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"La comparaison avec l'Allemagne n'est pas forcément pertinente"

Le ministre du Budget, François Baroin, a annoncé que le déficit commercial français en 2010 était de 51,4 milliards d’euros. Christophe Blot, économiste spécialisé dans le commerce international, ne s'en inquiète pas outre mesure.

2010 aura été une nouvelle année noire pour le commerce international français. Moins qu’en 2008, lorsque le déficit commerciale avait atteint 56 milliards d’euros, mais pas loin. Après un léger regain en 2009, ce déficit a replongé à 51,4 milliards d’euros.

Mais pour Christophe Blot, économiste à l’OFCE-Sciences Po, il faut se méfier des conclusions hâtives.

France 24 : Quels sont les secteurs qui creusent ce fameux déficit commercial, estimé à 51,4 milliards d’euros, enregistré en 2010 ?
Christophe Blot : Le creusement du déficit par rapport à 2009 s’explique essentiellement par la facture énergétique. En fait, l’augmentation des prix et des importations d’énergie recouvrent quasi-entièrement l’accroissement du déficit en 2010.

L’autre élément notable est la persistance du déficit dans le secteur automobile. Il s’était installé en 2007 et ne s’est pas redressé depuis. Cette mauvaise performance a plusieurs origines. En effet, une partie grandissante des voitures, même de marques françaises, sont construites à l'étranger, et sont donc considérées comme des importations. En outre, l’Allemagne est de plus en plus compétitive dans ce secteur.

France 24 : Pierre Lellouche s’est réjoui de l’augmentation de 13,5% des exportations, a-t-il raison ?
Christophe Blot : Le secrétaire d’État au Commerce extérieur est dans son rôle quand il trouve des motifs de satisfaction. Mais il faut bien noter qu’il est normal que les exportations repartent en ce moment. Il ne faut pas oublier que le monde sort lentement d’une situation très morose pour le commerce international. Dans ce contexte, il est logique que les exportations connaissent des progressions aussi fortes. D’ailleurs, les importations françaises ont également explosé (+13,7%).

France 24 : Par rapport aux autres pays européens, comment se comporte la France ?
Christophe Blot : Comparée aux autres pays, l’évolution française n’est pas si inquiétante. L’Italie perd des parts de marché plus rapidement que la France et l’Espagne qui, après avoir progressé rapidement avant la crise, est maintenant handicapée par ses problèmes économiques. En fait, l’avantage de la France est de briller dans certains secteurs, comme l’aéronautique ou la pharmacie, où la concurrence avec des pays émergents n’est pas encore trop forte. L’Italie, par exemple, souffre énormément de cette concurrence dans certains de ces domaines d’exportations traditionnelles, comme le textile.

France 24 : Reste l’exemple allemand…
Christophe Blot : Cette comparaison n’est pas forcément pertinente. L’Allemagne a fait un choix de croissance basée sur les exportations qui a nécessité une forte pression sur les salaires. Conséquence : leur consommation intérieure n’est pas au beau fixe. Ce n’est pas le modèle français. Néanmoins la réussite commerciale allemande souligne certaines lacunes françaises dans ce qu’on appelle la compétitivité hors prix. Il s’agit d’un ensemble de critères comme la perception de la qualité des produits ou encore l’image d’une marque. C’est dans ces domaines que la France peut chercher à s’améliorer mais ça ne se fera pas en un tour de baguette magique.