
Le président Donald Trump lors de son discours au Mount Airy Casino Resort à Mount Pocono, en Pennsylvanie, le 9 décembre 2025. © Matt Rourke, AP
Chez Donald Trump, la rhétorique anti-immigration ne connaît aucune limite. Mercredi 10 décembre, lors d'un meeting en Pennsylvanie visant à vanter sa politique économique, le président américain a repris l'expression "pays de merde" qui avait fait tant polémique en 2018 mais qu'il avait nié avoir prononcée.
"Nous avons eu une réunion (avec des élus, NDLR) et j'ai demandé : 'Pourquoi est-ce que nous ne prenons que des gens qui viennent de pays de merde ? Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir des gens de Suède, de Norvège ?'", a rapporté Donald Trump.
"Des endroits calamiteux, crasseux, sales, dégoûtants"
"Mais nous ne prenons que des gens de Somalie", a poursuivi le dirigeant républicain. "Des endroits calamiteux. Crasseux, sales, dégoûtants, gangrénés par la criminalité."
Récemment, il avait qualifié les migrants somaliens de "déchets".
Ces propos "sont une preuve de plus de son programme raciste", a commenté sur X Ed Markey, sénateur de l'opposition démocrate.
L'élu républicain Randy Fine a au contraire pris la défense de Donald Trump. "Toutes les cultures ne se valent pas", a-t-il dit sur CNN, ajoutant que "le président parle un langage que les Américains comprennent".
"Ce genre de référence à des migrants (...) incapables de faire partie d'une société avancée" a toujours existé aux marges de la droite américaine, explique à l'AFP Carl Bon Tempo, professeur d'histoire à l'université d'Albany, dans l'État de New-York. "La différence est que, aujourd'hui, cela vient directement de la Maison Blanche et il n'y a pas de mégaphone plus puissant", poursuit le chercheur.
Des immigrés accusés d'"empoisonner le sang" du pays
Pendant sa campagne, Donald Trump a multiplié les attaques contre les immigrés en situation irrégulière, venus en particulier d'Haïti et d'Amérique latine, accusés d'"empoisonner le sang" du pays, un vocabulaire comparé par ses opposants à celui des nazis.
Revenu au pouvoir, il a lancé une vaste et brutale campagne d'expulsions. Son gouvernement a aussi suspendu les demandes d'immigration pour les ressortissants de 19 pays parmi les plus pauvres de la planète.
Dans le même temps, le président américain a ordonné d'accueillir les fermiers sud-africains blancs, selon lui persécutés.
"Il n'a plus aucun filtre", constate pour l'AFP Terri Givens, professeure à l'université canadienne de Colombie-Britannique, spécialiste des politiques d'immigration.
"Peu importe qu'un immigré respecte la loi, possède une entreprise, ou vive ici depuis des décennies, il est pris dans la bataille de Trump contre un ennemi imaginaire", juge Mark Brockway, professeur de sciences politiques à la Syracuse University, interrogé par l'AFP.
En décrivant les immigrés comme des "sangsues", selon le terme employé par la ministre de la Sécurité intérieure Kristi Noem, la Maison Blanche désigne une cible à l'heure où les Américains s'inquiètent du coût de la vie.
Mais selon Carl Bon Tempo, "quand l'immigration s'impose comme un sujet, c'est parfois à cause de l'économie, mais aussi à cause de questions plus fondamentales autour de ce que cela signifie d'être américain".
Échos du courant "nativiste" des années 1920
Le 28 novembre, après une attaque meurtrière menée par un ressortissant afghan contre deux militaires de la Garde nationale à Washington, Donald Trump a prôné sur son réseau Truth Social "l'immigration inversée" ou "remigration". Cette notion, développée par des théoriciens européens d'extrême droite comme le Français Renaud Camus, désigne le renvoi massif d'étrangers.
Elle accompagne la thèse complotiste du "grand remplacement", selon laquelle une élite mondialisée s'activerait de manière occulte pour que les populations immigrées non caucasiennes s'imposent démographiquement et culturellement en Europe.
De nombreux experts ont aussi relevé dans les idées de Donald Trump et de son entourage des échos du courant "nativiste" des années 1920 aux États-Unis, selon lequel l'identité américaine serait avant tout blanche, anglo-saxonne et protestante. Cela avait débouché à l'époque sur une politique d'immigration favorisant les populations d'Europe du Nord et d'Europe de l'Ouest.
L'influent conseiller de la Maison Blanche Stephen Miller a récemment écrit sur X : "C'est le grand mensonge de l'immigration de masse (...). À grande échelle, les migrants et leurs descendants recréent les conditions et les horreurs de leurs pays d'origine dysfonctionnels."
Avec AFP
