Après avoir longtemps boudé l'idée d'un plan de sauvetage européen, Angela Merkel semble disposée à se ranger du côté de ses partenaires de l'UE. Une énième volte-face qui a le don d'agacer les éditorialistes allemands. Revue de presse.
Elle a beau préparer avec le président français, Nicolas Sarkozy, le sommet des chefs d’État européens sur la crise de la dette grecque prévu jeudi, Angela Merkel peine à échapper aux critiques. La presse allemande, dans son ensemble, en convient : la chancelière n’est actuellement pas le meilleur atout de l’Europe pour trouver une solution à la crise que traverse la zone euro.
"Il faut en finir avec les petits jeux politiciens", titre le Handelsblatt, l’un des principaux quotidiens économiques du pays. "Merkel perd", affirme pour sa part la version allemande du Financial Times, tandis que le quotidien de gauche la Sueddeutsche Zeitung considère la position de Berlin comme "un souci pour l’Europe".
"L'Europe en otage"
Mais les éditorialistes ne sont pas les seuls à formuler des griefs contre la chef du gouvernement allemand. Ses partenaires européens lui reprochent également de "toujours d’abord dire 'non' aux propositions visant à aider les pays endettés et au dernier moment de se ranger derrière leur avis", résume Iain Begg, économiste à la London School of Economics interrogé par FRANCE 24. Angela Merkel serait-elle passée du statut de femme la plus puissante du monde à celui de girouette de la zone euro ?
"Même ses amis à la CDU [Union chrétienne-démocrate] demande à la chancelière de clarifier sa position sur le dossier de la dette", rapporte ainsi la Sueddeutsche Zeitung. "Le gouvernement actuel a joué un rôle important dans la valse-hésitation européenne des dernières semaines au sujet de la meilleure manière d'aider la Grèce", rajoute le Handelsblatt pour qui "les prises de position contradictoires d’Angela Merkel sont autant de raisons données aux marchés de ne pas faire confiance à l’Europe" pour sortir de la crise des dettes souveraines. Plus brutal encore, "Angela Merkel a pris l’Europe en otage", estime le quotidien Die Welt.
Situation impossible
Ses revirements coûtent actuellement cher à la chancelière allemande. "Sa cote de popularité est tombée à son plus bas niveau en cinq ans", remarque l'hebdomadaire Der Spiegel. Pourtant si Angela Merkel rechigne à s'associer au nouveau plan de sauvetage, c'est surtout pour ménager son électorat. Plus de 60 % des Allemands sont hostiles à une nouvelle aide à la Grèce, selon un récent sondage publié dans le quotidien de droite Frankfurter Allgemeine Zeitung.
En l'état actuel, le plan de soutien à Athènes prévoit que l’Europe rachète la dette grecque détenue par les investisseurs privés. "Cela signifierait que l’Allemagne, en tant que pays le plus riche en Europe, paie le plus pour sauver les Grecs", explique Iain Begg. Ce qui explique pourquoi Berlin tente d'imposer un plan qui obligerait le secteur privé européen à réparer une partie des pots cassés en reconduisant les créances qui arrivent à échéance.
Malgré leur sévérité, les journaux allemands trouvent toutefois des circonstances atténuantes à la chancelière. "Les électeurs la poussent à refuser toute nouvelle aide, les autres pays européens lui demandent davantage de solidarité et, maintenant, ce sont des figures historiques de la politique allemande qui la mettent sous pression", observe Der Spiegel. Tous deux anciens chanceliers, Helmut Kohl et Helmut Schmidt accusent en effet Angela Merkel de "dilapider leur apport à la construction européenne".