Lundi, une quatrième mutinerie de soldats a éclaté à Kaya (centre). À Koudougou, une manifestation de jeunes a dégénéré. Conséquence : le siège local du parti au pouvoir (CDP) ainsi que la résidence de l'ex-Premier ministre ont été incendiés.
AFP - La contestation a gagné du terrain lundi au Burkina Faso où des jeunes ont manifesté violemment à Koudougou (ouest) et où la mutinerie de soldats s'est étendue à une quatrième ville, Kaya (centre), après celles de Ouagadougou, Pô (sud) et Tenkodogo (ouest).
A Koudougou, une manifestation d'étudiants, a dégénéré: les jeunes ont incendié le siège du Congrès pour la démocratie et le développement (CDP, au pouvoir), une résidence de l'ex-Premier ministre Tertius Zongo, limogé vendredi, ainsi que le domicile du proviseur du principal lycée de la ville.
Koudougou est la ville d'où est partie la contestation au Burkina Faso, après la mort d'un élève, Justin Zongo, le 20 février lors d'une manifestation.
Ses proches avaient accusé la police d'être à l'origine de sa mort, les autorités affirmant qu'il était mort d'une méningite.
"Nous voulons contraindre le pouvoir (...) à se pencher sur nos préoccupations" et à établir "la vérité et la justice pour Justin Zongo et pour toutes les victimes de la répression", indique une déclaration des élèves et des étudiants transmise lundi à l'AFP.
Cette manifestation violente est survenue quelques heures après une nouvelle mutinerie à Kaya où des soldats et des gendarmes sont descendus pendant plusieurs heures dans les rues où ils ont tiré en l'air jusqu'à 06H00 GMT (locales et GMT). Les tirs ont cessé, faute de munitions.
Les mutins ont incendié le domicile du chef du corps du régiment de commandement d'appui et de soutien (CAS) et saccagé celui du commandant de la 1ère région militaire, celle de Kaya, ont affirmé des habitants de la ville interrogés par téléphone depuis Ouagadougou.
C'est la première fois que des gendarmes participaient à la mutinerie.
A Pô (sud) où sont formées les unités d'élite de l'armée et où les soldats s'étaient mutinés samedi et dimanche, une solution semblait en vue, a indiqué une source sécuritaire proche de l'état-major, avec le paiement prévu dans la journée de lundi des salaires de mars.
Le calme était également revenu à Tenkodogo (est), théâtre d'une mutinerie de soldats dimanche, selon des témoins.
Dans la capitale, qui depuis jeudi soir avait des allures de ville morte, la vie reprenait son cours normal lundi matin, a constaté un journaliste de l'AFP, la plupart des banques et des services publics ayant rouvert leurs portes.
Sur le marché central, théâtre samedi de violences provoquées par des commerçants excédés par l'action des militaires qui avaient pillé et saccagé de nombreuses boutiques, les mêmes commerçants étaient présents, mais n'avaient pas ouvert leurs étals.
Le gouvernement a ordonné la réouverture des stations-services dont la fermeture avait provoqué des problèmes d'approvisionnement en carburant.
Au moins 43 personnes ont été blessées par balle depuis jeudi à Ouagadougou et deux à Pô, ont indiqué à l'AFP des sources hospitalières. Des cas de viols ont également été signalés.
Le mouvement de contestation des soldats était parti jeudi soir de la propre garde présidentielle du chef de l'Etat Blaise Compaoré, puis s'est les jours suivants étendu à d'autres garnisons de la capitale, et aux trois autres villes.
Pour tenter de contenir la révolte, M. Compaoré a versé à la garde présidentielle une prime de logement et d'alimentation promise, dissous son gouvernement, nommé de nouveaux responsables des forces armées et instauré un couvre-feu dans la capitale.
Le pouvoir est confronté depuis février à plusieurs mouvements de contestation des jeunes, des magistrats, des commerçants et des soldats. Après la mort de Justin Zongo, au moins six autres personnes ont été tuées lors de manifestations violentes.
Le 8 avril, des dizaines de milliers de personnes avaient manifesté pacifiquement dans plusieurs villes du pays contre le régime Compaoré, dénonçant également des conditions de vie de plus en plus difficiles.
M. Compaoré a été réélu quatre fois avec plus de 80% des voix depuis son arrivée au pouvoir en 1987 par un coup d'Etat. Son mandat en cours, entamé en novembre 2010, doit théoriquement s'achever en 2015.