
Le discours sans concessions du Premier ministre israélien, mardi devant le Congrès américain, a une nouvelle fois mis en évidence ses désaccords avec le président Obama. Mais il a surtout confirmé que le processus de paix reste dans l’impasse.
Intransigeant à l’égard des principales demandes palestiniennes (Jérusalem, le retour des réfugiés), le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou s’est néanmoins dit disposé, si les conditions s’y prêtent, à des "compromis douloureux", lors de son discours mardi devant le Congrès américain. Mais le chef du gouvernement israélien a fermement refusé un État d'Israël dans les frontières de 1967, comme l’avait demandé quelques jours plutôt le président Barack Obama.
Antagonisme
Ce camouflet infligé à la Maison Blanche vient conclure la passe d’armes entre les deux hommes. Depuis une semaine, ils laissent paraître publiquement leurs désaccords sur le processus de paix. Nul n’ignore dans le milieu diplomatique que le président Obama et le Premier ministre Netanyahou entretiennent des relations tendues depuis deux ans et demi, bien que leurs pays respectifs se considèrent comme des alliés indéfectibles.
"Cette relation s’inscrit dans un antagonisme. Le président américain a une vision sincère du conflit et cherche à apaiser la situation, sans disposer des moyens pour appliquer sa politique", explique à France24.com, Jean-Paul Chagnollaud, professeur des Universités. "De son côté, Benjamin Netanyahou reste cramponné au statu quo cher à la droite israélienne, sans vision à long terme. Et contrairement à Obama, il a les moyens d’appliquer sa politique", poursuit le spécialiste de la question palestinienne.
Impasse
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En évitant d’énoncer, lors de sa visite à Washington, des propositions concrètes pour relancer le processus de paix, Benjamin Netanyahou poursuit son bras de fer avec la Maison Blanche. Le président Obama avait intensifié ses efforts diplomatiques ces derniers temps en vue d’une reprise des négociations. Ces dernières sont plongées dans l’impasse depuis fin septembre 2010 et le refus israélien de prolonger le moratoire sur la colonisation israélienne en Cisjordanie. "Benjamin Netanyahou a rejeté totalement le plan américain présenté ces derniers jours. Son discours a tué dans l'œuf toute possibilité de relance des négociations", a réagi Udi Segal, commentateur politique de la deuxième chaîne de télévision privée israélienne.
Le président Obama s'est prononcé jeudi, pour la première fois, en faveur d’un État palestinien sur la base des lignes de 1967, "avec des échanges sur lesquels les deux parties seraient d'accord".
De leur côté, les Palestiniens menacent de demander à l'ONU la reconnaissance de leur futur État sur les frontières de juin 1967, c'est-à-dire avant l'occupation par l’armée israélienne de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est. Washington a prévenu qu’elle opposera son veto à une telle démarche, programmée pour le mois de septembre, au nom de son alliance avec l’État hébreu. "N’ayant rien à perdre, les dirigeants palestiniens risquent d’aller au bout de leur logique à l’ONU, et le président américain, qui a lui-même évoqué les frontières de 1967, va paradoxalement s’y opposer", analyse Jean-Paul Chagnollaud.
Défaite diplomatique
Pour éviter ce scénario à quelques mois du début de la campagne présidentielle américaine, Barack Obama devrait réagir et tenter un geste fort en convoquant les protagonistes à discuter dans le cadre d’une conférence internationale. "Au cours de la conférence de Madrid de 1991, le président George Bush père avait obtenu quelques résultats notoires, alors même que le Premier ministre israélien, Itzhak Shamir était un faucon du Likoud", note le professeur.
Si un vote de l'Assemblée générale en faveur d'un État palestinien, soutenu par les dirigeants européens, voit le jour, "les États-Unis seront isolés en compagnie de leur allié israélien", estime-t-il. "Une telle issue serait considérée comme une grande défaite de la diplomatie américaine, alors même que la région traverse une période historique", conclut Jean-Paul Chagnollaud.