La semaine s’annonce rude pour le gouvernement. La pression de la rue s’accentue pour demander la démission des caciques du régime de Ben Ali. Et personne ne veut céder : manifestants et policiers s’affrontent devant le palais du Premier ministre.
Le parquet de Paris annonce, ce lundi, avoir ouvert une enquête préliminaire sur les biens en France de l'ex-président tunisien Zine El-Abidine Ben Ali et de son entourage. Celle-ci fait suite à une plainte déposée par trois ONG, le 7 janvier dernier. Selons elles, ces biens ont vraisemblablement été acquis avec de l'argent volé à l'État tunisien.
La semaine s’annonce mouvementée pour le gouvernement tunisien de transition. Loin de s’essouffler, le bras de fer entre la population et les autorités se poursuit : lundi, des milliers de manifestants ont de nouveau réclamé la démission du gouvernement de transition alors que les instituteurs entamaient une grève illimitée.
En début d'après-midi, les manifestants se sont réunis esplanade de la Kasbah, près des bureaux du Premier ministre tunisien, Mohammed Ghannouchi. Plus tôt dans la journée, des heurts ont brièvement éclaté au même endroit entre des protestataires et des policiers anti-émeutes, qui tentaient d'exfiltrer des fonctionnaires du siège du gouvernement. Les policiers ont riposté par des tirs de gaz lacrymogènes à des jets de pierres et de bouteilles.
Le général Rachid Ammar, le chef d'état-major qui avait refusé de soutenir la répression de la révolution, a déclaré à une foule rassemblée devant les bureaux du Premier ministre: "Notre révolution est votre révolution. La révolution de la jeunesse pourrait être perdue et exploitée par ceux qui appellent à un vide. L'armée protègera la révolution."
Les instituteurs en grève illimitée
itUn millier de jeunes venus notamment du centre-ouest du pays, assiègent également depuis dimanche le palais de la Kasbah. Ils exigent la démission du gouvernement, dominé par des ministres en place sous le régime du président déchu Zine El-Abidine Ben Ali. Bravant le couvre-feu, des centaines d'entre eux ont passé la nuit sur place.
Après deux semaines de fermeture, les écoles devaient aussi rouvrir leurs portes ce lundi, mais les instituteurs ont entamé une grève illimitée, en soutien aux manifestants. "L’appel à la grève semble bien suivi, notamment dans les écoles publiques, témoignait en début de journée Pauline Simonet, envoyée spéciale de FRANCE 24 en Tunisie. Dans les écoles privées en revanche, la plupart des enseignants semblent avoir repris les cours. Le gouvernement a fait de cette rentrée scolaire un élément important pour un retour à la normale dans le pays. C’est une journée et une semaine test pour le gouvernement."
Selon le secrétaire général du Syndicat national des enseignants du primaire, Hfayed Hfayed, "le mouvement est suivi à 90-100% dans tout le pays. Il n'y a que quelques rares cas d'enseignants non-grévistes".
Le gouvernement de transition fait le dos rond
itDepuis une semaine, le gouvernement fait le dos rond et tente en vain d’apaiser la rue. Le Premier ministre du gouvernement de transition, Mohammed Ghannouchi, qui occupait le même poste sous Ben Ali, s’est exprimé vendredi soir à la télévision au cours d’une interview au ton inédit. Apparaissant à plusieurs reprises au bord des larmes, le chef du gouvernement a répété qu’il ne briguerait pas le pouvoir à l’issue de la période de transition. "J’avais peur, comme tous les Tunisiens", avait-t-il assuré en évoquant le régime de Ben Ali, affirmant "qu’aucun retour en arrière était possible".
Kamel Morjane, ministre des Affaires étrangères du gouvernement de transition et de l’ère Ben Ali, a lui affirmé au Figaro ne "pas tenir absolument à rester au gouvernement", mais vouloir "mettre ses compétences à profit". Il a également appelé à "un retour à la normale au plus vite".
Un remaniement gouvernemental est, par ailleurs, attendu dans les prochains jours pour pourvoir les postes laissés vacants par les cinq ministres démissionnaires la semaine dernière, a annoncé lundi le ministre de l'Éducation, Taïeb Baccouche.
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