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La nouvelle BD chinoise trouve pignon sur rue à Angoulême

, envoyée spéciale à Angoulême – Le jury de la BD alternative au festival d'Angoulême s'est offert les services des membres de "Special Comics", un collectif d'auteurs venus de Pékin et de Nankin. Méconnu en Chine, ce groupe fête la parution du quatrième numéro de sa revue...

La bande dessinée chinoise indépendante sort de l’anonymat. Elle est même désormais très en vue au festival d’Angoulême. Ce qui était impensable il y a encore quelques années, s’est produit cette année : des Chinois ont fait partie du jury de la BD alternative lors du célèbre festival, fin janvier.

Un collectif se démarque particulièrement : Special Comics. Elle est la plus importante revue de bande dessinée indépendante en Chine… mais reste assez confidentielle. Les centaines d'exemplaires de la revue sont vendus par Internet ou sous le manteau, entre fans de BD. Les membres du comité éditorial, tout comme les dessinateurs, sont bénévoles, les finances viennent de prêts d’amis.

Underground en Chine, Special Comics n’est pas moins international. Elle rassemble des dessinateurs chinois de Pékin, de Hong Kong, de Taïwan et même des États-Unis. Les textes, en chinois dans les bulles, sont traduits en anglais en bas de page.

"Le gouvernement n'a pas vraiment conscience de notre existence"

Les dessinateurs se démarquent, pour la plupart, du manga japonais, sont au fait de la BD indépendante européenne grâce à Internet, conservent des techniques de la peinture traditionnel chinois… et n’hésitent pas à aborder des sujets tabous en Chine. Les conditions de travail en usine, la liberté de parole, la gestion par les autorités de la grippe aviaire ou encore les tabous de l’éducation sexuelle (voir le reportage vidéo de Joris Zylberman pour voir quelques planches de BD).

Leur marge de manœuvre est relativement grande. Les autorités de Pékin ne semblent pas mesurer l’audience auprès de la jeune génération que peut avoir la BD underground, ni la viabilité de ce type d’initiative.

L’air du temps à Pékin est pourtant de promouvoir les arts. Pour preuve, le premier festival de films "Made in China" se tient à Paris et dans trois villes françaises, en ce moment. "Alors pourquoi pas Special Comics ?" demande un petit auditoire de curieux au festival d’Angoulême. "Je ne veux même pas me poser la question !" ironise Yan Cong, éditeur de Special Comics.

Celui-ci finit par se féliciter de la situation. "Ici, le gouvernement n’a pas vraiment conscience de la BD indépendante, car notre voix n’est pas suffisamment forte. C'est notre chance, cela nous donne un espace pour exister."