
Le président libanais Joseph Aoun, le Premier ministre Nawaf Salam et les membres du gouvernement réunis au palais présidentiel le 5 août 2025. © Emilie Madi, Reuters
Les tractations continuent au Liban. Le gouvernement s'est réuni à nouveau jeudi 7 août pour discuter de l'épineuse question du désarmement du Hezbollah, au lendemain du rejet par le mouvement chiite de la décision de confisquer ses armes.
Sous pression des États-Unis et face aux craintes d'une intensification des attaques israéliennes au Liban, le gouvernement avait chargé mardi l'armée de préparer un plan pour désarmer d'ici la fin de l'année le mouvement islamiste soutenu par l'Iran.
La réunion de jeudi était consacrée à l'examen d'un mémorandum apporté par l'émissaire américain, Tom Barrack, incluant un calendrier de désarmement.
"Nous ne sommes pas entrés dans les détails"
La proposition américaine viserait au désarmement du Hezbollah d'ici la fin de l'année, à la fin des opérations militaires israéliennes dans le pays et au retrait de l'armée israélienne de cinq positions dans le sud, selon une copie de l'ordre du jour du cabinet libanais consultée par Reuters. Ce plan présente les étapes les plus détaillées à ce jour pour obtenir un désarmement du Hezbollah.
Le ministre libanais de l'Information, Paul Morcos, a déclaré jeudi à l'issue de la réunion du cabinet que celui-ci avait approuvé uniquement les objectifs du plan, mais ne l'avait pas discuté dans son intégralité. "Nous ne sommes pas entrés dans les détails ni les composantes de la proposition américaine. Nos discussions et notre décision se sont limitées à ses objectifs", a-t-il dit.
L'émissaire américain a salué jeudi le Liban pour sa décision "historique, audacieuse et juste". Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a dans la foulée félicité Beyrouth pour sa "décision courageuse et historique", qui doit lui permettre selon lui d'"aller vers une pleine souveraineté".
Quatre ministres chiites quittent la réunion
Les quatre ministres chiites présents à la réunion de jeudi, dont deux affiliés au Hezbollah, un au mouvement Amal, son allié, et un indépendant, se sont retirés avant la fin de la séance pour protester contre la décision de désarmer le mouvement, selon la télévision du mouvement, Al-Manar.
La ministre de l'Environnement Tamara Elzein, proche d'Amal, a déclaré à Al-Manar que le gouvernement "espérait d'abord consolider le cessez-le-feu et le retrait israélien, avant de pouvoir finaliser les points restants", faisant référence à la proposition américaine.
Le Hezbollah est la seule faction libanaise qui avait été autorisée à conserver ses armes après la fin de la guerre civile (1975-1990).
Le gouvernement affirme agir dans le cadre du cessez-le-feu conclu sous médiation américaine, qui a mis fin le 27 novembre à un an d'hostilités entre le Hezbollah et Israël en marge de la guerre dans la bande de Gaza.
L'accord de cessez-le-feu prévoit le retrait du Hezbollah de la zone située au sud du fleuve Litani et le démantèlement de ses infrastructures militaires, en contrepartie du renforcement du déploiement de l'armée libanaise et des Casques bleus de l'ONU. Il prévoit également un retrait israélien du sud du Liban. Mais Israël maintient des troupes dans cinq positions frontalières qu'il juge stratégiques.
En réponse à la décision de le désarmer, le Hezbollah, affaibli par la guerre avec Israël, a accusé le gouvernement de commettre un "péché grave" et affirmé qu'il ignorerait cette décision.
Les frappes israéliennes se poursuivent
Jeudi, le bloc parlementaire du mouvement a appelé le gouvernement à "corriger la situation dans laquelle il s'est mis, ainsi que le Liban, en acceptant les exigences américaines qui servent inévitablement les intérêts de l'ennemi sioniste". Il considère que cette décision "sape la souveraineté du Liban" et "donne les mains libres à Israël pour porter atteinte à sa sécurité, à sa géographie, à sa politique et à son existence future".
Iraj Masjedi, coordinateur adjoint de la Force Qods, branche des opérations extérieures des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de l'Iran, a déclaré que le désarmement du Hezbollah "n'arrivera pas".
Le porte-parole de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), Andrea Tenenti, a annoncé jeudi que ses forces avaient "découvert un réseau étendu de tunnels fortifiés près de Naqoura", dans le sud du Liban, "comprenant plusieurs caches, des pièces d'artillerie, des lance-roquettes multiples ainsi que des centaines de projectiles et de roquettes, des mines antichars et d'autres explosifs".
Israël, qui, malgré le cessez-le-feu, poursuit ses bombardements au Liban, disant cibler le Hezbollah, a menacé d'intensifier ses opérations militaires si le mouvement n'est pas désarmé. Des frappes israéliennes ont tué au moins cinq personnes et en ont blessé dix jeudi dans l'est du Liban, selon le ministère de la Santé.
Avec AFP et Reuters