Après la vaste offensive lancée par l'armée syrienne dimanche à Hama, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est de nouveau réuni mardi en vue d'adopter une résolution sanctionnant le régime de Bachar al-Assad. Pour l'instant sans succès.
AFP - Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni mardi pour le deuxième jour consécutif pour discuter de la répression en Syrie, qui a fait au moins trois nouvelles victimes après les dizaines de morts depuis dimanche.
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon a estimé que le président Bachar al-Assad avait "perdu toute humanité".
Mardi à Hama (centre), deux frères ont été tués par une roquette tirée sur leur voiture et un autre civil est mort après avoir été visé par un tireur embusqué, a affirmé le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, Rami Abdel Rahmane.
L'armée et les forces de sécurité ont lancé dimanche une vaste offensive dans cette ville rebelle à 210 km au nord de Damas, tuant cent personnes dimanche et quatre lundi. Lundi soir, les chars ont bombardé des quartiers résidentiels, selon un militant sur place.
Hama a été le théâtre d'immenses manifestations contre le pouvoir ces dernières semaines. Cette ville était déjà un symbole de la lutte contre le régime depuis la répression en 1982 d'une révolte des Frères musulmans, qui avait fait 20.000 morts.
L'agence officielle Sana a affirmé qu'un groupe de "saboteurs" avait mis à sac le principal palais de justice de Hama lundi après-midi. La veille, elle avait assuré que l'armée poursuivait "sa mission à Hama", évoquant de "vastes affrontements" contre des groupes bien organisés, à l'armement sophistiqué.
Lundi, au moins 24 personnes au total avaient été tuées dans tout le pays, dont 10 après la prière des Tarawih, selon M. Abdel Rahmane. Les autorités redoutent cette prière du soir pendant le ramadan, qui multiplie les occasions de rassemblement pour les manifestants.
Face à cette répression sanglante, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est de nouveau réuni mardi, au lendemain d'une première réunion qui s'était achevée sans résultat concret. L'adoption d'une résolution condamnant la répression reste peu probable étant donné les divisions persistantes entre membres du Conseil, ont indiqué des diplomates.
La Russie et la Chine, deux des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, ont menacé de bloquer le passage d'une résolution, tandis que le Brésil, l'Inde et l'Afrique du Sud ont fait savoir qu'ils étaient contre une résolution ou une déclaration.
Les puissances européennes ont distribué un nouveau projet de résolution sur la Syrie mais des diplomates ont indiqué qu'il n'était guère différent d'un texte précédent rejeté il y a deux mois.
"Ce n'est pas nouveau", a dit l'ambassadeur russe, Vitaly Churkin, tandis que l'ambassadeur indien, Hardeen Singh Puri, ne relevait que "quelques mises à jour techniques".
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, évoquant les violences du week-end au cours desquelles environ 140 personnes ont été tuées, principalement à Hama, a estimé que le président Bachar al-Assad avait "perdu toute humanité".
Le président Assad "doit être conscient qu'il est responsable devant la loi internationale", a-t-il ajouté.
L'Europe a imposé mardi des sanctions contre cinq nouveaux proches du président Assad, ajoutés à la liste des personnes privées de visas et dont les avoirs ont été gelés. Le ministre de la Défense et le chef de la sécurité militaire de Hama figurent parmi les personnes sanctionnées.
Le ministre syrien de la Défense, le général Ali Habib Mahmoud, compte parmi les cinq nouvelles personnes sanctionnées par l'Union européenne pour leur rôle dans la répression contre des manifestants en Syrie, a indiqué mardi le Journal officiel de l'UE.
Le chef de la sécurité militaire dans la ville de Hama, Mohammed Mufleh figure également sur la liste des personnes privées de visa et dont les avoirs sont gelés.
Les trois autres personnes sanctionnées par l'UE sont le général de division Tawfiq Younes, chef de la division +sécurité intérieure+ des renseignements généraux, Mohammed Makhlouf, alias Abu Rami, oncle maternel du président syrien Bachar al-Assad, et Ayman Jabir, associé du frère cadet du président al-Assad, Maher al-Assad, dans le cadre de la milice Shabiha.
(source : AFP)
L'UE avait déjà adopté trois trains successifs de sanctions à l'encontre de caciques du régime, dont le président Assad lui-même.
Dénonçant "l'horrible répression contre la population civile", l'Italie a rappelé son ambassadeur en Syrie pour consultations et proposé que tous les pays de l'UE fassent de même.
Mais l'UE n'envisage pas de rappeler son ambassadeur, qui va "rester à Damas pour surveiller la situation", a répondu le porte-parole de la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton.
Et comme Londres la veille, Paris a affirmé que la communauté internationale ne prévoyait "aucune option de nature militaire".
Depuis le début de la contestation le 15 mars, plus de 1.600 civils ont été tués, selon l'OSDH. Près de 3.000 personnes sont portées disparues et quelque 12.000 ont été emprisonnées en quatre mois et demi de révolte, d'après les ONG.
Malgré la répression, les militants ont affirmé sur leur page Facebook leur volonté de manifester "tous les soirs après les (prières du) Tarawih, pour riposter" au régime.
Dans la nuit de lundi à mardi, des manifestations ont ainsi eu lieu dans la plupart des villes syriennes, notamment à Homs (centre), Lattaquié (nord-ouest) et dans la périphérie de Damas. "Elles ont été réprimées par la force. Des balles réelles ont été tirées près des mosquées", selon l'OSDH.
Et l'inquiétude persistant: M. Abdel Rahmane a fait état mardi d'un "déploiement massif de chars" sur la route entre Homs et la localité voisine de Ruston, où les habitants redoutent une offensive.