
Les Irlandais se rendent aux urnes vendredi pour des élections anticipées. Les sondages laissent entrevoir une victoire du parti centriste, le Fine Gael, au détriment du parti actuellement au pouvoir, le Fianna Fail. La population reproche en particulier sa gestion de la crise économique au gouvernement sortant de Brian Cowen.
Les électeurs irlandais se rendront aux urnes vendredi 25 février. La campagne électorale a eu lieu sur fond d’une profonde crise économique, ce qui pourrait complètement changer la carte politique du pays.
Face à une crise économique d'une ampleur sans précédent dans l'histoire du pays, les Irlandais réagissent avec modération, ce qui étonne tous les observateurs étrangers. Pendant la campagne électorale, les Irlandais ont eu l'occasion de faire part de leur colère aux candidats, réclamer une politique de création d'emploi dans un pays où 14% des gens sont sans boulot, dont la moitié en chômage de longue durée. Mais cette colère ne s'est pas versée dans la rue comme en Grèce où les manifestations ont été très violentes il y a quelques années. Et l'Irlande n'a pas renversé son gouvernement et trainé son dirigeant en justice comme l'ont fait les Islandais. Dan O’Brien, l’un des éditorialistes de l’Irish Times a remarqué que les Irlandais réagissaient souvent avec "modération" voire "passivité" aux grands bouleversements sociaux et politiques, parce qu’ils manquent d’une de "structure de contestation". Pas de division gauche droite, du moins jusqu’à ces élections. Les syndicats négocient mais invitent moins leurs membres à manifester qu’ en France, par exemple. Par ailleurs, les banquiers et les politiques qui ont une part de responsabilité dans le déclenchement du désastre financier n'ont pas ou peu été inquiétés jusqu’ici. Peut être cette élection marquera-t-elle le début des représailles ?
Le grand ménage électoral
Le gouvernement sortant de Fianna Fail est en déroute complète. Les sondages marquent deux tendances fermes : le parti de centre droit Fine Gael en tête dans les sondages avec environ 38% d’intentions de vote ce qui fait d’Enda Kenny, son patron, le futur Premier ministre. Cette élection pourrait aussi être le point de départ d’un réalignement sur l’échiquier politique. Le nouveau Premier ministre sera de centre droit. Mais la gauche irlandaise devrait réaliser un bon score après une campagne polarisée par l'aide financière de l’Europe et du FMI (Fonds monétaire international), qui a pourtant sauvé l'Irlande de la faillite mais qui est vue désormais comme une mauvaise affaire pour le pays. Le plus populaire des dirigeants politiques irlandais est le Travailliste Eamon Gilmore (42% de soutien). Sa mantra : renégocier entièrement les termes de cette aide financière. Pour la première fois, le Labour (20% des intentions de vote) pourrait devenir vendredi la deuxième force politique du pays, loin devant Fianna Fail (14%). Du côté de la gauche dure, Gerry Adams fait son entrée politique en république d'Irlande et il pourrait doubler la mise de six sièges de son Sinn Féin au parlement (11%). Des indépendants de la gauche radicale pourraient aussi être élus.
Les statistiques citées sont extraites du sondage du sondage effectué par Millward Brown Landsdowne pour l’Irish Independent, publié le 23 février, avec 11% de sans opinion.
Hervé AMORIC
Avec:
- Maurice GOLDRING, Professeur émérite à l'université Paris VIII, Spécialiste d'études irlandaises
Emission préparée par Kate Williams, Marie Billon et Patrick Lovett