![L'espionnage industriel qui venait de l'Empire du Milieu L'espionnage industriel qui venait de l'Empire du Milieu](/data/posts/2022/07/16/1657945094_L-espionnage-industriel-qui-venait-de-l-Empire-du-Milieu.jpg)
Renault n'exclut pas qu'une entreprise chinoise soit derrière l’espionnage industriel dont le groupe a été victime. Depuis une trentaine d’années, Pékin a développé ses activités d’intelligence économique pour rattraper son retard technologique.
Renault n’est pas seul. S'il s'avère que le constructeur automobile français a bien été victime d’espionnage industriel au profit de la Chine, il ne serait toutefois qu’une énième victime de l’offensive économique ourdie par Pékin pour rattraper son retard technologique.
En Allemagne, le spécialiste du contre-espionnage Walter Opfermann a évalué, en 2009, que les entreprises allemandes perdaient quelque 50 milliards d’euros par an à cause de l’espionnage industriel chinois. Aux États-Unis par ailleurs, un Chinois a pu espionner pendant 30 ans le géant aéronautique Boeing avant d’être découvert en 2009.
Après la mort de Mao, c'est la ruée sur l'extérieur
Pékin s’intéresse à l’intelligence économique depuis les années 1970. Dans son livre intitulé "Les services secrets chinois, de Mao aux JO", le journaliste-écrivain français Roger Faligot explique que cette forme de renseignement s'est développé en Chine lors de la réorganisation des services secrets, après la Révolution culturelle (1965-1969). Mais elle n'a pris son essor qu’après la mort de Mao Zedong, en 1976. Pékin décide donc de s’ouvrir sur l’extérieur. Il devient urgent de faire un grand bond en avant économique.
La Chine adopte alors le principe décrit par Ben N. Venzke, un spécialiste américain du renseignement : "Pourquoi dépenser 10 milliards de dollars en dix ans de recherche et développement quand on peut acheter la même chose en soudoyant un ingénieur pour 1 million de dollars".
La Chine n'a signé aucun accord en la matière
Mais Pékin est loin d’être le seul à avoir recours à cette pratique. "Seulement, comme les Chinois sont très nombreux et disposent de plus d’argent que les autres, ils font plus parler d’eux", précise le spécialiste en intelligence économique Peer de Jong. Surtout, la Chine n’a jamais signé les accords de l’OCDE sur les bonnes pratiques commerciales, un traité qui interdit certains procédés comme l’espionnage industriel. "Alors que les États signataires doivent être très discrets, en Chine, c’est encore un sport national", affirme encore Peer de Jong.
Les procédés utilisés par les Chinois n’ont rien d’extraordinaire. L’argent - comme dans le cas de Renault - ou le sexe sont leurs principales armes. Les attaques informatiques deviennent aussi de plus en plus fréquentes, comme le souligne la Commission de sécurité sino-américaine du Congrès à partir de 2007. Enfin, la pose de micros très puissants à l’extérieur des sociétés visées ou la visite de faux plombiers continuent à être utilisées, selon Peer de Jong.
La Chine n'a pas non plus le monopole de l'espionnage
Mais la menace de l’espionnage industriel chinois est aussi, parfois, surévaluée. "Rien n’indique pour l’instant que le responsable est vraiment chinois dans le cas de Renault", soutient Peer de Jong. Un point de vue à contre-courant de l’opinion actuelle qui veut qu’une entreprise chinoise ait soudoyé trois employés de Renault pour acquérir des technologies relatives aux voitures électriques.
En 2005, une jeune étudiante chinoise avait déjà été au cœur d’un emballement médiatique similaire dans l'Hexagone. L’équipementier automobile français Valeo avait accusé l'une de ses stagiaires, Li Li, d’avoir dérobé des documents confidentiels de l’entreprise. Rapidement accusée d'espionnage, celle-ci avait toutefois été blanchie en deux ans plus tard. Et n'avait écopé que de deux mois de prison ferme pour avoir sauvegardé sur son ordinateur personnel les fichiers en question.