
Les camions des forces de l'ordre ont pris position, les internautes n'ont plus accès au réseau et les communications téléphoniques sont coupées. Dans plusieurs villes du pays, la police tente de disperser des manifestations anti-Moubarak.
Le ton monte en Egypte pour cette quatrième journée de manifestation consécutive en Egypte.
Malgré l’important dispositif policier mis en place, des groupes mobiles d’une centaine de personnes se dirigent vers la place Tahrir et la mosquée al Azhar, haut lieu de l’islam sunnite où la situation a rapidement dégénéré.
Aux environs de la mosquée al-Azhar, la police a tiré des balles en caoutchouc sur les manifestants qui ont répondu par des jets de pierres en direction des cordons policiers, en scandant des slogans hostiles au président Hosni Moubarak.
Selon l’envoyé spécial de FRANCE 24, Ygal Saadoun, présent dans un cortège au Caire, un policier a tiré à bout portant une grenade lacrymogène dans le ventre d’un manifestant.
"La police a décidé de faire une opération coup de poing pour arrêter les manifestations par tous les moyens. L’armée n’a pas pris part à l’opération, mais ce sont surtout des policiers, des forces anti-émeutes équipées de bombes à eaux et grenades lacrymogènes", raconte Ygal Saadoun.
La police égyptienne a par ailleurs empêché l'ex-directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique Mohamed el-Baradeï de circuler librement, au Caire, où il comptait se joindre au cortège des manifestants, selon la chaîne d'information Al-Jazira.
Des rassemblements s’organisent également à Alexandrie, Al-Mansourah, Suez, et Assouan.
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Un important dispositif policier
Des dizaines de camions de police quadrillaient le centre ville vendredi matin, d’après les correspondants de FRANCE 24 sur place. Des camions occupés par des miliciens en civil ont également été vus en train de circuler dans les rues du Caire.
"La police régulière est déployée partout. Mais il y a eu aussi un défilé de camionnettes fonçant dans les rues, avec à leur bord des hommes en civils, avec des bouts de bois", raconte Gallagher Fenwick, envoyé spécial de FRANCE 24 au Caire.
Les "baltageyas" en arabe, des casseurs reconnaissables à leurs bâtons sont payés à la journée par le gouvernement pour "faire régner l’ordre". Ils se seraient regroupés à proximité de la place Tahrir, principale lieu de rassemblementdepuis les manifestations du 25 janvier.
it"Parfois, ils se mêlent à la foule et matraquent les manifestants", continue Ygal Saadoun.
Sur Facebook, des activistes égyptiens craignent que la police égyptienne n’emploie des provocateurs dont les actes serviraient d’excuse à la répression.
"Les activistes s’attendent à ce que le gouvernement mettent le feu aux voitures et accusent les manifestants d’avoir tout brûlé, s’en servant comme prétexte pour réprimer les manifestations dans la plus grande violence", peut-on lire sur la page Facebook de Stephen McInerney, directeur du Projet pour la Démocratie au Moyen-Orient, qui a pu parler à des manifestants jeudi soir.
Une "forteresse en train de se refermer sur elle-même"
Tous les réseaux Internet et téléphones mobiles sont coupés depuis ce matin. Mais les
itopposants se sont donné rendez-vous depuis plusieurs jours à midi, heure locale, après la prière.
"On se sent comme dans une forteresse qui est en train de se refermer sur elle-même", témoigne Gallagher Fenwick.
Fer de lance de la contestation, le mouvement du 6-Avril, un groupe de militants pro-démocratie, appelle depuis plusieurs jours à poursuivre la mobilisation vendredi, malgré le déploiement d'un important dispositif policier.
"Date : vendredi. Heure : midi. Evenement : pot de départ d’Hosni Moubarak", peut-on lire en arabe sur la page Facebook d’un jeune Égyptien.
Mais le dispositif policier laisse encore planer le doute sur le déroulement de la journée.
Un important système répressif
Au moins 1 000 personnes auraient été arrêtées depuis mardi, selon les services de sécurité, dont 500 pour la seule journée de mercredi. Parmi elles, figurent environ 90 personnes interpellées dans le secteur de la place Tahrir, dans le centre du Caire, et 121 membres de l'organisation islamiste des Frères musulmans, officiellement interdite mais tolérée dans les faits, interpellés à Assiout, au sud de la capitale égyptienne.
Ces manifestations sont inédites depuis les soulèvements de 1977, provoqués par la hausse du prix du pain.
Hosni Moubarak, 82 ans, est au pouvoir depuis 1981. Une élection présidentielle est prévue en septembre, mais le chef de l'État n'a toujours pas fait part publiquement de son intention de briguer un nouveau mandat. Son fils Gamal, 47 ans, est annoncé comme un possible successeur du "raïs".