans le contexte actuel, ce serait des opérations risquées", envisage de son côté Pascal de Lima. Autant de solutions qui ont un inconvénient : " Les bourses semblent malheureusement à l’heure actuelle ne réagir qu’à très court terme", conclut Pascal de Lima.