Des dizaines de personnes ont été tuées lors d'affrontements entre les forces de l'ordre et des manifestants réunis à Sanaa, la capitale yéménite, pour réclamer le départ du président Ali Abdallah Saleh. L'opposition dénonce un "massacre".
AFP - Au moins 32 personnes ont été tuées et plus de 200 blessées par des tirs vendredi contre une manifestation réclamant le départ du président yéménite Ali Abdallah Saleh à Sanaa, dénoncée par l'opposition comme un "massacre".
Il s'agit de la journée la plus sanglante depuis le début de la contestation en janvier contre le président Saleh, 68 ans. Il a jusqu'ici bénéficié du soutien des Etats-Unis qui le considèrent comme un allié dans la lutte contre les émules d'Oussama ben Laden dans la péninsule arabique.
Les victimes de cette tuerie, sans précédent depuis les violences civiles de 1994 dans ce pays pauvre de 24 millions d'habitants, portent à plus de 70 le bilan des morts depuis le début du mouvement appelant au départ du président Saleh, au pouvoir depuis 32 ans.
Selon des témoins, des partisans du régime ont ouvert le feu sur des milliers de manifestants depuis les toits des habitations proches de la place de l'Université, où se tient depuis le 21 février un sit-in contre le régime.
Les tirs ont commencé lorsque les manifestants ont voulu démanteler une barricade érigée par les partisans du régime pour bloquer l'une des rues menant à la Place de l'Université, selon le correspondant de l'AFP. La police a lancé des grenades lacrymogènes sur les manifestants et a également tiré à balles réelles.
La fusillade a duré plus d'une heure et demie, selon un correspondant de l'AFP sur place.
Des manifestants sont montés sur le toit d'un des immeubles où était embusqué un tireur, et l'ont précipité dans le vide, selon le correspondant.
"La plupart des blessés sont touchés par balles à la tête, au cou et à la poitrine", a affirmé un médecin à l'AFP.
Les corps s'entassaient à l'hôpital de campagne installé par les opposants sur la place de l'Université, et plusieurs médecins ont affirmé manquer de médicaments et d'équipements.
L'opposition a accusé le régime d'avoir commis "un massacre". "Cette tuerie ne va pas contribuer à maintenir Ali Abdallah Saleh au pouvoir", a affirmé, dans une déclaration à la chaîne al-Arabiya, le porte-parole de l'opposition parlementaire, Mohamed al-Sabri.
"Nous rendons Saleh et ses fils (qui contrôlent plusieurs organes de sécurité) directement responsables de ce crime prémédité, et ils n'échapperont pas au châtiment", a-t-il ajouté.
Les manifestants avaient commencé à défiler en scandant "le peuple veut la chute du régime" et un grand nombre d'entre eux brandissaient des cartons jaunes, comme le font les arbitres lors d'un match de football pour pénaliser un joueur en faute.
Cette initiative a été lancée par un groupe de jeunes qui avaient proclamé cette journée "vendredi de l'avertissement" lancé au président Saleh, qui refuse de démissionner.
Le chef de l'Etat devait tenir une conférence de presse en soirée.
Des milliers de personnes campent depuis le 21 février sur la place de l'université à Sanaa, réclamant le départ de M. Saleh. Ils ont déjà été la cible d'attaques répétées de la police et de partisans du chef de l'Etat.
Des dizaines de manifestants avaient été blessés dimanche sur cette place, épicentre de la contestation populaire, dans une attaque lancée par des policiers soutenus par des partisans du régime, au lendemain de la mort d'un manifestant victime de tirs de la police.
Des milliers de personnes ont également manifesté vendredi à Aden, la grande ville du sud. Les manifestants ont pris part aux obsèques d'un protestataire tué mardi dans la violente répression de la contestation dans cette ville rétive à la pointe de la contestation contre le régime.